Se déroulant en 2075, décrivant une lune devenue une sorte de terre de pénitence et d'exil, l'intrigue a un peu vieilli. Mais fort heureusement, elle n'est qu'un prétexte à exposer un récit de révolution bien tourné. Robert Heinlein y mêle dystopie et idéalisme. Mais un idéalisme teinté de cynisme, qui s'arrange volontiers avec la morale et avec la vérité pour atteindre ses objectifs. Heinlein s'autoreprésente même sous les traits de Prof', vieillard libertarien exilé pour ses activités subversives.
Outre ses aspects politiques, l'intrigue s'avère assez visionnaire avec un ordinateur, qui devient l'un des personnages principaux, et qui a vocation non seulement à contrôler le fonctionnement de Luna, mais à centraliser des données sur ses citoyens.
Les ambitions de Heinlein en tant qu'auteur de SF se heurtent régulièrement à ses vues conservatrices. Ainsi, il dépeint une Lune où les femmes, parce qu'elles sont minoritaires, seraient particulièrement respectées. Toutefois, le comble du raffinement semble être de les regarder de haut en bas avec un sifflement admiratif, ou encore de constituer des brigades féminines dont l'unique objet est d'assouvir les besoins sexuels des révolutionnaires mâles. Des moments de drôlerie involontaire qui n'empêchent fort heureusement pas d'apprécier le roman.
Touchant dans son idéalisme désabusé, Révolte sur la Lune donne envie de se plonger plus avant dans l’œuvre de l'auteur de SF qui apparaît le plus comme l'oncle génial mais un peu réac qu'on aime bien quand même.