Il s'agit ici d'un travail érigé dans le cadre du cours Histoire de la Critique, le deuxième exercice d'un dossier pour Mr. David, dont les consignes était d'expliquer en quoi l'émission Blow Up prolongé le travail de la critique de cinéma.

Blow Up est une émission créée par Luc Lagier, débuté sur le site internet de la chaîne franco-allemande Arte, en novembre 2010. L’émission tire son nom du film de l’italien Michelangelo Antonioni. Avec aujourd’hui plus de 430 épisode, l’émission a su se développer sur internet comme une nouvelle forme de critique cinéphile. C’est par l’usage d’extrait, accompagné ou non d’une voix over, remonté ou non avec d’autres images, d’autres musiques, que l’équipe de Lagier vient trouver une nouvelle forme de critique, propre au XXIe siècle et à l’utilisation prépondérante d’internet.
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En cherchant sur le site d’Arte, l’émission de Luc Lagier est présentée comme étant une revue internet. Il s’agit donc d’une revue vidéo, dont le format tend à s’inscrire dans une certaine mouvance technologique, que l’on trouve notamment sur Youtube. En se plaçant sur internet à l’époque de sa démocratisation, l’idée était d’échapper à une forme de censure en créant des revues à partir des extraits même de films. La plupart des vidéos adoptent un ton calme, avec des durées interchangeable, variant de 5 à 20 minutes. La dynamique de l’émission ne semble pas être en accord avec celle de la télévision. Avec internet, on trouve une forme de liberté créatrice qui sut toucher Luc Lagier. L’idée était de créer une nouvelle approche de la critique de cinéma, de lui trouver une nouvelle forme, comme à ses débuts. L’outils vidéo couplé à celui d’internet semblait la meilleur idée pour pouvoir toucher un plus large public. Certes, un public qui serait amené à chercher l’émission, mais un public qui, une fois touché, serait y revenir. Au fil du temps, Luc Lagier annonçait vouloir réaliser une critique sans parole, seulement avec des images.
Il s’agit d’une critique très subjectif de l’histoire du cinéma, se basant souvent sur point de vue de Luc Lagier, qui installa directement son personnage avec plusieurs gimmicks et type de phrase marquante. Selon l’émission, on peut écouter d’autres intervenant, tous possédant, à mon humble avis, une aura bien moins travaillé et marquante que celle du créateur de l’émission. Chaque épisode est souvent relié à une sortie, un anniversaire, un décès ou la diffusion même d’un film sur la chaîne principal, accordant ainsi l’épisode à une forme d’actualité, sans jamais pour autant en dépendre, ne réalisant pas la critique d’un film tout juste sortie.
Sur le site de Arte, l’émission possède sa propre rubrique, et chaque épisode est rangé dans diverses catégories. On trouve en premier lieu le Top 5. Souvent présent en fin d’épisode, où sur d’autres modèles, présentant les « 10 petites madeleine » de Luc Lagier, le top est un genre très présent sur internet. Un top étant subjectif, le spectateur se trouve facilement à regarder un top sur une personnalité ou un genre de son choix, et la surprise de trouver tel ou tel séquence à tel place permet de captiver l’audience. Largement utilisé sur internet, il est intéressant de trouver Lagier et son équipe se réappropriant l’idée.
L’émission suivante se prénomme C’est quoi ?, une série venant résumer la vie d’une célébrité. Dans les derniers épisodes, on trouve notamment Audrey Hepburn, Gene Hackman, et même l’émission Blow Up pour ses dix ans. Se concentrant sur quelques instants de la vie de ces personnes, l’émission utilise de nombreux extraits de films, se concentrant parfois sur des détails afin d’illustrer une idée. Les extraits sont soit envoyé à la suite sous forme de liste, soit on laisse un extrait plus important respirer, créant une forme de contemplation, un arrêt dans la dynamique, qu’il serait sans doute plus difficile à accepter à la télévision. Le présentateur liste souvent, que ce soient des détails comme des objets, présentant ainsi un lieu dans différents film, ou différents livre bien précis dans les mains d’un personnage bien précis. Comme Serge Daney pouvait le faire en critiquant Uranus de Claude Berri, Luc Lagier part des détails pour exprimer une idée sur un film. La véritable différence est que l’émission se trouve rarement à critiquer, dans le pire des cas, elle se moque gentiment d’une œuvre.
