Lire Agrati n'est pas de tout repos. Montagnes russes des émotions, alternance d'éclats de rire ou de coups de poing dans le ventre.

Publié en 2006, « Ils m'ont mis une nouvelle bouche » est le troisième recueil de nouvelles de Jean-Marc Agrati, dix-neuf perles, comme une «pêche miraculeuse».

Il y a ce cocktail unique d'humour, de sexe, de gore, de technologie,
qui se déploie sur les rêves éveillés, les aspirations de l'enfance, les fantasmes de vengeance, de justice et d'héroïsme,
souvent enrobé de poncifs, de conversations de comptoir, de barbaque et de bière.
Il y a la critique, parfois sous forme de farce mais parfois seulement noire du monde moderne, de l'héritage du colonialisme, de l'exploitation et de l'exclusion, et ces visions post-apocalyptiques de notre monde,
et chaque récit vous emmène dans un nouveau monde, un nouveau registre,
par l'imagination et la frénésie de la plume poétique et toujours libre de Jean-Marc Agrati.

Quelques moments d'extase : « Les tomates sans sel c'est délicieux », « Quatre saisons pour mamie », « La pêche miraculeuse » (avec Zol !), « Un morceau d'époque », « J'avais le mauvais rôle », « Tous les décors du monde », « Spok au pays des merveilles », « Les limites du courage a l'âge de douze ans » ou bien encore « Peter Pan ».

« Alors, allongé sur ma table de veille, j'oubliais la crypte morbide et je partais fouiller tous les coins du monde et du non-monde. Je pouvais être au Far-West, en cavale entre deux banques, ou dans la Chine ancienne en train de calligraphier un poème. Quand des bandits m'encerclaient, je posais l'écritoire et je dégainais mon sabre. Ca saignait, j'étais rapide et je faisais plein de pirouettes. J'étais l'aventure, l'art et la justice réunis. Sur tous les continents et à toutes les époques, des pouvoirs iniques ont trouvé en moi un maquisard obscur, rompu à toutes les techniques de survie, et absolument insaisissable. Je partais dans les déserts, j'organisais la résistance et je triomphais dans un final explosif. » (Tous les décors du monde)

« Elle s'est posée au bord de la grosse flaque et elle a fumé une clope à la lune. Elle était calme, plus calme qu'un morceau de mort. Elle se diluait, il n'y avait plus que le grésillement de la cigarette qui attestait qu'elle respirait. J'aurais voulu gémir, secouer la tête et aboyer autour d'elle comme n'importe quel chien l'aurait fait, mais je ne voulais pas la déranger. J'espérais seulement ne pas la retrouver morte, la cendre a la bouche, plus plate que cette flaque. Car c'était ça. Elles jouaient toutes les deux à s'aplatir, à se résorber et à s'évaporer. » (J'avais le ventre et le bout des pattes dorées)
MarianneL
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le 4 juin 2012

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