La vengeance alliée mise à l'épreuve par la comptabilité Keynésienne

Ce livre, ou plutôt ce compte rendu des perspectives économiques pour l’Europe écrit par l’économiste Keynes, peu ou pas encore connu à l’époque, son Magnus opus sortira en 1936, nous amène en plein traité de Versailles. Le traité de paix qui scellera le destin de l’Europe pour les 20 années à venir et fera de son lit la prochaine guerre.


Durant tout son livre, on peut y voir un homme partagé entre la volonté de faire payer l’ennemi, mais de manière juste et la volonté d’épargner ce qui peut l’être et de ne pas précipiter l’Europe dans une crise économique et monétaire.


Le combat est rude, il nous dépeint un Woodrow Wilson tel un pasteur presbytérien qui finalement ne comprend pas grand-chose de ce qui se trame dans le conseil des Quatre. Conseil dominé par un Lloyd Georges voulant ramener quelque chose d’intéressant à ses électeurs britanniques et un Clemenceau usant et abusant de sa faculté à parler français et anglais en plein conseil.


Le Vendéen né en 1841 a été témoin de la défaite et de l’humiliation de la France en 1871 et il voulait faire payer l’Empire allemand pour ces évènements vieux d’un demi-siècle. Tous les parlementaires des Anglais aux Français voulaient faire payer l’Allemagne voir pendre le Kaiser. Comme si le Kaiser, qui avait été dépassé par une dictature militaire dirigée par Ludendorff et Hindenburg, y pouvait quelque chose.


Le traité de Versailles prévoyait des clauses qui paraîtraient abusives pour qui n'a pas combattu 4 années durant dans la boue, voyant mourir ses camarades. C'est un traité écrit avec une encre vengeresse et dicté par l'émotion. Quelques exemples : le pouvoir d’un pays allié à exproprier n’importe quel allemand ayant un bien sur son territoire ou un ancien territoire allemand perdu à l’issue du traité. De même que les sommes demandées paraissaient extravagantes, les Français et la City demandaient 8 ou 10 milliards de livres quand Keynes estimait que l’Allemagne ne pourrait rembourser que 2 milliards à condition de garder ses industries et ses navires de commerce.


C’est un livre de comptable, il n’a qu’un intérêt pour ceux qui s’intéressent aux chiffres, à la production industrielle des pays avant, pendant et après la guerre. Il fournit des données sur le PIB des pays, sur leurs réserves monétaires, sur la valeur des terres de ces pays, le tonnage des flottes commerciales. Il a l’avantage de fournir une critique économique du traité de Versailles que je résumerais comme-ci :


On ne peut pas et démanteler un pays, exproprier ses habitants, s’arroger toutes les possessions dudit pays à l’extérieur de ses frontières, s’approprier ses colonies et attendre en retour qu’il paye des indemnités colossales sur plus de trente années avec un taux d’intérêt élevé.


C’est le constat auquel Keynes est arrivé, il voulait même établir un forfait, qui ne rentrait pas dans le détail, que les alliés auraient eu à se répartir. Il souhaitait également que les alliés suppriment leurs dettes entre eux et que l’on aide l’Allemagne pour qu’elle redéveloppe son économie et puisse rembourser ses ennemis d’hier. Il avait fait le constat d'une Europe meurtrie qui devait se reconstruire seule, jugeant que les Américains n'auraient peut être pas été enclins à redonner des crédits à des gouvernements les utilisant très mal. Notamment les Français et Italiens qui comptaient sur les indemnités allemandes pour faire tourner le pays, sans avoir à augmenter les impôts.


Il sera intéressant d’établir un parallèle avec l’écrit de Bainville nommé « Les conséquences politiques de la paix » qui j’en suis sûr avait un avis bien différent, étant membre de l’Action Française.

Franc_cot
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le 21 mars 2020

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