Les Experts : Miami
4.5
Les Experts : Miami

Série CBS (2002)

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Il n’y a pas grand-chose de plus naturel que d’essayer de reproduire un succès. Après tout, c’est comme cela qu’on inventa l’industrie. Décliner la formule des Experts n’était pas forcément une mauvaise idée : une franchise comme Law & Order a prouvé qu’il était possible de multiplier les séries comme les pains, avec un succès inégal mais réel ; les Allemands sont habitués depuis longtemps aux déclinaisons régionales de leurs séries policières.

Pour Les Experts, cependant, c’est un véritable naufrage. Un torpillage en règle. Une agression en bande organisée. La faute à des scénarios médiocres, d’une part, mais surtout à la performance cataclysmique de nanardise de l’acteur principal : David Caruso, alias Horatio Caine. L’idée pouvait séduire : après les scènes nocturnes des Experts à Las Vegas, voici le soleil éclatant de la Floride ; après les intrigues tortueuses, parfois même psychologiques, des crimes, voici le strass, les paillettes et le botox du grand banditisme international, des trafics d’armes et de drogues. Aucun risque de confondre les deux univers : avec sa photo éblouissante toute en teintes jaunes et oranges, Les Experts : Miami est visuellement reconnaissable en quelques secondes, même si on a raté le générique de début. On perd malheureusement en route la qualité des scénarios. Autant prévenir tout de suite : ici, c’est du grand n’importe quoi décomplexé, sans souci de réalisme ou de cohérence. Seulement un prétexte pour le Horatio Caine Show.

Horatio Caine. Le nom est lâché.

Une sorte de Rick Hunter avec lunettes noires et mains sur les hanches, interprété par l’acteur le moins expressif depuis Charles Bronson, Chuck Norris et Steven Siegal (réunis). Un modèle pour tous les mauvais comédiens du monde. Une icône du nanar policier des années 2000. David Caruso avait connu une gloire instantanée en 1993 avec la première saison de NYPD Blue, son Golden Globe lui monte alors à la tête (il n’est jamais redescendu, d’ailleurs) et il quitte aussitôt la série pour conquérir le grand écran. Mal lui en prit : sa carrière cinématographique est un tel désastre qu’on en rit à gorge déployée dans le premier épisode de South Park (en ordonnant à son frère de sauter d’une navette spatiale en plein vol, Kyle lui dit d’ « imiter la carrière de David Caruso »). Alors qu’il était tout près de raccrocher les gants et d’ouvrir un magasin en Floride, la production des Experts : Miami le rattrape au vol et lui offre le rôle du chef de l’équipe de jour de la police scientifique de Miami. Miracle : le public se rue en masse devant son petit écran, malgré les regards catastrophés de la critique unanime.

Alors que les autres « Experts », à Las Vegas comme à Manhattan, sont des scientifiques et des techniciens, qui n’utilisent qu’exceptionnellement la force, Horatio Caine est un homme d’action.
En blouse, il ne ressemble à rien, visiblement mal à l’aise. Il lui faut un costume noir, des lunettes de la même couleur qu’il enlève et rechausse pour ponctuer ses phrases avec une hilarante régularité de métronome, et un gros calibre au bout du bras. Un dur, un vrai, avec pour seule variante aux sourcils froncés et aux traits dures de l’enquêteur implacable, le regard de cocker triste de l’homme blessé, qui le cache mais qui souffre (faut dire qu’il est amoureux de sa belle-sœur, le pauvre).

Deux expressions faciales, pas une de plus. Et ça fait presque dix ans que cela dure. Du métier de policier (et d’acteur), David Caruso ne connait apparemment que ses VHS de l’Inspecteur Harry. Sur les Internets, Horatio Caine est devenu une légende, source de multiples parodies : on relève principalement ses invraisemblables tics de comportement (le jeu de lunettes, l’attitude badass constante et caricaturale) et son recours systématiques à des one-liners, petites phrases censément ironiques ; notamment pour conclure chaque prégénérique.
Les créations moqueuses des internautes sont bien entendu beaucoup plus drôles que l’original. Irrésistiblement nanar lorsqu’on le découvre, Horatio Caine tourne inexorablement au navet avec le temps et la répétition jusqu’à l’absurde des mêmes formules.

Naufrage créatif, Les Experts : Miami n’en reste pas moins la deuxième série la plus regardée au monde. Elle fait les belles soirées de TF1 et s’avère une valeur sûre de la fiction policière, en termes d’audience. Impossible de comprendre pourquoi, tant cette série, déjà répétitive et peu originale par nature, s’enferre, épisode par épisode, dans la médiocrité, la vulgarité, la violence crétine et la superficialité. Une sorte de croix télévisuelle que doivent porter tous les sériephiles. La nemesis ultime de tous ceux qui aiment les bonnes histoires, les personnages fouillés et la télévision de qualité.
Tibbar
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le 15 août 2013

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Tibbar

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