Hénaurme ! Et je ne parle pas des 644 pages qui se dévorent en un instant… ou presque. Je parle de l’objet littéraire que nous propose Mauvignier. On avait pu apprécier sa maîtrise de la construction dans Continuer. Ici, on peut parler d’un véritable thriller avec une tension qui monte de bout en bout. Mais le plus impressionnant réside dans le traitement du temps et du détail. Au cinéma, on parlerait de ralenti, tout va et vient autour d’une action, de la pensée d’un personnage, d’un geste, d’un détail du décor, le tout accentuant chez le lecteur une tension qui devient presque insoutenable. On est bien souvent au bord de quelque chose, de la réalisation de quelque chose, d’un accomplissement, mais qui sont sans cesse différés car avant d’enchaîner, l’auteur va revenir sur la scène en train de se conclure, épaississant le trait ici, nuançant une teinte là. Alors, on piaffe « Mais tu vas le dire, oui ? » On marche à fond, on est dans l’histoire, on la vit avec les personnages. Et il vaut mieux, parce que quand on traite une scène de trois ou quatre heures sur 400 pages, autant s’y sentir bien… C’est le cas. Magnifique !