Sekai no Chuushin de, Ai wo Sakebu est le drama le plus triste que j'ai eu l'occasion de voir, et c'est un chef d'oeuvre du genre. Inspiré d'un livre du même titre très connu au japon, ce drama est un hymne à l'amour pur et véritable, l'amour des sentiments, du regard de l'autre, du premier regard, du premier amour amorcé à l'adolescence, jeunesse en laboratoire.


On commence avec une scène d'ouverture poignante, orchestrée par la sublime musique de Kono Shin qui vous prend aux tripes. Le ton est donné, on entre dans le vif du sujet. On sait déjà que l'histoire sera triste et belle, mais aussi dure, aussi dure que la pierre qui percute nos émotions à fleur de peau. Uluru, gigantesque rocher australe, s'étend à perte de vue nous révélant un peu l'immensité du récit qui va défilé, et ce roc s'épanche aussi dans le vide, un vide infini au « Centre de la terre » contre des aspérités temporelles d'une ultime douleur qui traversera le temps.


C'est l'histoire entre deux jeunes lycéens japonais, Aki et Saku. L'histoire démarre dans le meilleur des mondes et tournent dans le drame qui va faucher une femme à en devenir, c'est à dire Aki, par la maladie laissant sur le carreau Saku. Jusque là, on pourrait dire que la situation est banale pour le genre et qu'on aura droit à une énième série à l'eau de rose où les pleurs seront en abondance, comme le font si bien les Asiatiques.Cependant, Sekai no Chuushin... est bien plus que cela. C'est surtout l'histoire d'une corrélation entre deux personnages qui ne font qu'un : Matsumoto Sakutaro alias Saku. L'un représente le présent, l'autre le passé. Le Saku du présent est sans envergure, tête baissée, comme un être desséché par des larmes assaillant son corps, son coeur et son esprit meurtris.Dans le passé, Saku est un jeune homme plein d'énergies ayant vécu son premier amour comme si c'était le dernier, et y consacrant l'entièreté de son âme. Sur ce point-là, on pourrait dire que Saku est corruptible, mais c'est tellement intense et jouissif, comme si on suçait à longueur de journée un bonbon édulcoré à son parfum préféré.


La notion de temporalité est importante dans ce drama, symbolisée par les petites cassettes que s'échangeaient Aki et Saku pour converser, et conservées par Saku dans sa longue période d'extrême tristesse. C'est comme un artefact de douleur, car entendre toujours la voix de celle qu'on aime et qu'on a aimé est insupportable et un peu masochiste. On oublie rarement son premier amour, mais il est rare qu'il subsiste éternellement, même au-delà de la mort. Le Saku du présent vit un peu ou pas du tout ; il se laisse vivre comme s'il 'était déjà mort, existence lacérée d'un amour perdu. Il n'attend que l'inéluctable, rejoindre son immaculé au pays céleste.


Parlons un peu d'Aki, l'objet de tous les maux de Saku. Elle est belle, enjouée, enfin la fille rêvée avec ce brin de malice qui vous pique, qui vient vous chercher et qui suscite votre éveil. Elle est aussi courageuse. Le courage, un lien avec l'autre Aki, celle du présent, qui est plus qu'une collègue dans la vie présente de Saku. Étrange coïncide qu'elle s'appelle aussi Aki, une façon de plus pour tourmenter l'esprit de Sakutarô. Elle est compréhensive, douce comme une mère, et partage la douleur de Saku, l'épouse idéale. Bien qu'il ait des sentiments pour elle, il s'interdit d'aimer à nouveau, car aimer à nouveau serait « oublier », oublier l'amour véritable qu'on a tant chéri et dont on ne peut mettre en doute la quintessence. La nouvelle Aki n'effacera pas l'ancienne, mais elle libérera Saku d'un poids, la fiole qui contient les cendres de l'ancienne et qui ne demande à voler en éclat dont les poussières s'envoleront pour la postérité.


Il y a aussi une grande dimension poétique dans ce drama avec des dialogues extrêmement poignant et tellement justes. La réalisation n'est pas en reste avec des paysages époustouflants, imposant une certaine quiétude, ce qui contraste avec le drame qui s'y déroule. Sans parler des deux acteurs principaux, Takayuki Yamada et Haruka Ayase, qui sont excellent et le jury du Television Drama Academy Awards ne s'y est pas trompé. On peut aussi y voir apparaître le mythique Tatsuya Nakadai (Hara-Kiri, La Condition de l'Homme, Kagemusha et Ran), et c'est plaisant à voir.


J'ai vu beaucoup de drama, mais là, mes hormones de mâle ont du s'accrocher pour ne pas éclater en sanglot. Il met à des années lumière un "Ichi rittoru namida" par exemple. Sekai no Chuushin de, Ai wo Sakebu est un jdrama incontournable et contentera les romantiques exacerbés, mais aussi ceux qui ont une vision plus poétique de l'amour. Un chef d'oeuvre qui embellit la notion d'amour.

HideliriumRB
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le 10 janv. 2015

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