Dans les autres catégories, on trouve une spécialisé sur les B.O. de films, parfois raconté par d’autres présentateur, comme Thierry Jousse pour Howard Shore. L’idée est pour l’invité de raconter sa rencontre avec la personne cité. Il est intéressant pour le spectateur de découvrir une autre approche que la sienne, une autre rencontre avec l’œuvre de quelqu’un. Mais contrairement à Luc Lagier, le spectateur occasionnel est moins habitué aux autres voix. Car l’émission étant sur internet, elle reste souvent visionnée à la carte, à savoir que le spectateur peut chercher le sujet qui l’intéresse (d’où l’intérêt d’internet). Dans les émissions aux voix diverses, on trouve aussi les Génériques de films compté par Alexandre Vuillaume-Tylski, les Carte blanche donné à des réalisateur, parlant de personnalités qu’ils apprécient. Ces émissions prennent souvent un caractère plus libre au niveau du montage, les paroles se rapprochant plus d’une forme de poésie que de celle d’une critique. On profite de ce mixe de plusieurs films pour créer des recuts sous fond de musique nouvelle pour ces images. C’est dans ce genre d’instant que l’émission se rapproche le plus du rêve de Lagier, à savoir la critique sans parole. On trouve aujourd’hui sur internet beaucoup de vidéos qui cherchent à créer de nouveau montage de film, des critiques visuels, sans parole, notamment sur la chaîne The Beauty of.
Une des gimmicks de l’émission reste celui du chronomètre. On pense notamment à la Bio Express, résumant la vie d’une personnalité en quelques minutes. C’est souvent dans ces émissions que Luc Lagier se met à lister différents sujets afin de les montrer dans le panorama cinématographique de la personne mis à l’honneur. L’émission dépasse souvent le chronomètre afin de présenter en dernier instant un scène estimé capitale de l’œuvre de ladite personne. Le concept est retrouvé dans le zapping, émission cherchant à résumé un film. Certains épisodes sont d’ailleurs inspirés de la série Bref de Kyan Khojandi, série télévisé qui trouve ses racines sur internet, souvent reprise tant elle est codifiée. Luc Lagier s’inspire des formats de son temps, et se format plus rapide, attire beaucoup d’auditeur, tant l’idée de parcourir rapidement une filmographie peut être alléchant, à une époque où nous semblons toujours pressés. De plus, Lagier se permet ici aussi de remonter certaines séquences pour se faire rencontrer (par exemple) la fin du film Blow Up avec la music Exit Music (for a film) de Radiohead. Les références sont nombreuses et variées, pour toucher la sensibilité d’une majorité, et ouvrir un champ culturel bien plus large, donc une audience plus importante.
Dans les dernières catégories, on trouve Face à l’histoire et Les introuvables (ou presque) qui sont toute deux écrite par d’autres membres de l’équipe, comme Frédéric Bas et Trufo. Alors que l’émission historique affiche un ton plus sérieux qu’à l’habitude, celle des introuvables vient au contraire jouer avec la part plus humoristique de Blow Up. On trouve d’ailleurs dans certains types de blague, notamment avec la répétition de certains termes, et le rythme imposé, de nombreuses similitudes avec d’autres confrères d’internet, notamment en la personne de Karim Debbache, vidéaste porté sur une critique de cinéma bien particulière, qui a inspiré de nombreuses personnes sur Youtube.
Une dernière émission, forte intéressante pour Lagier, reste Recut, l’émission sans parole, uniquement visuel, qui remonte différents films ensemble sur un thème donné. Au final, l’émission garde l’inspiration de toutes ses catégories dans chacun de ses épisodes. On y retrouve du recut et du top dans quasiment chaque épisode, et le ton de Luc Lagier, bien qu’absent dans certaines vidéos, reste omniprésent, tant il a inspiré l’idée de la critique vidéo sur internet.

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Grâce à cette nouvelle forme de critique vidéo, on entend bien plus aujourd’hui parler de la critique de cinéma. Internet permet une ouverture à une plus vaste quantité de connaissance, mais pour s’y faire une place, il faut captiver. En créant un personnage marquant, cherchant une forme d’humour, de rythme, en intriguant le spectateur, la critique vidéo marque, devient beaucoup plus ouverte et moins snob, comme l’avait développé André Bazin. La critique cherche à survivre en rassemblant un plus vaste audimat, qu’il soit cinéphile approuvé ou simple internaute avide de divertissement.

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le 28 janv. 2023

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