Après l'infâme, voici l'oublié. Après ma lecture de Judas, ma lecture de Barabbas. Après le traitre dont le nom est honni depuis des siècles, place à celui qui perd toute existence et utilité une fois sorti des geôles. C'est la deuxième partie de cet étrange diptyque que forme ces deux personnages bibliques.


Pär Lagerkvist se demande quelle a pu être la vie de cet homme une fois libéré à la place du Sauveur. Barabbas est pris dans une dialectique assez spéciale, à la fois partagé entre la fascination pour celui qui fut crucifié à sa place mais aussi interloqué voir repoussant ce Dieu, prônant l'amour, qui se serai laisser crucifier comme un vulgaire voleur.
Barabbas ne se remettra jamais de cet expérience, de cet évènement, devenant une loque humaine, solitaire, prostré, traumatisé à jamais par ce jour là sur le Golgotha.
Lagerkvist en profite aussi pour revenir sur les débuts difficiles, forts mais parfois sectaires de la chrétienté. Ces hommes et femmes de peu ou de rien risquant leur vie pour des on-dit, pour les récits des quelques témoins. Récit d'une époque et de lieux désolés, ravagés par la misère, par le luxe de Rome. L'apocalypse est à nos côtés tout le long du livre, le soufre et la souffrance emplissent déjà l'atmosphère. Le moment parfait pour un récit existentiel et désespéré n'est-ce-pas ?
Car à travers la "vie" de Barabbas c'est toute une galerie de miséreux qui se dessinent, croyants ou non. Ceux prêt à mourir pour leurs convictions comme ceux qui ne cherchent que l'amour ou la richesse. Barabbas, fascinant, les perturbe et marque leur vie presque autant que le Christ dont il est la contrepartie. Il est celui qui a survécu grâce à lui, le dernier témoin qu'on évite, qu'on insulte, qui jusqu'au bout sera torturé par ses doutes si modernes.


Le Romain aussi eut l'air étonné "Je ne comprends pas, dit-il. Pourquoi portes-tu alors ce "Christos Jesus" gravé sur ta plaque ?
- Parce que je voudrai bien croire", répondit Barabbas.


Les disciples racontaient qu'il était mort pour eux. Possible. Mais qu'il l'eût vraiment fait pour lui, Barabbas, personne ne pouvait le nier ! Lui, Barabbas, était en réalité plus proche de cet homme qui n'importe qui, il faisait corps avec le "Maître" d'une toute autre manière. Bien que repoussé par eux ! Il était l'élu pouvait-on dire - il n'avait pas eu à souffrir; il avait échappé aux tourments ! Il était le véritable élu, celui qui avait été relâché à la place du fils de Dieu - parce que le fils de Dieu le désirait , l'avait ordonné ! Et les autres n'en avaient pas le moindre soupçon.

Samoice
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le 6 déc. 2021

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