Choix par André Velter de 38 poèmes de Guillevic extraits de "Art poétique" (Gallimard, 1989). Ce Breton né à Carnac, aussi dense qu'un menhir, s'y interroge sur lui-même, sur son artisanat d'écriture ainsi que sur le monde, le temps ou l'invisible.

Qui suis-je ? La réponse fuse : d'abord un écrivain :

"Si je n'écris pas ce matin, / Je n'en saurai pas davantage,

Je ne saurai rien / De ce que je peux être."

Le poète cherche l'essentiel, remonte à la racine des choses et de l'être :

"Il te faut de la pauvreté / Dans ton domaine. (...)

Ta chambre intérieure / Est un lieu de pauvreté."

Même s'il oscille entre mobilité et immobilité, cette dernière est son point de départ d'écriture :

"Est-ce que je ne vis pas dans un terrier,

Le plus souvent même au fond du terrier ?" Ou dans un autre poème :

"Préférer / Ce qui ne bouge pas / A ce qui bouge.

Et d'abord, ce qui bouge, / On sait ce qu'il peut faire.

Ce qui ne bouge pas / Va peut-être étonner / S'il se met à bouger."

Certains ont vu en Guillevic un poète des choses. Sa vision est aussi panthéiste, il se sent à l'unisson du monde :

"Il y a de l'utopie / Dans le brin d'herbe

Et sans cela / Il ne pousserait pas. (...)

Toi, sans utopie / Tu n'écrirais pas

Puisqu'en écrivant / Ce que tu cherches

C'est mieux connaître / Où te mène ton utopie."

Toute la Création lui apparaît comme un univers d'écriture :

"L'océan lui aussi / Ecrit et ne cesse d'écrire.

A chaque marée / Il écrit sur le sable.

Il écrit tous les jours, / Toujours la même chose." Ou ailleurs :

"Les menhirs de Carnac / Sont autant de poèmes

Que le ciel et le vent / Cherchent à se dédier."

Sa modestie primordiale est ambitieuse :

"J'écris aussi pour la gloire, / Pas pour celle qu'on donne,

Pour celle que je me donne."

lionelbonhouvrier
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le 29 nov. 2022

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