Tout s'est passé très vite.

Nous étions là, à discuter, et, comme depuis un moment, je regardais ses étagères de livre du coin de l'oeil. Ah, il a bien fallu que j'en ai le coeur net. J'ai commencé à lui en parler. Alors elle m'a emmenée visiter sa bibliothèque.

Une bibliothèque personnelle, c'est en général constitué de quelques étagères disséminées dans un appartement, et ce que l'on trouve dessus dénote le goût de notre hôte. BD, littérature, best-sellers, Harlequin, voilà à quoi on peut s'en tenir. Quand le bon goût s'y mêle et que l'on voit apparaître plus de littérature qu'on a rêvé un jour d'en avoir lu (si tant est qu'on rêve d'avoir lu de la littérature), c'est une touche d'admiration supplémentaire pour le propriétaire. Lasse, je voyais depuis longtemps ses Eric-Emmanuel Schmitt, mais n'était-ce pas simplement parce qu'elle le jouait au théâtre ? Et puis, est-ce vraiment bon à lire, vais-je me culturer avec cela ? J'en doutais à l'époque, et aujourd'hui, je ne sais pas encore.

Nous en étions à la visite.

Rapidement, je m'extasiais, Oooh, tu as ..., Aaaah, tu as ..., et la pauvre décida de me proposer de me prêter des livres. C'était il y a... pfiou !... et donc à ce jour, je les ai encore. Hey ! Fallait pas déménager aussi loin hein ! Si tu voulais garder tes livres !

On verra pour les autres, mais moi, là, c'est mon chouchou dont je veux vous parler.

Le petit John Irving, bien qu'au départ, j'aurais préféré trouver L'épopée du buveur d'eau, puisqu'on m'en avait parlé il y a longtemps, et que je n'ai toujours pas trouvé le moyen de le lire.

Là, du coup, c'était L'oeuvre de Dieu, la part du diable. Ce titre me fait constamment penser (et/ou je confonds un peu les deux, qui n'ont pourtant rien à voir) à Minuit dans le jardin du bien et du mal. Fais-moi penser à t'en parler un de ces quatre.

L'oeuvre de Dieu, la part du diable est un roman sorti en 1985. Je peux compter donc 26 années où j'aurais pu connaître ce bonheur (techniquement peut-être pas, je ne suis pas siiii vieille) sans jamais en avoir conscience, puis enfin, je l'ai eu entre les mains, je l'ai dévoré, et je l'aime encore.

Ah, il n'y a pas à dire, les années 80 nous ont fourni leur lot de chefs-d'oeuvre.

L'histoire est très bien en soi, mais ce n'est pas le génie de cette oeuvre. Son génie est dans le caractère, la description, la touchance de ses personnages.

Wilbur Larch est le médecin, génie de l'enfantement et de l'avortement (l'oeuvre de Dieu / la part du diable), homme obsédé par son devoir depuis qu'il a vu mourir une jeune patiente pour avoir refusé de lui pratiquer un avortement. Installé dans un orphelinat, il propose aux jeunes filles / femmes qui viennent le voir, l'un ou l'autre, sachant qu'il recueille également cette oeuvre de Dieu dans ses équipes d'enfants à adopter. Dans ses mémoires, il oppose toujours "Ici à Saint Cloud's" (du nom de l'orphelinat) à "Dans d'autres parties du monde". Le génie de John Irving est en lui, dans ce personnage à la fois coupé du monde, détestable et admirable, un vrai caractère de papa, fort et secrètement tendre.



Homer Wells est un orphelin singulièrement détaché du monde. Inadapté. Dans un monde qu'il ne comprend pas, et qui ne le comprend pas. S'il ne s'agissait que de ça, Homer est celui qui répond D'accord quand on lui dit quelque chose auquel il ne sait pas répondre. Comme Garth dans Wayne's World et comme moi depuis que Wayne's World m'est culte.

C'est par la répétition de ces expressions que les personnages deviennent vivants. Comme plus avancé dans le livre quand Homer doit attendre voir (wait and see, singulièrement traduit). Et quand les expressions sont retournées contre leurs auteurs. Ce pauvre Homer qui n'a plus le droit de dire D'accord, et qui ironise sur attendre voir auprès de Candy.

Je ne veux pas parler des autres personnages, tous aussi croustillants pourtant, Wally, Melony, Fuzzy, Mr Rose... Je voudrais parler des descriptions médicales, mais il faut le lire.

L'oeuvre de Dieu, la part du diable tient depuis sa lecture une place de choix sur mon autel des livres culte. S'il ne s'agit pas de culture, il s'agit tout du moins d'amour, purement et simplement. Je sais qu'il faudra que je voie le film, j'ai un peu peur d'y voir Tobey MacGuire, même si Charlize Theron est un excellent choix. Et puis y voir le majordome constant dans le rôle de Larch, non je ne sais pas, j'ai comme une réticence.

Un jour, plus tard. A bientôt, histoire.
Phae
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le 4 juin 2013

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Phae

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