Grâce à NetGalley et aux éditions Stock, je découvre, avant sa sortie officielle prévue le 28 mars 2018, le dernier roman de J.M.G. Leclézio.

« Bitna, sous le ciel de Séoul » est le premier livre que je découvre de cet auteur. Assurément, ce ne sera pas le dernier.
Au fil des pages, j’assiste à la rencontre entre Bitna, étudiante coréenne sans le sou, et Salomé, personne jeune encore mais lourdement envahie par une maladie invalidante. Très vite, Bitna change de statut auprès de sa patronne. De jeune étudiante venant quémander de quoi payer son loyer en échange d’un peu de travaux ménagers, elle devient la conteuse dont Salomé réclame la présence, autant que la fin des histoires commencées. Grande expérience pour Bitna que de prendre conscience de son pouvoir, de la dépendance qu’elle suscite chez Salomé, de l’importance de qui détient le pouvoir de donner réponse, d’accorder un avenir, ou non, à la relation. On est proche du droit de ‘vie ou de mort’ sur autrui. Bitna le réalise, s’en effraye et choisit le partage… le temps qu’il faudra !
Bitna ne raconte que des histoires inventées, donc vraies. Elle le sait, le mensonge est vrai quand celui qui le raconte l’affirme. Et même si le conteur annonce mentir, l’histoire reste vraie quand celui qui l’écoute la croit.
De l’envol des pigeons à l’enlèvement du bébé abandonné, de la fuite d’une jeune adolescente quittant les bancs d’église pour un squat de rockeurs, des deux dragons qui ne se sont pas encore réveillés au « stalker », traqueur qui rôde entre deux mondes et, bien sûr, de Bitna à Salomé, l’auteur nous balade. Les mondes se croisent, s’entrechoquent, se répondent, se fondent l’un à l’autre et finissent par dessiner un parcours initiatique qui mènera à la mort, c’est-à-dire à la vie !
L’écriture de J.M.G. Leclézio semble, aux yeux de certains, lisse et consensuelle. C’est oublié la poésie qui peut naître de la simplicité, du dénuement, de la retenue dans la vérité comme dans la fantaisie. On ne sait plus si ce sont les histoires de Bitna qui accompagnent la vie ou si c’est la vie qui dicte ces histoires. En effet, c’est dans la réalité parfois sordide de ses villes, de ses logements, des personnes de la rue rencontrées que Bitna cueille les éléments qui, bout à bout, prendront sens et insuffleront la vie, la mort à l’oiseau au plumage bleu comme à la relation tissée entre la narratrice et Salomé.


Alimenté par son immense culture des civilisations, habité par la nécessité de donner, dans la vie, une place de choix au phrasé, aux histoires et légendes partagées, aux réflexions douces qui peuvent en naître, J.M.G. Leclézio nous invite à regarder et comprendre le monde. Une lecture tendre, poétique, imagée.

Créée

le 13 mars 2018

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