Nouvelle École
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Nouvelle École

Émission TV Netflix (2022)

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Le format télé-réalité est mortifère. Avec ses musiques pseudo-épiques censées faire monter la tension et ses plans immondes (mention spéciale à ceux sur les grandes villes, Paris, Marseille et Bruxelles, Christopher Nolan attend toujours les royalties) les sens du spectateur ne sont pas ménagés.


Pour ce qui est du montage, il se saborde. En effet, après avoir montré que SCH est une victime de la mode, quel est l'intérêt de faire du suspense pour savoir qui il va choisir entre celui qui a l'aspect d'une caillera marseillaise classique et celui avec une salopette qui ferait pâlir d'envie n'importe quelle bobo du 9 ème ?


En ce qui concerne le jury, ils en ont peut-être l’aspect, mais ils développent peu, et ce sont davantage les intervenants qui vont réellement épauler les concurrents. Eh oui, les conseils de Youssoupha et de Sofiane valent mieux qu’un “Lourd !” “Sale” ou “T’as dead ça !” Ils tiennent plus de l’animateur que du juge. Le plus sympathique reste SCH, qui met une bonne ambiance et est celui qui s’en sort le mieux en termes de critique. Niska est plus discret, voire effacé, et ne marque pas par ses interventions.


Quant à Shay, elle fait office de boussole indiquant le sud. Beaucoup d’encre a coulé lorsqu’elle a préféré Mira le dalleux (dont le premier morceau ressemblait à Cocorico ?) à Ben PLG. Mais la liste est longue : afficher ouvertement sa préférence à une concurrente au même niveau que son rival masculin essentiellement car ça manque de XX dans le rap game, vouloir garder un rappeur médiocre et faire un caprice lorsqu’elle n’obtient pas satisfaction, sa remarque méprisante sur “Vink de la campagne” qui ne bégaye pas et qui parle d’autre chose que du manque d’argent…


Les épreuves ne manquent pas d’intérêt, malheureusement, la production ayant décidé d’aller au triple galop, les candidats oublient leurs textes et les moments gênants s’enchaînent, notamment lors de la phase de sélection ou lors de l’épreuve du cypher, où le meilleur groupe est celui où personne ne bégaye.


Celle du battle fut une grosse déception. Pour ce genre d’exercice, on s’attend à un affrontement gréco-perse, on veut Verdun, Stalingrad, Charlie éclatant le G.I… Et s’il y a quelques bons mots, ça manque cruellement de percutant. De plus, il ne rend pas justice à certains concurrents. B.B. Jacques, qui rappe comme un chien enragé, s'avère mauvais dans l’exercice, et se fait sortir par STLR, qui a quelques réussites à son actif, mais qui n’est pas non plus hors du commun et sera éliminé à la prochaine étape pour manque d’originalité. Aïe.


Déconvenue également pour l’affrontement entre Elyon et Vink, les deux seuls hommes qui proposent autre chose que la chouine à cause du guetto. D’ailleurs, éliminer le Bordelais parce qu’il a bégayé et oublié son texte, soit. Par contre, pourquoi garder Leys qui a failli fondre en larmes et oublié son texte ? Il est vrai qu’elle a une bonne plume et qu’elle surprend en bien lorsqu’elle se met à rapper, mais lors de l’épreuve précédente, tous ceux qui avaient ce genre de défauts ont été éliminés.


Enfin, il y a le cas de Soumeya. Dans l’épreuve précédente, elle ne s’en était pas trop mal sortie, et sa conversation avec Youssoupha laissait présager un couplet sanglant. Malheureusement, elle perd son sang-froid face à K.T. Gorique, qui n’a pas non plus cassé des briques, l’insulte et rate donc pitoyablement son passage. Que Soumeya soit éliminée, “car c’est l’mental” (merci Niska) oui. Par contre, continuer à la filmer lorsqu’elle fait un aparté avec sa rivale, Youssoupha qui lui dit d’aller demander pardon, c’est remuer le couteau dans la plaie. Elle s’est certes décrédibilisée toute seule, mais si le Palmashow avait choisi de parodier ce passage, ils n’auraient pas eu grand chose à réécrire.


Pour les clips, ils ont éliminé STLR car peu original mais ont gardé Fresh qui ne l’était guère plus… Et pour rajouter à l’incompréhension, ils éliminent K.T. Gorique car “c’est trop personnel”. Mais, qu’on accroche ou non, le but de l’exercice était pourtant de montrer l’univers de l’artiste.


Pour l’épreuve des featurings, Leys est vraiment géniale mais elle bégaie et passe quand même en finale, situation et décision finale similaires à ce qui s'est passé dans Rythm + Flow. Les candidates produisent de la musique de qualité, mais se ratent. Qu'importe, il faut une femme en finale.


