Ce livre raconte un épisode assez peu connu de l'histoire allemande: celle des Freikorps et donc de la situation l'Allemagne à la fin de la Première Guerre mondiale. Bien que méconnue, cette période est essentielle pour comprendre les évènements ultérieurs qui marqueront le pays de Goethe.


Ce mouvement très particulier, foncièrement hostile à la démocratie et à la société bourgeoise et recrutant parmi les soldats revenant du front, va paradoxalement servir dans un premier temps de milice à la jeune République de Weimar pour matter les insurrections des Spartakus. Ils serviront ensuite à stopper les insurrections polonaises et baltes en territoire allemand à un moment ou l'Allemagne se trouve confronter avec des contraintes militaires importantes fixées par les vainqueur de 1918. Les Freikrps vont ensuite tenter de renverser la République de Weimar lors du Putsch de Kapp et même s'emparer du pouvoir pendant quelques jours avant de renoncer faute d'adhésion de la population et de réel programme. Suite à leur dislocation, beaucoup vont venir nourrir les rangs de la SA, la milice armée du parti national-socialiste naissant. Loin d'être un mouvement uniforme, le coup de grâce leur sera donné non pas par Weimar mais par le NSDAP, n'acceptant plus leurs vues divergentes et leur potentiel insurrectionnel, lors de la nuit des Longs Couteaux.


Comme souvent dans ses travaux, Venner n'hésite pas à s'appuyer sur des mémoires et récits d'individus pour illustrer ses propos, sans pour autant renoncer à des sources plus "solides" ou des travaux d'historiens émérites. Cela donne un ton très vivant et une certaine intensité à son livre au point que l'on a parfois plus l'impression de lire un roman épique qu'un essai d'histoire. Bien des historiens auraient bon goût de s'en inspirer, car beaucoup ont visiblement tendance à oublier que leurs travaux ont vocation à être lus.


Bien sûr, Venner avait ses opinions (traditionaliste européen et germanophile) et cela se ressent souvent à la lecture de ses écrits. Ce livre ne fait pas exception à la règle. Mais reproche-t'on à Eric Hobsbawn d'écrire l'histoire à travers un prisme marxiste ? L'historien n'est pas tenu au devoir d'impartialité. C'est une chose à prendre en compte avant de se lancer dans la lecture de ce livre. A titre personnel, j'ai apprécié le style de l'auteur et ce livre m'a permis d'en apprendre beaucoup plus sur la République de Weimar. J'ai aussi trouvé la bibliographie intéressante, Venner n'hésitait pas à conseiller ou renvoyer vers les travaux de ses collègues, eussent-ils des penchants politiques antagonistes aux siens. En revanche, j'ai trouvé que l'ultime chapitre, portant sur Ernst Jünger, était un choix de conclusion assez étrange. Il traduisait peut-être à l'écrit une pensée reflétant celle des Freikorps, mais il n'en fût néanmoins jamais membre lui-même et ne participa à aucune de leurs activités. Jünger était sans nul doutte un personnage intéressant, mais je trouve que ce chapitre, dont j'ai par ailleurs trouvé le contenu assez abstrait et fumeux, est une conclusion un peu bancale d'un bon livre d'histoire.

JeanBaptiste2
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le 21 févr. 2021

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