De sang-froid est une tragédie classique. Dès le début, nous connaissons déjà le destin des personnages : la mort. Pour les victimes, pour les meurtriers. Nous savons déjà quelle sera la terrible issue du livre. Non, pas du roman - de l'histoire, ou plutôt de l'Histoire. Car De sang-froid n'est pas une fiction.
C'est la réalité violente d'un crime - commis de sang-froid ? - et d'un auteur qui - de sang-froid ? - a voulu comprendre. Comprendre ce qui a pu pousser deux hommes à commettre une telle atrocité. Et les deux n'ont aucun sang-froid. Tout est chaleur et passion dans l'ouvrage, seul le style est de "sang-froid".
Vous lisez un documentaire. Un documentaire vécu par l'auteur, qui a été à la rencontre des protagonistes pour comprendre. Qui s'est attaché à eux ; c'est visible. Notamment à Perry, ce jeune homme - humain mais monstrueux ? plutôt monstrueux mais humain, nous souffle l'auteur, en nous narrant avec détails le passé, les rêves, les espoirs de ce criminel - de cet homme.
Il n'y a pas d'explication logique. Il n'y a que la passion - patio, souffrir, subir. J'ai discuté avec les collègues qui m'avaient recommandé et prêté le livre : est-ce Perry le responsable ? Est-ce Dick ? Chacun de nous avait un avis, pas le même. Ce serait trop simple, or rien dans cette histoire n'est simple, hormis la manière faussement distante dont Truman Capote rapporte les faits.
Truman Capote a su retranscrire avec exactitude la machine infernale qui conduit à puis découle de ce quadruple assassinat. Il a su, malgré son ressenti, malgré son investissement, nous confier les clés de l'affaire sans jugement, et nous laisser maître de ce que nous en pensons, de ce que nous en ressentons.
Et que nous reste-t-il, après la lecture, d'autre que la terreur et la pitié ?