"Les choses à la mode sont parfois si horribles et rebutantes..."

Extrait de citation qui fait office d'hameçon !


Je transforme ce qui devait être une brève annotation en critique, ou plutôt, il s'agit d'une synthèse du propos de Simmel.
Cet écrit est aussi bref que riche. Simmel met en avant l'aspiration contradictoire des hommes à l'universalisme et au particularisme. Si j'ai bien compris, cette aspiration trouve une médiation au sein de l'imitation. La mode est l'imitation d'un modèle, à la fois "elle guide le particulier dans la voie de tous" et en même temps, "elle donne un élément universel qui fait du comportement de chaque particulier un simple exemple". Simmel procède alors à une analyse de classe sur la mode : elle est l'objet des classes supérieures. Dès que les classes inférieures s'approprient une mode, celle-ci est abandonnée par les classes supérieures. La mode permet de séparer les classes entre elles, c'est pour cela que les classes supérieures veillent à changer de mode dès qu'elle est appropriée par les classes inférieures afin de maintenir une reconnaissance et une cohésion dans le groupe. Simmel remarque une forme d'asservissement chez celui qui suit la mode, mais aussi chez celui qui la refuse en bloc ; dans tous les cas, le vêtement montre son pouvoir, on se construit en fonction de lui en étant en adéquation avec la mode et son caractère changeant ou alors à travers la négation. Il procède également à une analyse du genre concernant la mode. Les femmes sont plus en proie à la mode à cause de leur position sociale plutôt faible. La mode leur permet de compenser cette faiblesse, de s'affirmer tout en la soulageant d'éventuelles responsabilités. Les femmes seraient plus fidèles selon Simmel alors elles trouveraient un équilibre dans la mode qui ne cesse de changer. A contrario, les hommes, plus infidèles s'intéressent moins à la mode. Je n'ai pas d'opinion sur cette analyse de comportements genrés, mais je trouve intéressant comment la mode selon Simmel est une façade extérieure qui peut avoir une fonction presque équilibratrice : à travers la mode, la femme tente de se rapprocher de l'homme en affirmant sa personnalité. Simmel effectue également une analyse économique "plus la mode change vite, moins il faut que les objets soient chers, et moins ils sont chers et plus rapide est le changement auquel poussent les consommateurs en y contraignant les producteurs".
La mode ferme un milieu déterminé, montre l'appartenance à un milieu. L'attrait pour la mode résulte d'une aspiration à imiter la classe supérieure qui porte et décide de la mode. Malgré tout, il est possible d'avoir une approche originale de la mode, en la refusant ou en la poussant à son extrême ; ceci interroge sur les limites de la mode et à quel point on peut la transgresser, la transformer...

Blackfly
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le 8 mars 2021

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