À la fois roman historique et essai, Quattrocento se révèle un livre passionnant mais assez ardu... C'est l'aube du XVè siècle, le début de la Renaissance initiée par l'émergence de l'humanisme.
Poggio Bracciolini, dit le Pogge, fut un bibliophile latiniste passionné mais aussi le secrétaire du pape Jean XXIII qui disparut des tablettes pour cause de destitution et d'emprisonnement. Il vécu au cœur de la chrétienté et de toutes les intrigues de la cour papale, et fit partie de ces fins lettrés obsédés par la recherche des manuscrits disparus de l'antiquité. Et en 1417, dans un monastère allemand reculé, il fit une découverte qui bouleversa l'histoire en mettant au jour une copie du « De rerum Natura » de Lucrèce, un immense poète et philosophe romain.
Ce très long et magnifique poème propage et développe la pensée d'Épicure concernant notamment la matérialité de la nature autour de la théorie des atomes (toutes les choses et les animaux sont des constructions de particules de bases appelées atomes, qui s'assemblent et se défont au fil du temps), l'inutilité des dieux et la légitimité de la recherche du plaisir pour soi (faire plaisir aux dieux n'a pas de sens puisqu'ils n'en ont pas besoin...).
Ce livre ressurgissant des temps anciens (écrit environ 50 ans avant Jésus Christ) remet en cause 14 siècles de philosophie chrétienne fondée sur le divin et vouant la vie terrestre au seul salut de l'âme et qui, au passage, avait balayé et fait quasiment disparaître toutes les traces des philosophes antiques, jugées contraires au dogme chrétien.
L'auteur nous montre combien la remise en circulation de ce fascinant poème influença la pensée occidentale en remettant au centre de la pensée l'homme en tant qu'arbitre. En effet, les humanistes et après eux les encyclopédistes, la plupart des philosophes et de nombreux scientifiques ont lu et se sont inspirés de « De rerum Natura ». On en trouve même des preuves dans la constitution américaine, sous l'influence de Thomas Jefferson.
Bref un livre qui éclaire l'évolution de la pensée humaine et donne aussi à réfléchir sur notre époque où la poussée des intégrismes pourrait conduire à un nouveau « Moyen âge »...