Élégie pour un vampire propose de suivre une portion de la vie d'un non-mort dans futur proche. Dans une société proche du chaos et livrée à la guerre civile, la région Ardennaise apparaît comme une sorte de havre de paix autonome du reste de la France. Au cœur de ce territoire se terre un vampire multiséculaire, le Duc. Assailli par les tourments et par de mystérieux tueurs, sa vie et sa santé mentale ne tiennent qu'à un fil...
Sullivan Lord offre au lecteur un récit vampirique plutôt étrange. L'impression initiale, en découvrant les premières pages, est celle d'un écrit verbeux, jalonné de termes qui alourdissent grandement la fluidité de l'ensemble. Voici un exemple, dès la première page du roman, qui peut illustrer l'aspect lesté de la plume de l'auteur : "Seules quelques mystérieuses gargouilles grisâtres, aux traits sereins, contemplaient les toits de la vieille ville avec emphase, les genoux arc-boutés sur les rebords glissants de de leurs perchoirs surélevés". Comme chaque phrase est à l'avenant de celle-ci, la lecture débute bien difficilement.
Néanmoins, après quelques efforts pour surmonter cet écueil quelque peu roboratif, une ambiance matinée de gothique irrigue peu à peu le récit. Si l'on parvient à faire abstraction de ces innombrables adjectifs enchaînés les uns à la suite des autres, le plaisir de la lecture naît peu à peu au bout de quelques dizaines de pages. L'intérêt du récit allant croissant, et l'habitude de ce style ampoulé se faisant, le lecteur persévérant sera récompensé par des personnages captivants, au premier rang desquels le Duc Charles Ruthven, qui se croisent dans la rage et l'hémoglobine jaillissante. Des questions existentielles sur la nature du temps qui passe sont posées et le terme de l'ouvrage se révèle captivant, récompensant ainsi la ténacité du lecteur hypnotisé.
Nul doute que la suite, si elle s'avère de la même eau, n'en soit que meilleure. Bon sang ne saurait mentir...