Ce roman est génial.
Il constitue, ce me semble, tout un passage prélevé de Belle du Seigneur parce que l'éditeur le jugeait trop long.
D'ailleurs sorte d'appendice à Belle du Seigneur - rapport à la leçon de séduction de Mangeclous. Redoutable d'ingéniosité. Précieux d'habile expression. À lire de toute urgence. Seulement trois cent pages environ. Donc court.
Cohen y verbalise le génie de la façon la plus grotesque qui soit : le personnage de Mangeclous n'a jamais été aussi attachant, aussi génial, aussi juste et injuste, aussi plaisant à écouter, que lors du passage qui constitue le monumental pilier de ce roman : le cours de séduction dispensé dans sa cuisine après qu'il a fondé l'Université Supérieure et Philosophique de Céphalonie. Sous prétexte de conter l'histoire d'Anna Karénine, Mangeclous interprète en fait, à sa manière, et visages masqués, la passion entre Solal et Ariane qui anime Belle du Seigneur ; et je ne peux m'empêcher de sourire en pensant à la "farce" que joue Cohen, qui s'amuse de ses personnages par la voix de Mangeclous, qui ose tout, qui peut tout, duquel on accepte tout. Bref, le roman offre une perspective supplémentaire d'appréhender Belle du Seigneur, d'après la parole de l'éloquent Pinhas des Solal, dit le Bey des menteurs, dit le capitaine des vents, dit Mangeclous !
À inclure de toute urgence dans les programmes scolaires, en tête de gondole des librairies, dans la salle d'attente de votre médecin, en cadeau-suprise dans les boites de céréales, et caetera, et caetera ! - un peu d'imagination et puis voilà.
Oh que j'aime ce Mangeclous, et Saltiel, et Salomon, et Michaël, et Mathattias, mais quand même un peu plus Mangeclous !
Une descendance infiniment prodigue à qui met dix sur dix à cette oeuvre ; et la peste et le choléra pour qui note autrement ! Et à celui qui oserait mettre un, une longue vie mais aveugle et sourd et lépreux et cul-de-jatte et manchot et le tout dans la plus extrême pauvreté et la puanteur !