La finale est une épreuve plus agréable à suivre, voir chacun des finalistes s'entourer de professionnels et développer leurs projets respectifs est assez plaisant. Pour ce qui est de l'épreuve en elle-même, les trois concurrents sont passés à la vitesse supérieure, mais aucune surprise en ce qui concerne le gagnant.



Pour la deuxième saison, il semblerait que la production ait essayé de prendre en compte les retours sur la première saison. Le jury essaye de développer et d'être plus pertinent dans leurs critiques. Shay, notamment, a des prises de position qui sont à l'opposé de l'an dernier : plus question de privilégier les femmes, elle semble s'apercevoir que le côté "Bad bitch" a ses limites, pas d'indulgence pour les bègues, un peu plus d'estime pour les rappeurs blancs.


C'est un bon début, ça lui permet de sortir sensiblement moins de conneries qu'avant, et elle a raison sur certains points. Mais elle manque encore d'objectivité et se leurre parfois. Par exemple, lors du cypher, le passage du duo Ledos est le meilleur du groupe, mais elle décréta que l'on ne ressentait pas d'alchimie dans leur binôme, ce qui, au vu de leur prestation, est erroné. Sans avoir la synergie des membres d'A Tribe called Quest, ils se complètent et se répondent bien.


Les critères de jugement sont fluctuants : les trois membres du jury estiment que Warend a beaucoup de potentiel mais il est éliminé à cause de sa piètre performance au battle. Soit. Mais en demi-finale, Yuz Boy se qualifie pour la finale malgré sa prestation jugée, à juste titre, catastrophique au motif qu'il a plus de potentiel que Lpee, qui s'est pourtant mieux débrouillé que son concurrent. Pour la finale rebelote, on annonce un barème qui transforme l’épisode en fabrique à tube, pour finalement arrêter le choix sur le plus original car “il faut éduquer le public à ce genre de choses”.


Autre virage à 180 degrés par rapport à la première saison : l'absence de femmes passée l'épreuve des freestyles. Ce n'est pas un problème en soi, mais lorsque que l'on compare le niveau de certaines candidates et celui des hommes, il y a de quoi hausser les sourcils. Oui, Bayass, au vu de sa médiocrité, a volé la place de Nayra, puis celle de La Valentina. Il est vrai que les prestations respectives des deux jeunes femmes n'étaient pas parfaites, les onomatopées dans le texte de la première et l'essoufflement de la seconde ont joué contre elles. Mais c'est une compétition, et leurs performances étaient supérieures à celles délivrées par ledit Bayass, qui a passé deux épreuves de trop. C'est d'ailleurs cette bizarrerie qui a poussé certains à crier au favoritisme. Au vu de son univers musical, il est possible que la proposition artistique de Nayra n’ait pas touché Niska, d’où la décision de ne pas la prendre, mais si cela explique cette décision, elle ne l’excuse aucunement, car l’objectivité, la curiosité et l’ouverture d’esprit sont importants dans les milieux artistiques. Et c’est ce qui fait de Niska le pire juge de cette saison, Shay doit être contente de ne plus avoir ce titre.


Par rapport à la première saison, il y a un meilleur niveau global, les épreuves sont donc plus agréables à regarder.


L'épreuve du cypher est très bien encadrée par Médine et les résultats sont donc satisfaisants. Il est cependant dommage que certains candidats soient éliminés et pas certains. Par exemple, dans le groupe de Dau, Nali est éliminé car sa prestation est jugée très bonne, mais moins que celle des autres membres du groupe. Alors que dans le groupe de Warend, la prestation d'Arka est passable mais considérée comme parmi les meilleurs de son groupe et il est donc qualifié pour l'épreuve suivante. La logique est compréhensible, mais c'est dommage.


Pour l'épreuve des duos, force est de constater que parmi les chansons choisies pour cet épisode, les plus mauvaises de base ont donné les meilleures prestations. Vamos est une purge auditive, Naps a été très mauvais pour cette épreuve (heureusement que ça n'est pas pris en compte pour l'évaluation) mais Dau a bien travaillé.

A contrario, Mwaka Moon est une bien meilleure chanson, mais Yuz Boy était inaudible. De plus, remplacer le deuxième couplet par des vocalises ne lui rend pas service, mais cet avis n’engage que moi.


En définitive, ce programme est assez décevant. À titre personnel, je ne suis pas une grande auditrice de rap, mais pas besoin de ça pour sentir que le format télé réalité, s'il veut capitaliser sur cette culture, ne se prive pas pour la ridiculiser et la rabaisser à son propre niveau - abyssal. La production donne des laps de temps trop courts pour chaque épreuve, pour que les candidats soient sous pression et pour qu’il y ait des pétages de câble à filmer. Qu’importe, le retour sur investissement est là.


Dal_MT
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le 11 juil. 2023

Critique lue 13 fois

Dal_MT

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