Écrit sur des vagues

Septembre 1992, après trois EPs en deux ans, Slowdive, jeune formation britannique déjà associée par les médias à la scène émergente du "shoegazing", sort son premier album élégamment nommé "Just for a Day". Dans le nom du disque réside déjà la qualité majeure de ce groupe, qui sait produire des mélodies et des morceaux d'une beauté fulgurante et fugace, qui nous glissent entre les doigts mais nous hantent longtemps.

Et ce n'est pas pour rien que ce premier album (somptueux, faut-il le préciser ?) s'ouvre sur la meilleure chanson de Slowdive. Cet air qui n'a d'espagnol que son nom résonne sur un rythme ternaire de valse infiniment mélancolique et s'étire en tournoyant, nous renvoyant à une version animée de l'obsédante pochette de l'album, sur un tempo très lent. Les claviers lancinants imitent une section de cordes gémissante et la batterie résonnante rappelle le son d'une timbale, le tout conférant au morceau une étrange atmosphère des temps anciens, comme une ritournelle médiévale dont on ne percevrait plus que l'écho déformé et la tristesse infini.

Cette mélodie qui nous enlace et nous terrasse gagne en intensité à mesure que la répétition du motif se fait hypnotique, inlassable, comme si nous n'attrapions au vol qu'un segment qui se réitère depuis la nuit des temps et se poursuivra bien après notre disparition. Et les voix qui s'élèvent, plaintives et en chœur, possèdent une grâce et une harmonie rare qui accompagnent un texte à la qualité poétique éthérée, comme la musique impalpable du groupe.

I long for the sun
The midland air
For all that I have
Is written in waves