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Classique et obsédant, la terreur attirante de «Notre Château».

«Je m’appelle Octave. Ma sœur s’appelle Vera. Nous vivons ensemble, dans la même maison, que nous appelons : Notre Château. Nous ne fréquentons personne, nous ne parlons à personne et vivons tous les deux, rien que tous les deux, dans Notre Château.»


Depuis le décès accidentel de leurs parents vingt ans auparavant, qui avaient hérité de cette demeure avec l’interdiction étrange de la vendre, de la louer ou même de l’habiter, Vera et Octave vivent reclus, dans cette maison sans photos ni miroirs, où le temps semble s’écouler autrement, une maison si grande et si belle qu’ils l’appellent «Notre Château».


Seul Octave en sort chaque jeudi pour aller en ville acheter des livres, puisqu’ils consacrent tous les deux leur vie à la lecture, dans cette pièce du Château considérée avec autant d’amour et de solennité que la maison entière, leur Bibliothèque, ouverture sur le monde de ces deux solitaires.


Octave et Vera n’annotent pas leurs livres, ne cornent pas les pages, mais ils recopient leurs passages préférés dans des fiches, qui forment le grand roman de leurs lectures, reflet de la forme du précédent livre d’Emmanuel Régniez, «L’ABC du gothique», paru en 2013 au Quartanier.


«Notre Bibliothèque est notre bien le plus important.»


Octave raconte le déraillement de leur routine étrange, quand la réalité se fissure soudain, que doutes et menaces s’accumulent entre eux, à partir de ce 31 mars à 14h32, lorsqu’il aperçoit sa sœur, qui pourtant ne quitte jamais le Château, circulant en ville dans le bus n°39. L’instant fatal où ce domaine hors du temps se raccroche au réel, à cet événement d’une inquiétante précision. Une succession de faits inexplicables, failles minuscules et «fantômes» qui ressurgissent, installent une inquiétude fondamentale qui perturbe l’union du frère et de la sœur, dans leur bulle hors du temps.


«C’est à 11h03, le samedi 2 avril, que l’on a sonné à la porte de Notre Château.
C’était extraordinaire. Cela n’arrive jamais. On ne sonne pas chez nous. On ne sonne jamais à la porte de Notre Château.»


Emmanuel Régniez installe, en seulement quelques phrases finement calibrées, une ambiance hypnotique et inquiétante, et manie avec maîtrise son récit, entre fantastique et dérive vers la folie d’un narrateur peu fiable, marqué par les contes cruels, les fantasmes et les peurs d’enfances, dans ce «Château» habité des échos des maîtres fondateurs et d’une grande et belle bibliothèque du fantastique, dans laquelle Henry James ou Edgar Allan Poe côtoient certaines des «Chambres inquiètes» de Lisa Tuttle, un roman traversé aussi de souvenirs cinématographiques, et où la terreur progresse, d’une manière étrangement détachée, vers une conclusion inexorable.


Je fais encore des cauchemars, et j’en ferai encore.


Retrouvez cette note de lecture sur mon blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/11/07/note-de-lecture-notre-chateau-emmanuel-regniez/


Dès sa parution le 21 janvier prochain aux éditions Le Tripode, vous pourrez acheter ce roman chez Charybde, ici :
http://www.charybde.fr/

MarianneL
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le 7 nov. 2015

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