Mon Cannes 2014

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☼ Ma Palme d'or

Au milieu d'une sélection cannoise pas vraiment grand public mais carrément réussie (sans doutes la plus intéressante depuis le cru exceptionnel qu'était 2011), Leviathan était peut-être la production la plus curieuse de cet étalage de talents. Zviaguintsev, déjà sacré d'un énorme succès critique pour le superbe Le Retour en 2003, revient à la réalisation avec un film fleuve engagé sur son propre pays - la Russie. C'est à la fois dans l'ère du temps, véritablement dépaysant, d'un classicisme assez assommant mais d'une maîtrise à couper le souffle. Couronné d'un simple Prix du meilleur scénario, on se demande comment le jury n'a pas pu se résoudre à lui donner au moins un Grand Prix, si ce n'est une Palme d'or qu'il n'aurait pas démérité. Sans doute étaient-ils trop occupés à sacrer le dernier pet de travers de Godard.

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Ω Mon Grand Prix

Le cinéma africain est un univers très particulier. Épuré, constitué de structures simples, socialement engagé. Timbuktu c'est tout ça, mais bien plus. Sissako atteint l'apogée de sa forme, ici d'une douce beauté, cette fable moderne est d'une écriture remarquable, d'une sobriété admirable. L'un des meilleurs films de Cannes 2014 est-il une révolution pour les films venu d'Afrique ? Pas sur, mais cette diatribe contre l’extrémisme religieux est d'une telle poésie qu'elle fera sans doute office de référence d'ici quelques années. La violence de son sujet s'allie à merveille avec l'objectivité de son réalisateur qui, plus que de simplement démontrer l'évidence, se confesse et témoigne des horreurs du monde, et de leurs paradoxes. Une grande réussite.

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░ Mon Prix de la Mise en scène

Oui, Saint Laurent c'est ce qu'on fait de plus bobo, de plus cliché en terme de "cinéma d'auteur cannois à la française". Mais voilà, Bonello est un grand, et il le prouve encore ici. Détruisant complètement son maigre concurrent réalisé par Jalil Lespert, Bonello signe un tableau d'un symbolisme lourd mais fort. Mise en scène hypnotique, chaque image est un chef d'oeuvre de composition, de jeux de lumières, d'éclairage, de construction de l'espace. On pense évidemment à la scène de la boîte du nuit ou à l'excellente scène finale. Saint Laurent est, à l'image de l'homme dont il s'inspire, une oeuvre d'art aussi curieuse, traumatique et critiquable qu'elle est majestueuse. Diablement jubilatoire.

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▒ Mon Prix du Scénario

Maps to the Stars est un film qui divisera, autant chez les curieux que chez les amateurs du maître Cronenberg. Trip satyrique qui lorgne autant vers la comédie coenienne, le film de genre et le drame métasocial - une oeuvre assez unique dans le paysage cinématographique, moment de pur cinéma imparfait qui ne laissera de marbre aucun spectateur. La phrase "on adore ou on déteste" n'aura jamais eu plus de sens que dans le cas de Maps to the Stars. Hollywood vu comme une usine à cauchemars par ses déchets, rien que sur le principe ça ne peut faire qu'envie.

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♀ Mon Prix d'Interprétation Féminine (Marion Cotillard)

On ne s'égare pas, l'obsession du personnage de Cotillard finit par embarquer le spectateur - c'est beau, c'est fort, c'est souvent à pleurer. Les larmes ne sont jamais arrachées mais toujours amenées par le spectateur lui-même, l'émotion n'est pas forcée, elle est brute et forte. Portrait saillant des classes populaires, abordant, grâce à son sujet, de nombreux thèmes aux dimensions sociales, morales et psychologiques - Deux jours, une nuit est toujours d'une grande intelligence, parvenant à tenir sa promesse de livrer une conclusion, ni pessimiste ni optimiste, mais réaliste et réfléchie. Une claque monumentale et un grand moment de cinéma.

