Dès 1979, et suite à la mort de Franco et au retour de la démocratie en Espagne, le gouvernement de Valery Giscard d’Estaing retirât le statut de refugié aux militants basques espagnols exilés en France, entraînant les premières expulsions au début des années 1980, tandis que les polices politiques continuaient d’être actives sur le sol espagnol et que les commandos du GAL (Groupe antiterroriste de libération) commettaient des attentats sur le territoire français ; vingt-trois assassinats commis en France leur ont été attribués entre 1983 et 1987.

Après l’élection de François Mitterrand, une vingtaine de militants basques déposèrent des dossiers devant la commission des recours de l’OFPRA (Office français de protection des refugiés et des apatrides).

Fraîchement émoulu de l’ENA, et dans cette ambiance «entre deux mondes» des années 1980, le narrateur siège depuis quelques mois au sein de cette commission, un poste peu envié de ses condisciples mais auquel il s’attache, emporté dès le départ par les enjeux humains, au moment où les dossiers de recours des basques y sont examinés.

«Lire ces rapports était toujours une épreuve. C’est que j’y devinais des vies sans pouvoir vraiment les comprendre, craignant toujours d’imaginer trop ou pas assez, souffrant pour finir de devoir les faire entrer par force dans les catégories du droit. Mais c’était mon métier, et je l’aimais malgré tout.»

Lecture brève et intense, «Le chemin des morts» est le témoignage saisissant d’un narrateur intègre qui, sans se justifier, veut simplement reconnaître une erreur de jugement, et éveiller la conscience du lecteur sur la distinction entre justice et droit.

«Trente ans ont passé [...] Plusieurs personnes que j'aimais sont mortes et leur apparence, malgré tous mes efforts, s'est effacée de ma mémoire. Javier Ibarrategui y est resté, comme pris dans des glaces éternelles. La faute a des pouvoirs que l'amour n'a pas.»
MarianneL
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le 5 janv. 2014

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