On rencontre le portrait de Dorian Gray avant le modèle. Presque logique puisque, si l'on se fie au titre, c'est bien lui, le sujet de l'histoire. L'on assiste au récit de sa naissance sous le pinceau de Basil Hallward, qui craint d'avoir mis trop de lui même dans cette œuvre. Dès le début, le portrait est présenté comme particulier. Tableau trop personnel, montrant trop l'admiration de Basil pour le modèle, il craint qu'on ne lise trop facilement ses pensées, ses intentions rien qu'en observant le portrait. L'aura de Dorian Gray, la fascination qu'il exerce – d'abord malgré lui – sur les êtres nous est donc montrée à travers ce qu'en dit le peintre.

Lord Henry Wotton, présent chez Basil quand Dorian lui rend visite, souhaite à tout prix rencontrer ce jeune homme pour comprendre la fascination. Il découvre un personnage assez naïf, superficiel, ne réalisant pas l'attraction qu'il peut exercer sur les gens. Il profite d'un Dorian facilement influençable pour mener une sorte d'expérience et le renforcer dans son narcissisme, ce qui pousse le jeune homme à faire le souhait que son portrait prenne les marque du temps et des vices à sa place, afin qu'il reste toujours jeune et beau.

L'écriture est soignée, riche et agréable à lire même si certaines tournures de phrases un peu désuètes et un vocabulaire soutenu m'ont parfois compliqué la tâche - lu en anglais. Le récit, s'il apporte quelques surprises, nous emmène de manière méthodique à une fin que l'on n'imagine pas autre. L'évolution du personnage ne pouvait le mener qu'à cela. Le changement, bien que progressif, est assez caricatural. Est-ce la mauvaise influence de Lord Henry ou n'a-t-il fait que donner le coup de pouce nécessaire pour révéler une telle personnalité ? Ou le changement est-il dû au portrait, au fait de savoir que les actions n'auront pas de conséquences ?

Wilde part du principe que les mauvaises actions se voient sur le visage de celui qui les a commises. Ainsi, symboliquement, Dorian est libre de faire ce qu'il veut sans même avoir à réfléchir à un quelconque prix à payer. Il nous livre une vision pessimiste de la nature humaine qui s'affranchit de toute morale, semblant n'être restée dans le droit chemin jusqu'alors que par peur des représailles.
Nomenale
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le 8 mars 2015

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Nomenale

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