(Attention, critique plus sympa sur mon site : j'ai mis des images)

Deuxième volume des aventures des comédiens humains lu par mes soins en l’an de grâce 2013, Le Bal de Sceaux pour son héroïne part à l’opposé du personnage du volume précédent.

Si Augustine Guillaume était simple et un peu naïve, Emilie de Fontaine est une jeune orgueilleuse imbue de sa personne et persuadée de sa grande valeur. Elles gardent en commun d’être très belles, pour les héroïnes féminines, c’est un pré-requis quasi obligatoire.

Est d’abord dépeint le retour à la fortune du Comte de Fontaine sous la Restauration grâce à Louis XVIII (un peu d’histoire, mais pas trop, et plutôt vaguement), alors qu’il a tout ou beaucoup perdu en investissant pour le retour du Roi, au mauvais moment. Il assure ensuite l’avenir de ses enfants, en en mariant cinq avec des roturiers aisés (beau pécule, belle dot).

Reste la petite dernière, la petite Emilie, que tout le monde aime et que tout le monde a gâtée. Oui, gâtée oui, c’est exactement le mot, ce gâtage qu’on retrouve chez Nana d’Emile Zola (prochainement ici, quand je l’aurai lu, bien sûr).

Tyranniser les aimants et choyer les indifférents, true story

Tout le monde étant bien casé, il ne reste plus qu’elle et elle décide de décider toute seule de qui accompagnera sa vie. En ces temps de charme de la chair abondante, elle y préfère la sveltesse. Et, écrasant tout le monde de sa supériorité, elle veut de l’esprit. Et de la noblesse. Et a minima le fils d’un pair de France.

Mais ah mais qu’est-ce que c’est qu’un pair de France ??? Wikipédia est mon ami, donc si je l’ai bien écouté, en gros, les pairs forment une chambre qui constitue un morceau du Parlement, celui représentant la noblesse. Donc si les Pairs représentent la noblesse, ils sont nobles, en mieux, d’où l’intérêt évident d’Emilie.

Son père, malin comme un singe, écume les gentilles familles parisiennes à la recherche du moindre jeune homme mariable, mais Emilie n’en veut jamais, toutes les excuses sont bonnes : il est blond, il est banquier, et elle tient les roturiers en grand mépris.


Du coup, il abandonne la partie, Emilie n’a plus qu’à se débrouiller. Et Emilie part à la campagne (à Sceaux ! Oui, la campagne de 1830.) avec ses belles-soeurs, car une femme ne travaille pas, n’est-ce pas, elle se repose loin de la ville, pendant que l’homme assure la pitance.

Oh que se passe-t-il donc au bal de Sceaux ? Elle rencontre donc enfin celui qui semble la perle rare, un jeune homme svelte, élégant, rafiné, tout pour lui. Mais elle n’ose pas se renseigner et ne sait donc pas qui il est. Ce qui est résolu par son oncle, le vieux Comte de Kergarouët (hey, mais les Bretons, sérieusement, c’est quoi ces mots ?), qui le provoque en duel, puis l’invite à la maison, oui, ça se passe comme ça, à Chevreuse, puisque Maximilien Longueville habite là bas, n’est-ce pas rigolo ?


Un artifice d’optique familier aux femmes, oh, comme c’est vrai et comme ça doit plaire aux féministes.
Bla bla bla, Emilie et Maximilien tombent amoureux, mais se cachent tout. Ils savent qu’ils savent qu’ils savent qu’ils savent qu’ils sont amoureux, mais Emilie ne sait toujours pas s’il est noble, et encore du côté de la pairie, même s’il est parfait sur tout le reste. Pire : imaginez qu’il n’ait pas le sou !

Et c’est le retour à Paris, où elle le croise, et découvre qu’il… travaille ! Quelle horreur ! Et surtout déshonneur ! La teu-hon totale.

Ah et arrive l’explication, donnée par un personnage tiers, un indépendant tant qu’à faire, le frère de Maxou. Le gentil Maxou, parlons-en, s’est sacrifié pour constituer le Majorat pour lui-même, puisque c’est le frère ainé de Maxou, et puis que son père va être pair de France, et que Maxou c’est le plus beau, et qu’il a des affaires qui vont peut-être donner plein de sous…

Mais au fait, c’est quoi un majorat ? Wikipédia, toujours mon ami, nous explique qu’il s’agit pour la noblesse toute neuve de l’Empire de constituer un pécule afin que le titre soit transmissible à la descendance.

Ouais, ben Emilie, elle trouve quand même ça nul :

Ah ! Entendons-nous, madame. On va dans un désert y habiter une tente, on ne va pas s’asseoir dans une boutique.

Je n’ai pas compris, mais ça n’avait pas l’air gentil. Si quelqu’un peut m’expliquer ce que ça veut dire, merci.

Sur ce, Maxou lui dit qu’il doit partir en Italie. Ben Emilie, elle lui dit qu’elle peut pas attendre, qu’elle va pas attendre, et que s’il s’en va, c’est pas la peine de revenir, qu’elle sera mariée donc. Rien que pour l’embêter du coup, il s’en va.

Comment va donc faire Emilie pour satisfaire ses exigences de beau titre, et de beau personnage, et de belle éducation, en un temps record ?

Elle fait comme Christine, elle reste en famille, et se marie avec son cher oncle septuagénaire, Comte de Kergarouët.

Et c’est alors que, appauvri d’un père et d’un frère, Maximilien revient, riche de l’ensemble de la fortune familiale, titulaire de la pairie de son père, et toujours aussi beau et bien éduqué.

Emilie, « la jeune fille dont l’amour s’était évaporé devant un demi-tiers de mousseline », s’en mangerait les phalanges, mais comment faire ?

Tel est pris qui croyait prendre ! Balzac s’est amusé à faire sa propre fable de la Fontaine, s’appuyant sur Le héron et La fille, voilà Emilie de Fontaine bien piégée à se marier avec un vieux croulant.

Ah bon, en tout cas, j’espère que ces histoires de noblesse vont vite finir, car en vrai, on s’en contrefout un peu non ? On veut de la vie des vrais gens, et pas que d’une élite éteinte. Il est marrant de constater que tout cela a pu fasciner les gens de l’époque, peut-être que seuls les nobles prenaient le temps de lire, faut dire, alors que maintenant, franchement, qui lit Point de Vue, à part Stéphane Bern et la mère d’un de mes potes ?

Ta mère lit Point de Vue dans les toilettes.
Phae
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le 10 mars 2013

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Phae

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