Chez Human Tools, chaque procédure, chaque mouvement, la moindre pensée sont décortiqués, étudiés, calculés, rationalisés. Du sourire de l'hôtesse d'accueil, répertorié et adaptable en fonction de l'interlocuteur, à l'attitude des conseillers téléphoniques, dépouillée de toute émotion ou vocabulaire non-approuvé par le Comité du Vocabulaire Purifié, en passant par les différents repas servis en fonction de la position hiérarchique de l'employé désirant se restaurer, ou la tenue vestimentaire, fournie par l'entreprise, tout est sous contrôle pour les Outils Humains à qui on ne demande qu'une chose : être rentables. Aussi, quand la DRH s'avère être un peu trop préoccupée par le bien-être des employés, le cuisinier trop fantaisiste et enclin à la rébellion, et l'hôtesse inapte au port de talons hauts indissociables de l'identité visuelle de HT, Frédéric Hautfort, patron mégalo et inhumain, décide de créer, pour eux et pour d'autres "non-conformes", un séminaire de remotivation. Séminaire de déshumanisation, animé par un comédien un peu rêveur mais poussé à prendre cet emploi par la nécessité d'avoir enfin un "vrai métier". De délations en autocritiques, le broyage de cerveaux est subtilement orchestré par les quelques cols blancs ayant, pour un temps, les faveurs de Hautfort, dans le but évident de pousser ces employés inutiles et nuisibles vers la sortie à moindre frais.
La résistance se met en place, très lentement, sous l'impulsion du formateur, premier à réaliser ce que cache réellement ce concept de remotivation. Certains des non conformes prendront part au groupe qui se réunit pour évacuer, le soir, dans l'ambiance chaleureuse d'un café accueillant, ce qui a été assimilé au cours de la journée dans les locaux froids et impersonnels de HT. D'autres non, pour diverses raisons, pas toujours compréhensibles, mais forcément légitimes.
Même si le presque-happy-end est un peu léger, même si certains personnages sont un peu trop caricaturaux et que les méthodes de rationalisation décrites sont vraiment extrêmes, ce roman décrit une organisation du travail pas si éloignée que ça de la réalité, féroce et inquiétante.
"Pourquoi cette "remotivation" ? (...) Facile, facile, et en même temps, tellement bien pensé! Tout moi! D'abord, nous sommes en France, pas aux States. On ne vire pas les gens comme ça. Pas envie d'avoir l'inspection, les Prud'Hommes et tout le tintouin à dos! Il me faut des raisons solides. Ces six-là sont des tocards -et il n'y a pas encore de licenciement pour tocardise. On doit les pousser à la faute, mais pas trop nettement."
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