Hot Ones
6.7
Hot Ones

Émission TV Canal+ (2022)

L'adaptation qu'on avait pas demandé

Autant vous prévenir tout de suite, je suis la version américaine depuis longtemps et sans être un fan hardcore j'ai quand même dévoré assez d'interviews Hot Ones pour en saisir l'essence... Et il faut dire que la version française n'est qu'une pale copie, importée sans efforts et dénuée de respect pour la version originale.


Le concept de base est très simple : un animateur pose des questions à un invité plus ou moins connu, tandis qu'ils mangent en tête-à-tête des pilons de poulet de plus en plus épicés. 10 questions, 10 pilons, le tout en 30 minutes... Voilà. C'est tout con et c'est un concept qui aurait pu être développé par n'importe quelle Youtuber tellement l'idée semble loufoque et propre à ce que l'on peut trouver sur internet.


Version américaine

Avant de démonter la version française il faut que je vous parle des qualités de la version originale. Évidemment, ce qui nous attire de prime abord c'est la curiosité de voir des célébrités en chier leur race en mangeant des sauces pimentées atteignant des niveaux de piquant absurdes. Mais l'émission américaine n'aurait certainement pas connu le succès sans l'animateur qui la présente (Sean Evans) et l'équipe derrière la caméra qui prépare l'interview. Sean déborde de bonhommie, il invite des inconnus à sa table et il parvient à les mettre à l'aise dès la première minute d'interview. Les échanges entre lui et les invités paraissent honnêtes et sincères, et c'est ça qu'on apprécie dans Hot Ones (U.S.) ... C'est un moment d'échange authentique entre une personne qui s'intéresse à son invité, et invité qui prend le temps de produire des réponses construites et pertinentes. Car... car les questions sont pertinentes ! Et recherchées ! On sent un travail de fond de la part de l'équipe pour fouiller dans la vie et la carrière des invités afin de produire des questions intelligentes et intéressantes... L'invité est respecté, et le spectateur aussi par la même occasion.


Pour autant, l'émission ne verse pas dans le voyeurisme et le sensationnalisme... Il y a un juste équilibre entre l'intérêt pour la vie professionnelle des invités et leur vie « privée ». Les invités eux-mêmes sont régulièrement et agréablement surpris par les questions, habitués la plupart du temps à des interviews bas du front préparées à la va-vite. Avant d'inviter des gens autour de sauces piquantes, Sean Evans travaillait déjà comme interviewer et en le voyant œuvrer dans Hot Ones on comprend très vite qu'il a un talent naturel pour cet exercice.


Version française

Comment vous dire ? C'est un massacre. Kyan Khojandi est sympa mais... comme beaucoup de talk shows à la française tout ça pue la recette (comme disait l'autre), ça pue le faux. Pourtant Kyan invite ses potes pour faire démarrer la machine et instaurer sur le plateau un peu de bonne humeur. Malgré ça, on voit bien qu'il est là pour faire son émission et on voit bien que l'invité est là pour faire sa promo.


Alors, certes... On se doute bien que les invités vont pas venir pour passer faire un « coucou »... Mais là c'est évident qu'ils en ont rien à foutre du concept de l'émission. Ils en ont rien à foutre de leurs questions et de leurs réponses... Y'a aucun travail de fond, c'est pauvre et j'oserai même dire que c'est dénigrer le spectateur que lui présenter une adaptation si pauvre d'une émission qui s'est fait connaître pour son intelligence. Et du coup bah... On est face à une énième émission télé (bien que ce soit diffusé sur internet), plate et ennuyeuse. Dans Hot Ones (France) les questions volent pas haut et les invités s'en foutent un peu donc ils répondent vite fait sans trop d'intérêt pour l'interview.


De plus, la promo prend une place disproportionnée en comparaison de la version U.S. Oui, c'est une particularité culturelle qui distingue les talk show américains des émissions françaises... M'enfin là c'est chiant, on a l'impression de regarder une publicité étirée plutôt que d'assister à un réel moment de complicité.


Je finis en parlant d'un « petit » détail : l'aspect culinaire de l'émission U.S. qui est quasi-totalement absent de la version française. C'est un comble, tout de même... La version originale a participé à diffuser la culture de la sauce piquante (qui, il est vrai, n'est pas très développée chez nous) et les sauces sont devenues des personnages à part entière dans l'émission. Les invités viennent pour découvrir cette culture, ainsi que pour manger et partager un repas. C'est un défis, certes, mais c'est avant tout un partage... une forme de partage que l'on connaît tous. Et il est triste de constater que cet aspect là est totalement effacé de la version française... Les sauces ne sont qu'un prétexte à faire de la promo. Les trucs que les invités mangent ne sont qu'un prétexte à faire de la promo.


Au final, la version française c'est la version américaine sans le talent ni la passion. C'est, comme beaucoup de bouses audiovisuelles, un support promotionnel plutôt qu'un vrai concept qui se respecte.

kevsler
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le 26 févr. 2023

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