Pour résumer brièvement la partie sur l'esthétique, Kant décrit le jugement de goût sur la beauté, lorsqu'il est libre et désintéressé, comme une intuition faisant appel à l'imagination et à l'entendement, mais non à la raison (car elle fait usage de concept), et portant à la contemplation.
Ce jugement de goût, pour être pur, ne doit tenir aucun compte de l'émotion, du plaisir lié aux perceptions des sens, et de d'adhésion à des concepts préétablis (des concepts peuvent être déduits de l'objet jugé lorsqu'on en fait l'expérience, mais aucun ne doit être déjà présent à l'esprit pour mesurer la beauté de l'objet selon une idée préétablie), qu'ils soient d'ordre moral (le bien) ou intellectuel (le bon et l'utile), car il s'agit de formes d'intéressement dans l'objet que l'on juge et qui lui attribuent une fin. Or la beauté libre doit plaire pour elle-même et non en rapport avec une fin objective ou subjective. Cette définition lui permet de distinguer les arts d'agrément (divertissements) des beaux-arts (arts du génie). Dans ces derniers, il ne manque pas de rappeler la nécessité des règles et des conventions pour canaliser l'imagination de l'artiste et aboutir à un objet porteur de sens. Il est donc à l'opposé des conceptions de ce qu'on nomme "art contemporain", ce qui est déjà une bonne raison de le lire !
Une spécificité de Kant tient aussi en l'universalité du jugement sur la beauté. Chacun lorsqu'il trouve un objet beau s'attend à ce qu'un autre porte le même jugement que lui, contrairement au goût des aliments (un plaisir des sens) dont on convient aisément qu'il ne soit pas partagé. Du fait que l'appréciation de la beauté fait appel à l'entendement, supposément partagé entre tous les hommes, ce jugement, bien que subjectif, devrait pouvoir concorder en chacun. Des hommes ayant atteint un degré de sensibilité similaire à force d'expériences esthétiques devraient aboutir aux même jugements, cette subjectivité étant la même pour tous.
Notons que Kant distingue la beauté naturelle de celle d'une œuvre d'art (il hiérarchise la première au-dessus de la seconde). Dans l'art, le jugement est fondamentalement téléologique ; il tient compte de ce que l’œuvre cherche à être d'après sa causalité interne, sa finalité subjective. Cette idée de finalité subjective est aussi présente dans la beauté naturelle, mais elle renvoie à la perception du supra-sensible (et en bout de course Dieu), en conséquence de quoi la sensibilité à la beauté naturelle prédisposerait à la moralité (je résume grossièrement car j'ai survolé ce passage).

Sivoj
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs livres de philosophie

Créée

le 27 oct. 2020

Critique lue 128 fois

Sivoj

Écrit par

Critique lue 128 fois

D'autres avis sur Critique de la faculté de juger

Critique de la faculté de juger
PapacoolFay
1

Critique de Critique de la faculté de juger par PapacoolFay

Encore une foi je m'aprette à critiquer l'oeuvre de l'un des plus grand escro de la philosophie du XVIII, c'etait minable.... C'est limite comme si j'avais eu envi de me tailler les veines après la...

le 2 mars 2018

2 j'aime

7

Critique de la faculté de juger
Sivoj
9

L'essence de la beauté

Pour résumer brièvement la partie sur l'esthétique, Kant décrit le jugement de goût sur la beauté, lorsqu'il est libre et désintéressé, comme une intuition faisant appel à l'imagination et à...

le 27 oct. 2020

Du même critique

Face à l'info
Sivoj
8

Le grand Z, Kelly, Menant et les gourgandines.

Quel plateau animé par la chaleureuse Christine Kelly ! Auparavant, je ne regardais pas ce genre d'émission de commentaires sur l'actualité, mais la qualité d'analyse d'Éric Zemmour m'a convaincu. Il...

le 16 juin 2020

14 j'aime

3

Discours de la méthode
Sivoj
3

Méthode louable, résultats risibles

Descartes voulait une philosophie nouvelle, plus juste, qui permette de distinguer le vrai du faux, une philosophie dont on puisse être sûr qu'elle soit aussi vrai que les mathématiques. Pour ce...

le 22 févr. 2017

13 j'aime

2

Le Mur invisible
Sivoj
4

Plat, répétitif et sans but

Je n'ai pas eu la patience de terminer ce livre (ce « roman d'atmosphère » comme dit dans la postface) et son histoire de bourgeoise déchue passionnée par les chats. J'ai peu d'intérêt pour les...

le 21 févr. 2017

11 j'aime