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♂ Mon Prix d'Interprétation Masculine (Haluk Bilginer)

Bonne grosse Palme bien "monumentale". Bergman et cie ne sont pas loin. Après, le film de Ceylan est très exigent et il faut s'accrocher (heureusement que j'étais en salle). Des moments de grand cinéma, mais difficile pour moi d'accrocher totalement. Objectivement, rien à dire, probablement une Palme dont on reparlera à l'avenir, mais c'est vrai que c'est un peu un cliché. Mais un bon cliché, hein.

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▓ Mon Prix du Jury

Tragédie moderne, fresque dépressive des Etats-Unis et de ses nouveaux héros, Foxcatcher est un film incroyable. Plus encore que la formidable direction d’acteurs, c’est la sobriété brillante de la mise en scène qu’on retiendra du travail de Miller. Calme décadent dans ce déluge de génie macabre qui fait de cette première claque de 2015 un grand film indispensable, impénétrable, et pourtant si évident. Chef d’œuvre.

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Tommy Lee Jones peine à fasciner dans un western parfois laborieux mais dont les enjeux méritent à eux seuls le coup d’œil. Ni mémorable ni raté, une production intéressante et ambitieuse qui dénote des westerns classiques par son propos et ses personnages principaux. Peut-être pas un vent d'air frais, mais indéniablement un bon moment, accentué par la fin très réussie du film qui, on l'espère, parviendra quand même à trouver son public.

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Autant j'admire le Godard de la Nouvelle Vague, autant le nouveau Godard, prétentieux, sans talent, sans idées, est une abomination. "Adieu au langage" n'est qu'un vidéo clip pseudo-intellectuel réalisé par un vieux aigri qui a visiblement une si haute estime de lui qu'il ne juge pas nécessaire d'utiliser ce dit langage. Car oui, Jean-Luc, le langage c'est important. Sans langage tu ne fais que grogner et gémir sans que personne n'en ait rien à foutre.

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Un Loach bien chiant et pas intéressant pour un sous. Beaucoup de qualité, c'est Loach quand même, et il est talentueux le bonhomme, mais "Jimmy's Hall" ne fait que présenter des personnages peu intéressants dans un cadre social déjà vu cent fois dans la filmo de son cinéaste. Pas une purge, mais une itération pas nécessaire.

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Assez grandiose dans certaines scènes, notamment vers la fin. Le casting envoie du lourd et Assayas est indéniablement l'un des meilleurs réalisateurs français en activité. Pourtant, "Sils Maria" manque de souffle, notamment équipe, ou alors tragique, et malgré la performance hallucinante de Juliette Binoche, difficile de crier au génie devant une oeuvre réussie mais pas inoubliable.

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Mouais. Pas mon Dolan préféré. Un peu déçu que ce soit le premier à rencontrer un tel consensus, je trouve "Laurence Anyways" bien plus tourmenté et magnifique, alors que ce "Mommy" possède certes une maîtrise de la narration admirable et une galerie d'acteurs excellents, mais Dolan se perd dans quelques effets de style qui ne m'ont pas vraiment convaincu. Bon film, mais c'est pas non plus le chef d'oeuvre ultime de l'univers. Allez voir Laurence, c'est bien meilleur.

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C'est poétique mais c'est chiant, c'est beau mais c'est trop sobre... "Still the Water" est une série de contradictions. Kawase a un style bien à elle et il faut vraiment l'appréhender tant c'est difficile d'y adhérer. Son approche très étrange du rythme rebute un peu, mais on s'y fait et finalement "Still the Water" est un long-métrage solide qui n'est malheureusement pas à la hauteur des attentes du statut de seul représentant asiatique de la sélection.

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Faudra m'expliquer le prix de Timothy Spall, qui est pas mauvais mais pas non plus génialissime dans un rôle où il grogne la moitié du temps. On est bien loin du biopic classique, mais le film de Mike Leigh est un peu soporifique et lourdingue dans ses effets. Médiocre même si bourré de grandes qualités à la hauteur de son metteur en scène.

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C'est jouissif. Plutôt bien foutu formellement, les acteurs sont excellents, les sketchs variés et tous équilibrés (avec un ou deux vraiment au-dessus - dans le dernier qui est une vraie pépite), enfin bref : drôle, mal élevé, maîtrisé, et plutôt intelligent dans sa satire grinçante de l'ordre établi, qu'il s'agisse de l'administration ou des inégalités des classes. A voir absolument.