Sur fond d’une uchronie plutôt bien vue, un roman noir qui en fait sciemment des caisses, avec son flic alcoolique et sarcastique, sa galerie de « gueules », son ambiance poisseuse...
J’en attendais beaucoup après l’excellent « Kavalier et Klay », et il faut reconnaître que l’on y retrouve les mêmes points forts. Chabon sait très bien rendre un personnage mémorable en une simple anecdote, en en disant ni trop ni trop peu. Les métaphores sont souvent drôles, toujours décalées, la prose fluide et musicale. Ses décors semblent tellement pensés pour le cinéma qu’on a même l’impression de voir le filtre sur la caméra.
Et c’est finalement là aussi que le livre pèche. Il peut sembler simplement sur-écrit de prime abord. Je pense qu’en fait l’auteur s’évertue avec un peu trop d’insistance à évoquer en détail les images qu’il a en tête. Chaque lieu, chaque personnage a droit à son traitement cinématographique, à coup de gros plans sur les détails, au détriment de l’économie de moyens. L’intrigue a de fait du mal à décoller, et on se surprend assez vite à vouloir un peu moins de pittoresque par page. La teinte de décrépitude (qui n’épargne que de très rares personnages) uniforme, qui ferait sûrement un excellent choix esthétique à l’écran, devient rapidement redondante à l’écrit au risque de désamorcer la dimension « parodie de genre ».
Ceci étant dit, cela reste une lecture pas désagréable du tout, et avec même pas mal de moments de vrai talent.
Edit: Je viens de lire que les frères Coen avaient acquis les droits, je ne pouvais pas être moins surpris.