La Joie de vivre
7.6
La Joie de vivre

livre de Émile Zola (1883)

Toute la finesse, tout le talent et toute la profondeur de Zola sont réunis dans l'ironie éclatante de ce titre prometteur "La joie de vivre" qui introduit l'un des romans les plus noirs de sa série des Rougon-Macquart.

Que dis-je "ironie" ? Ce cynisme est d'autant plus poignant qu'il succède au flamboyant et coloré "Au bonheur des Dames", le moins noir des vingt volumes de l'histoire sociale de cette famille corrompue par sa nature même.

Souvenez-vous de Pauline, la petite fille grasse et rieuse du "Ventre de Paris", l'enfant unique du couple Quenu, charcutiers aux Halles. Orpheline, confiée aux Chanteau qui vivent en Normandie et qui ont désormais la quasi mainmise sur la fortune colossale dont elle a hérité, Pauline, va devenir, sous la plume du grand Zola, l'incarnation de l'abnégation engendrant la désillusion.

De cette enfant en pleine santé et qui se trouve privée de toute autorité sur sa propre existence, la vie et les choix iniques de ses tuteurs (surtout ceux de l'ambitieuse Mme Chanteau) vont faire une jeune femme fragile en proie à tous les coups du sort.

Les figures de femmes que brosse Zola sont assez terrifiantes et portent au pessimisme comme l'ensemble du récit. Les hommes ne sont pas plus reluisants mais les femmes laissent vraiment transparaître avec exacerbation leur jusqu'au-boutisme, leur volonté de s'élever ou se s'abaisser. Comme toujours dans les romans zoliens, les personnages ne font pas les choses à moitié et Pauline se fera tondre jusqu'à abandonner sa seule "joie de vivre", son amour pour son cousin Lazare qu'elle poussera dans les bras de sa rivale.

"La joie de vivre", c'est aussi le constat que le fort a raison du faible. La manipulatrice tutrice qui avait été désignée pour tenir le rôle de tendre substitut de mère, révélera un monstre d'égoïsme et de protectionnisme pour son fils, au détriment de tout autre être.

Avec tout le lyrisme dont l'auteur est coutumier, le récit se déploie au grand air des falaises normandes mais n'en demeure pas moins aussi oppressant que s'il se déroulait dans les rues grises de Paris.
Gwen21
8
Écrit par

Créée

le 3 janv. 2014

Critique lue 714 fois

3 j'aime

Gwen21

Écrit par

Critique lue 714 fois

3

D'autres avis sur La Joie de vivre

La Joie de vivre
Plume231
8

Une vie pour les autres !!!

Pauline souriait, approuvait de la tête, car le bonheur selon elle, ne dépendant ni des gens ni des choses, mais de la façon raisonnable dont on s’accommodait aux choses et aux gens. Pauline...

le 10 juil. 2017

9 j'aime

14

La Joie de vivre
Nadouch03
9

Critique de La Joie de vivre par Nadouch03

La joie de vivre, c'est celle de Pauline, jeune orpheline placée chez des cousins, qui vont s'employer, l'air de rien, à la plumer... Toute sa fortune va y passer, ou presque, mais pas sa joie de...

le 15 mars 2020

4 j'aime

1

La Joie de vivre
Nelly-H
9

Critique de La Joie de vivre par Nelly-H

Il faut que la petite Pauline Quenu respire la joie de vivre pour supporter l’existence de malheur qu’elle mène auprès de son oncle et de sa tante ! Ceux-ci l’ont recueillie après le décès de ses...

le 29 mai 2013

3 j'aime

Du même critique

La Horde du contrevent
Gwen21
3

Critique de La Horde du contrevent par Gwen21

Comme je déteste interrompre une lecture avant le dénouement, c'est forcément un peu avec la mort dans l'âme que j'abandonne celle de "La Horde du Contrevent" à la page 491 (sur 701). Pourquoi...

le 1 janv. 2014

64 j'aime

24

La Nuit des temps
Gwen21
10

Critique de La Nuit des temps par Gwen21

Je viens d'achever la lecture de ce petit livre qu'on me décrivait comme l'un des dix livres de science-fiction à lire dans sa vie sous peine de mourir idiot. Je viens d'achever la lecture de ce...

le 15 sept. 2013

52 j'aime

10

La Disparition de Stephanie Mailer
Gwen21
1

Critique de La Disparition de Stephanie Mailer par Gwen21

Jusqu'à présent, de Joël Dicker, je ne connaissais rien ou plutôt pas grand chose, c'est-à-dire le nom de son premier roman "La vérité sur l'affaire Harry Quebert". Depuis cette parution...

le 22 mai 2018

31 j'aime

8