Puisque rien ne dure ne livre rien de son contenu en surface. Du moins, s'il le fait, il le fait mal : un titre consensuel, une feuille de tilleul qui évoque la « gentille » forme d'un cœur, une quatrième pour le moins tronquée qui laisse n'importe quel acheteur envisager une bleuette souffreteuse et vibrante, ainsi qu'une étiquette racoleuse « sélection du prix des lecteurs » qui pue le marketing à plein nez.1

La première partie du livre m'a laissée un peu perplexe. J'ai tâté le terrain avec circonspection, ne sachant pas quel genre de roman à l'eau de rose j'entreprenais d'ingurgiter... Très peu éclairante sur le véritable sujet de l'histoire, cette partie s'accompagne d'un procédé franchement casse-pipe : c'est Vincent qui s'y exprime ; c'est donc une femme (l'auteure) qui se met dans la peau d'un homme (le narrateur). Un peu comme dans Bonheur fantôme, j'ai été parfois gênée par cette sensibilité très féminine qui émanait de la bouche d'un homme : ça manquait de crédibilité, paraissait vaguement surnaturel...

Quand est arrivée la seconde partie, en revanche, celle écrite de la main de Geneviève, non seulement les choses se sont dessinées mais ont aussi pris du relief. La douleur de celle-ci m'a contaminée avec une exemplaire constance : versant des larmes à gros bouillons sans interruption de la page 60 à la page 1202, j'ai eu l'immense plaisir de constater que ce livre ne me laissait en aucun cas indifférente...

S'étalant largement sur le vide et le rien – mes sujets de prédilection quand j'ai le cafard -, ce roman m'a beaucoup touchée. La manière dont Laurence Tardieu exprime l'attente, le poids de l'absence, la solitude et son silence fait de cris m'est apparue comme profonde et belle.

Même si la dernière partie de ce livre m'a semblé un peu plus surjouée que le reste, j'ai, comme l'a très judicieusement décrit In Cold Blog (http://www.incoldblog.fr/), été charmée par ce « court roman dont le nombre de pages est inversement proportionnel à la charge émotionnelle ».

En dépit de ses arguments extérieurs fâcheusement mercantiles, ce récit intimiste mérite qu'on s'y attarde. Si comme moi, vous avez été las de compter les dernières lectures qui vous ont laissé passablement insensible, alors Puisque rien ne dure est pour vous. Je vous garantis des dodécanoeuds à la gorge, ça fait un bien fou !
Reka
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le 4 févr. 2012

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Reka

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