Lectures 2021

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L'étonnant Pieyre de Mandiargues nous conte les aventures surréalistes, poétiques et absurdes de Ferréol Buq en 4 chapitres (+ un prologue & un épilogue) à travers des mondes aux architectures incroyables : le Palais Vocabulaire où certaines pièces peuvent être recouvertes de centaines de rats morts, ou des murs enduits de fausse morve ou de milliers d'aiguilles, la géante Statue d'Hermaphrodite dans laquelle on peut voyager à l'intérieur (une pièce différente pour chaque partie du corps) en entrant par le torse, un 3e chapitre où il ne sera question que de fragments de rêves puis un final extraordinaire (4e chapitre, "Le Théâtre de la mort"), où le protagoniste découvre un village où les femmes, placées dans un cercle, meurent et agonisent devant un public constitué uniquement d'hommes… Chaque chapitre est dédié à un artiste : les écrivains André Breton, Francis Ponge, René de Solier et la sculptrice Germaine Richier. Un livre qui ne va pas sans évoquer les futures œuvres de Bernard Noël.

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13 courts textes qui permettent de réfléchir à la fonction et au sens de l'art (qu'est-ce que l'art moderne ? qu'est-ce qu'une bonne peinture ?) à partir de l'oeuvre de Braque. La biographie de l'artiste est synthétisée en 2 chapitres. "Quand une toile vient mal, il l'allonge par terre. Ce n'est pas pour la piétiner. C'est pour la voir de haut". "Quand je suis bien imprégné du sujet, c'est la toile qui me surprend". "Qui peint d'après son projet, ne fait qu'une peinture plate. Il faut tuer peu à peu les idées qu'on a eues". "Braque va et vient, avance, recule, parfois même avance et recule au même instant, sur la pointe des pieds se dresse et s'abaisse, fait une sorte de danse sur place." "La peinture est à sa base, allusion mystérieuse, et chose mentale. A divulguer le mystère, on lui retire sa vertu." "Ses toiles les plus difficiles venaient éclairer pour moi d'autres tableaux sans mystère."

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Bourgeade n'a peur de rien : en 1969, il fait le portrait de New York (proche de l'Enfer) et de ses différents quartiers (un quartier par chapitre) à travers l'itinéraire d'une jeune femme manipulée, happée, dirigée par des hommes abominables : gangsters, sénateurs, hommes d'affaire, photographes, misogynes, pervers, libidineux, calculateurs, traitres, dans une narration à la première personne. Il compare New York à une immense poubelle et à la ville d'Hiroshima après sa destruction ("il y a aujourd'hui dans le monde une ville qui donne le spectacle de ce que fut Hiroshima : c'est New York"). Bourgeade fait le portrait d'une Amérique en putréfaction : la drogue, la ségrégation raciale, le pouvoir de la police, la chaise électrique, le mépris pour les femmes "L'Amérique a des filles pour tout". Le récit reste drôle, cynique, libre, aéré, entrecoupé de dessins, de schémas ou de panneaux routiers et des passages érotiques dont un climax à Broadway, façon Marquis de Sade.

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Extraordinaire œuvre que l'on peut lire selon deux schémas, deux structures : soit linéaire (la vie à Paris d'un groupe d'intellectuels), soit la même histoire entrecoupée de réflexions, d'extraits de livres, de citations. Dans les deux cas, le récit reste linéaire. Beaucoup de termes et de concepts étudiés façon Cortazar : la défectibilité, les paravisions, le non-conformisme, les intercesseurs : accéder par une illusion (peinture, musique, livres) à un plan, à une zone inimaginable, "la chosité" : lorsque l'on est pathologiquement sensible à ce que nous impose le monde environnant. Des réflexions étonnantes sur la pureté, le désordre, la vie comme unité, la surréalité : ce qui en fait une grande œuvre politique, philosophique, documentaire, sociologique. Des inventions : le langage gliglicien... Un traité de musicologie : vision descriptive et sensorielle de nombreux morceaux de musique jazz (Armstrong, Fats Waller, Ellington, Roll Morton...). Tout concourt à faire de ce livre une œuvre magistrale par sa liberté, sa folie, ses inventions et son érudition.

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Un grand livre qui oblige le lecteur à se questionner sur le sens de sa propre vie à travers le parcours d'un "spectre" traversant le monde des vivants ? ou d'un vivant extrêmement lucide qui observe le royaume des morts peuplé de créatures-marionnettes, de personnages en décomposition, d'hommes-leurres qui tentent tour à tour de convaincre le protagoniste de faire partie de leur monde ? Le mécanisme de l'addiction, de la dépendance (drogue, alcool, etc.) est parfaitement étudié.

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Remarquable par le style, l'esprit, et la structure du récit : débute par le récit d'un enfant qui suit son père médecin dans la campagne de la Haute Autriche (rencontres "invraisemblables" avec des personnages atypiques, désespérés, reclus), puis ascension jusqu'au château avec la rencontre d'un homme (le Prince) qui prend progressivement le relais de la narration avec un très long monologue tout aussi désillusionné sur l'Etat, la paternité, une étude presque sociologique de la marche (la façon de marcher, de se déplacer des indépendants d'esprit ? des idiots ?), personnification de l'Etat et du "raisonnable" sous les traits d'un personnage nommé Moser ("Les Moser s'insinuent en vous, et vous voilà infectés jusqu'à la moëlle"), éloge des promenades sans paroles, l'homme : créature tourmentée...

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Très étonnant de lire un récit sur la nature même de l'exaltation ! Portrait de deux hommes que la nature exalte, sensibles à la moindre odeur, couleur, révolution, émanant de la nature. Enthousiastes et ravis à la simple vue d'une fleur rare apparaissant dans une prairie ou du mouvement des feuillages dans un arbre. Nous regardons à travers eux, à travers les yeux et les sens de ces deux personnages hypersensibles, lucides, comme possédés par une force qui font d'eux des êtres "hors du commun". Tout cela est renforcé (par antagonisme) par l'ignominie de plus en plus prégnante de l'humain qui se manifeste par des guerres, mais aussi par des choses plus complexes liées au caractère humain (violences, calculs, hypocrisie, stratégies, manipulations,...).