Des larmes de crocodiles à la déchirure de l'âme

Cette série est la preuve qu'on peut prendre son temps pour raconter la peur, la douleur, le doute, l'amour, l'enfermement tout autant réel que symbolique et rester haletant, prenant, entêtant. Oui, Hatufim est une série intimiste qui va au coeur de ses personnages, les fouillant au plus profond de leur âme, les faisant jouer la comédie, jusqu'à ce que les fausses larmes deviennent vraies, jusqu'à ce que la réalité éclate, étouffe, détruise. Même après 17 ans en captivité, il faudra pour Ouri, retourner chez son père, malade, doux, aimant, pour Nimrod tenter de batailler avec une femme qui s'est sacrifiée et qui attend trop d'un retour qui fragilise ses enfants. Comme si tout cela ne suffisait pas,ce retour au pays est aussi sujet de discorde, sur la monnaie d'échange, sur les secrets que gardent nos deux hommes sur leur captivité et tout ce qui s'y est produit. Peu à peu la série révèle des éléments sans jamais condamner d'avance aucun de ses personnages (à la différence d'Homeland finalement, puisqu'il faut bien finir par en parler).

La force réside dans les prestations des acteurs et notamment des deux ex-prisonniers, sobres, mutiques, puissants. Il y a tous ces êtres qui pleurent de se retrouver, qui ont mal de ne plus savoir s'aimer et au milieu il y a Yaël, époustouflante actrice, qui communique avec un frère plus vivant que tous ceux revenus, lui qui n'est pas revenu ... L'attente, c'est ce qui prime le plus ici, attendre que ça passe, tenter de faire en sorte que ça ne soit plus trop dur, se voiler la face, Dana en est le plus bel exemple. Cacher, retenir puis exploser. Refuser des sourires condescendants parce que le monde a évolué sans nous... Et tenter de le rattraper, alors même que la vérité vient tout balayer, autant les personnages, que nous, spectateurs qui sommes à la fois touchés, transportés, attendant déjà la suite, celle qui révélera tout ce que l'âme a de plus sombre et qui dira si la vie peut triompher ...