J'ai lu ce roman recommandé par l'une de mes charmantes collègues libraire jeunesse, qui a spécifié que ce livre en a fait une végétarienne. Et puis, "Jefferson" est déjà en bonne voie de devenir un classique en roman policier du lectorat intermédiaire.



Dans un univers où les animaux sont anthropomorphes et vivent loin des humains, Jefferson, un jeune hérisson un brin pantouflard et doux de nature, va se faire coiffer au Defini-Tif. Toutefois, il découvre avec horreur le corps inanimé et percé de ciseau à la poitrine du coiffeur Edgar. Jefferson a le mauvais réflexe de retirer les ciseau au moment où une cliente endormie se réveille et le voit avec l'arme du crime à la mains. Jefferson, qui devient aussitôt le principal suspect, s'enfuit. Avec les témoignages de plus en plus sensationnalistes de ladite cliente, la réputation de Jefferson est d'ores et déjà établie, même s'il ne cadre pas du tout en profil de tueur. Grâce à Gilbert, son ami cochon, Jefferson parvient à se cacher suffisamment longtemps pour réfléchir à un plan. Il faut trouver le coupable pour disculper Jefferson. Cela les mènera à Villebourg, la ville des humains, avec leur couverture: Une bande d'animaux en voyage organisé. Qu'est-ce qui peut expliquer qu'un charmant blaireau coiffeur ait terminé sa vie de manière aussi tragique?



Ce roman a quelque chose d'étonnamment léger, malgré un thème sensible, qui va prendre forme quelque part vers la moitié du roman. S'il s'agit d'un meurtre, il convient cependant d'observer les décors de petite ville, les habitants au train-train tranquille et les nombreuses petites références à leur vie quotidienne. le traitement en général me semble doux. Les personnages ont des "défauts" généralement attendrissants et de bonnes intentions en général. Si ce n'était du sujet principal, à savoir l'enquête autours du meurtre, tout le reste me semble presque bucolique. Ce peut-être déconcertant, cela dit, car cela contraste avec deux passages violents.


Jefferson est un héro peureux, facilement anxieux, le genre de bonhomme tranquille qui ne fera de mal à personne, qui aime la pâtisserie et sa petite routine. On peut difficilement contester son courage, néanmoins, car le vrai courage est de surmonter sa peur, surtout pour quelque chose de plus grand que soit, en plus. Il aura évoluer de toute ces mésaventures et à travers les épreuves, il aura su s'ouvrir davantage aux autres. Faire confiance demande aussi une forme de courage, car il faut être capable de se montrer vulnérable et accepter le concours d'autrui. Ce n'est pas quelque chose de facile, surtout pour les craintifs et les gens gênés comme Jefferson, mais il aura eu le bon sens et le courage de le faire, pour que justice soit faite.



À partir d'ici, il peut y avoir des divulgâches.



Une autre grande qualité sera mise de l'avant, pour tous les personnages animaux: La solidarité. Jefferson aura eu besoin de ses compagnons de voyage pour venir à bout des malfrats qui ont assassiné Monsieur Edgard lâchement. J'ai trouvé touchant qu'il sollicite leur aide, car dangereux était le plan qui les concerne. Pourtant, il semble que la cause en valait la peine. Quand Gilbert découvre que Monsieur Edgar est en réalité un militant contre l'abbatage des animaux, dont le malheureux Gilbert en a aussi vu l'atroce procédure, le fait de trouver les assassins prend une nouvelle dimension. Derrière l'homme tué se trouve une cause. Les voyageurs comprennent cette dimension, il ne s'agit donc pas seulement de venger M. Edgar, mais faire condamner des gens sans scrupule et l'industrie qui les emploi.



J'ai trouvé que cette histoire avait des échos avec certains pan de notre Histoire humaine, comme le travail forcé, l'esclavage ou encore les génocides. Il y a des gens braves qui militent et vont même se mettent en danger pour les Droits humains, tout comme il y en a pour défendre les Droits des animaux. Aussi, dans ce livre, vous remarquerez que la solidarité face à cet enjeu comprend ses militants animaux ET humains. Tenir à une cause n'implique pas seulement notre référentiel propre, comme notre ethnie ou notre genre, mais également nos valeurs. Ici, les humains militants n'étaient peut-être pas ceux à risque de finir en steak haché, mais par conviction, choisissent de défendre une valeur chère à leur yeux.



Je suis tombée sur une autre critique qui m'a rappelé, toutefois, que les récits enthousiasmant ne sont cependant pas toujours dépourvus de défauts. Moi la Lectrice en moi qui a lu les manga Beastars et qui a affectionné Zootopia, j'ai pourtant manqué un peu de flaire sur un élément assez évident: Dans ce roman, nous avons trois groupes: Des humains, des animaux normaux et des animaux anthropomorphes. Comme le faisait remarqué la critique que j'ai lue, comment explique t-on que ce groupe entre-deux ne mangent pas de viandes, si des prédateurs en font parti? Ils semblent manger la même nourriture que nous, en atteste les pâtisseries et les pizzas, dont certains contiennent des sous-produits animaliers, comme le lait. Il existe donc certaines contradictions et j'ai du mal à cerner ce qui distingue les animaux de la ville de Jefferson des animaux du monde humain.



Cela me fait penser que notre perception face à notre alimentation s'en trouve touchée. Difficile de lire des récits comme celui et y rester insensible. J'espère que cela amènera une prise de conscience ou un début de changement face au gaspillage de la viande et de sa surconsommation, ou à tout le moins, sur la façon de traiter les animaux destiné à l'abattage.



J'ai bien aimé cette joyeuse tripotée de personnages un brin loufoque, mais globalement bienveillants. Mention à Gilbert, qui derrière ses idées déraisonnables parfois, se profile un jeune homme audacieux, loyal, courageux et jovial. Un vrai Sam Gamegie.



On a même illustré le roman avec de douces illustrations au crayon plomb, où les personnages sont tout aussi doux.



Un second tome vient de paraitre. J'espère pouvoir le lire un jour - Je manque de temps avec tous mes livres à lire! Les joies d'être libraire jeunesse. ^^



Pour un lectorat intermédiaire du 3e cycle primaire, 10-12 ans.

Shaynning
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le 5 sept. 2023

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Shaynning

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