C'est toujours les bonnes choses que j'ai le plus de mal à critiquer. Quand les défauts sont criants, ce n'est guère difficile de les pointer du doigt d'un ton ironique, mais transmettre une opinion positive est une tâche plus délicate. Prenez ce livre-ci, par exemple, le deuxième Défis Fantastiques écrit par Steve Jackson l'Américain. Son coup d'essai, le Marais aux Scorpions, ne manquait pas de qualités, mais les problèmes du livre étaient trop importants pour qu'elles puissent les contrebalancer. Jackson a visiblement appris de ses erreurs, parce qu'on est ici devant quelque chose de bien meilleure qualité.


Notre héros débute l'aventure dans une situation fort peu enviable : son navire vient d'être arraisonné par les pirates du capitaine Carnage, qui n'ont rien envie de plus que lui offrir une baignade au fond de l'océan. Manque de chance pour eux, il atterrit par miracle au centre d'un pentacle magique qui lui confère la capacité de respirer sous l'eau pendant une journée ! Il va désormais s'agir de se venger de ces ruffians, et si possible d'en tirer un petit bénéfice au passage…


D'accord, le coup du pentacle, c'est une facilité scénaristique assez grossière, mais elle n'est là que pour mettre en branle cette aventure sous-marine qui s'avère très agréable à lire. Les décors sont principalement constitués par les divers bâtiments d'une cité sous-marine engloutie, avec sa cathédrale, ses arènes, ses jardins publics, et ainsi de suite. Ce cadre plaisamment original est peuplé de personnages tout à fait charmants, qu'il s'agisse de Cyrano le poisson-épée qui vous donnera une petite leçon d'escrime, Greylock le sorcier et son courrier égaré, les jolies Sirènes, le serviable Génie, ou encore le Dragon des Mers, un personnage ambigu comme la série n'en a pas beaucoup proposés jusqu'à présent. De l'autre côté de votre épée, vous trouverez évidemment pas mal de poiscaille, Murènes, Vipères des Mers et autres Crabes Géants, mais aussi, bien entendu, les pirates du début. C'est un peu dommage qu'ils ne reviennent qu'à la toute fin, sans être vraiment développés ; le capitaine Carnage lui-même n'a rien de franchement mémorable.


Côté jouabilité, la cité engloutie d'Atlantis n'a rien à voir avec le Port du Sable Noir : naviguer (pardon) d'un lieu à un autre se fait de manière beaucoup plus fluide (encore pardon) et naturelle. La linéarité réduite donne de l'intérêt aux relectures successives, de même que la multiplicité des fins : le héros peut s'en tirer de plusieurs façons et connaître plusieurs degrés de réussite, ce qui est toujours appréciable. Les combats difficiles sont rares et évitables, mais le livre propose de toute façon de nombreuses opportunités d'améliorer vos scores de départ, chose trop rare dans la série.


Citer l'Octopus's Garden de Ringo dans le titre de cette critique n'était pas seulement un clin d'œil facile : c'est aussi un bon résumé de mon avis sur le livre. Il est simple et bien ficelé, rafraîchissant et amusant, ne pèche ni par ambition ni par dilettantisme, et s'avère au final l'un des meilleurs livres de la série tout comme la chanson est l'une des meilleures des Beatles.

Créée

le 13 juil. 2015

Critique lue 975 fois

3 j'aime

5 commentaires

Tídwald

Écrit par

Critique lue 975 fois

3
5

Du même critique

The Endless River
Tídwald
5

It's all over now, baby blue

Je n'avais aucune attente pour ce quinzième et (jusqu'à nouvel ordre) dernier album studio de Pink Floyd, ce qui m'aide sans doute à ne pas être particulièrement déçu. En revanche, je sors de son...

le 8 nov. 2014

29 j'aime

4

Five Leaves Left
Tídwald
9

Critique de Five Leaves Left par Tídwald

Mon préféré des trois. Vu que l'écriture de Nick Drake n'a quasiment pas évolué pendant sa courte carrière, cette préférence est uniquement due à ce qui se passe derrière lui : ce petit vernis...

le 15 janv. 2012

28 j'aime

1

Trout Mask Replica
Tídwald
1

Strictly personal

De mon point de vue, enregistrer un album aussi inécoutable, quand on pourrait enregistrer un album parfaitement écoutable (Beefheart et son groupe ont du talent, c'est indéniable, il suffit...

le 9 sept. 2012

26 j'aime

19