La Garçonnière par Gwen21
Première rencontre avec l'auteur et rencontre heureuse. Pas le coup de foudre mais une réelle séduction, incontestablement.
Argentine, 1987 - Epoque post-dictatoriale - Une société fébrile, mal remise de ses souffrances - Un climat délétère où il est difficile de se fier à qui que ce soit, proches ou moins proches, justiciers d'aujourd'hui, bourreaux d'hier. Au coeur de ce contexte, Vittorio et Lisandra, un couple comme tant d'autres, encombré de ses valises de tendres souvenirs, d'illusions amères, de joies fortes et de déceptions qui ne le sont pas moins.
En ouvrant ce roman (que je n'ai pas choisi mais qui m'a été envoyé par l'éditeur), je ne m'attendais à rien de précis. D'Hélène Grémillon, j'ai déjà dit que je n'avais pas lu une ligne, et je nourrissais seulement le vague préjugé que cette jeune auteur n'était qu'une jeune auteur parmi tant d'autres jeunes auteurs à avoir lancé son nouveau roman dans les flots de la rentrée littéraire 2013 comme on jette une bouteille à la mer. Je venais donc à notre rendez-vous sans aucune idée pré-conçue mais la dernière qui me serait venue à l'esprit aurait bel et bien été celle d'un polar, typé social. Or, il s'agit bien ici d'une enquête menée suite à un décès que l'on soupçonne d'être un assassinat. Qui plus est, ce récit semble basé sur une histoire vraie. Cette dernière information un peu racoleuse n'a pas pour autant nui à mon plaisir de lecture.
Les personnages sont peu nombreux. Je n'ai trouvé aucun d'eux particulièrement attachant mais tous sont poignants à leur manière. Ce constat qui porte en lui sa part de paradoxe ne m'a pas empêché d'apprécier la finesse de l'intrigue et c'est avec plaisir que je me suis laissée promener par l'auteur au gré de ses retournements de situation, de son suspense, de ses scènes intimistes ou encore de ces autres, plus crues voire cruelles.
Le roman se lit très vite, la plume est belle, sans lourdeur, sans vulgarité. L'auteur semble écrire comme on marche, déterminée, sans trop se regarder écrire, sans trop s'écouter parler, avec une volonté évidente de maintenir un rythme qui va crescendo pour éclater en sprint dans le dénouement qui laisse sur le flanc.
Un bon point supplémentaire pour l'auteur : le traitement psychologique des personnages. Même si l'auteur place un psychologue, Vittorio, au coeur de sa trame, elle ne se prend pas elle-même pour l'émule de Freud. Elle place avec adresse Vittorio au coeur d'une toile d'araignée savamment tissée et le relie par des fils de soie concentriques à tous les autres protagonistes du récit par une analyse psychologique fine, humble et cependant ciselée. Juste ce qu'il faut à mon goût pour maintenir l'intérêt du lecteur sans tomber dans une introspection dysentérique et/ou un intellectualisme pédant qui ont en général une furieuse tendance à me faire tomber les livres des mains.
Un roman que je recommande pour son contexte inhabituel et son intrigue coup-de-poing.
NB : Seul "avertissement" à donner à ceux qui choisiraient de lire ce roman sur le seul argument que son action se situe en Argentine, il ne s'agit ici que d'une couleur donnée par l'auteur à son récit mais, hormis quelques pages dédiées au régime de la junte, il n'est ici que très peu question de l'Argentine ou de son système politique.
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