Cover Journal d'écoute : 2020

Journal d'écoute : 2020

Car c'est super original mais qu'au bout de cinq années sur Sens Critique et face au grand nombre d'albums et EPs que j'ai écoutés l'année dernière, il fallait peut-être que je m'y mette. Donc j'ai fini par céder et créer une liste qui réunit tout ce que j'écouterai cette année, que ce soit des ...

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Liste de

231 albums

créee il y a environ 4 ans · modifiée il y a plus de 2 ans

Modus Vivendi
7

Modus Vivendi (2020)

Sortie : 17 janvier 2020 (France). Alternative R&B, Pop Rap

Album de 070 Shake

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.5

Après avoir captivé le monde entier grâce à une apparition très remarquée sur le huitième album de Kanye West, "ye", 070 Shake s'est rapidement retrouvée face à l'épreuve du premier album, un moment décisif où elle se devait de présenter son style musical aux auditeurs dont la curiosité était attisée et montrer qu'elle était bien plus que la protégée d'un rappeur et producteur qui sait repérer des talents "à part". Et "à part", "Modus Vivendi" l'est ! L'artiste originaire du New Jersey signe un album électronique et électrique composé de productions extrêmement soignées et qui emmènent l'auditeur dans un trip musical où les beats de hip-hop rencontrent des sonorités venant de partout, où les genres se mélangent pour proposer quelque chose d'inclassable. Par moment, le côté spatial du premier opus de la jeune artiste n'est pas sans rappeler celui de Kid Cudi ("Rocketship") prouvant qu'elle est bien à sa place chez G.O.O.D Music, un "rooster" d'artistes ambitieux et qui ont toujours eu le souhait de construire un univers bien à eux à travers leur musique.

L'aspect le plus frappant et mémorable de "Modus Vivendi" est bien évidemment la voix unique de 070 Shake qui sur "Ghost Town" et divers singles ne m'avait jamais particulièrement fait ressentir quoi que ce soit. Mais ici, les performances de la chanteuse américaine sont passionnées et révoltées. Danielle Balbuena, de son vrai nom, chante tout ce qu'elle a sur le cœur et ajoute ainsi une intensité supplémentaire aux productions qui avaient déjà fait une sacrée part du travail en installant des atmosphères différentes et parfois légèrement surréalistes ("Terminal B"). Qu'il s'agisse d'un beat hip-hop agressif ("Morrow", "Daydreamin"), d'un R&B aérien ("Divorce"), d'une ligne de basse accrocheuse ("Under The Moon") ou d'une énorme production pop explosive ("Guilty Conscience"), 070 Shake s'empare de n'importe qu'elle composition et y pose son flow émotif qui transforme ces morceaux en de véritables petites claques. À la fois créatif dans sa production et très brut dans ses interprétations, "Modus Vivendi" est un album marqué par une personnalité et une athenticité forte et une sacré façon pour l'artiste américaine de montrer qu'elle est bien plus qu'un featuring sur un album de Kanye West.

Ce que je retiens : "Divorce", "Guilty Conscience", "Daydreamin".

Circles
7.4

Circles (2020)

Sortie : 17 janvier 2020 (France).

Album de Mac Miller

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.5

"We are left to imagine where Malcolm was going and to appreciate where he was." C'est ainsi que nous a été présenté cet album posthume de Mac Miller par ses proches et il n'y a pas de meilleures façons de résumer "Circles". On sent sur ces chansons que le rappeur n'aura jamais pu terminer et perfectionner toute l'ambition qu'il avait musicalement et comme "Swimming" et les albums précédents n'étaient en réalité que le début de nombreuses expérimentations et recherches musicales. "Good Thing" semble donner suite directement à "So It Goes" comme pour annoncer que même après cette dernière chanson de cet ultime album, le rappeur contiuait à tracer son chemin et s'exprimer en toute liberté, sans pudeur. Jon Brion ne trahit jamais l'artiste en finissant, pour lui, de produire ces chansons. Un album épuré et pur s'offre à nous, où l'honnêteté, la vulnérabilité et l'authenticité du rappeur de Pittsburg règnent en maîtres. Ce qui est frappant sur "Circles", c'est la lucidité de Mac Miller face à lui-même, face à sa vie. Ses chansons respirent la vérité, et sur ces productions peu chargées cela se sent plus que jamais. Un autre aspect frappant, c'est que ces titres nous laissent imaginer et sentir toute l'ambition, toute la créativité de Mac Miller. Ces morceaux que le rappeur n'avait pas eu le temps d'achever semblent plus abouties que les albums que sortent beaucoup d'autres artistes. Et ça, c'est bel et bien le testament ultime du talent et de la vision paticulière de Mac Miller !

Ce que je retiens : "Woods", "Good News", "Blue World".

Manic
6.1

Manic (2020)

Sortie : 17 janvier 2020 (France).

Album de Halsey

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.5

Halsey s'est toujours revendiquée comme étant une artiste "alternative", une artiste dont la musique pop n'était pas de la pop mais quelque chose de plus "profond", plus recherché. Objectivement, ça a toujours été une chanteuse pop. Personnellement, rien de ce qu'elle avait proposé jusqu'à aujourd'hui ne m'avait pas captivé, j'avais toujours trouvé ses projets assez pauvres à l'exception d'une ou deux petites surprises. "Manic", son troisième album, est présenté comme son premier opus ouvertement pop. C'est assez drôle car oui, il l'est, mais pas plus que les précédents. Et là où sur "Hopeless Fountain Kingdom" elle jouait la carte de l'album-concept qui enlevait toute force émotionnelle à celui-ci, sur "Manic" tout apparaît beaucoup plus simple et moins calculé, comme si en s'avouant enfin "pop", Halsey laissait derrière elle les ambitions qui l'empêchaient de s'exprimer librement dans sa musique.

"Manic" n'est pas l'album pop le plus fascinant du monde. Il est rempli de morceaux très accessibles et légers, qui fonctionnent plus ou moins bien ("Graveyard" fera partie des semi-réussites, là où "You should be sad" est beaucoup moins bon). En réalité, il y a un peu à boire et à manger sur "Manic" mais plusieurs choses en font un disque réjouissant. Tout d'abord, le côté plus acoustique de l'album en général qui révèle des morceaux pop simples et très réussis, comme le rêveur "clementine" ou la ballade "Finally // beautiful stranger", qui n'est pas sans nous rappeler la country romantique et colorée de Kacey Musgraves. Puis il y a surtout cette honnêteté qui est gagnée grâce à la simplicité de cet album, une vulnérabilité qui offre de véritables moments de grâce comme "More", une lettre ouverte de la part d'Halsey à son futur enfant et qui parle des difficultés qu'elle rencontre avec son propre corps pour enfanter, ou "929", un freestyle sans concession touchant. Donc oui, si en s'assumant - enfin - comme une artiste pop Halsey nous livre des chansons faciles pas toujours convaincantes, cela lui permet avant tout de revenir à une écriture et une composition plus simples, plus douces, sans prétentions et qui révèlent un visage beaucoup plus humain de la chanteuse américaine.

Ce que je retiens : "929", "Finally // beautiful stranger", "More".

Bebey
6.3

Bebey (2020)

Sortie : 17 janvier 2020 (France).

Album de Theophilus London

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.0

Tout en restant fidèle à un son aux influences 80s avec lesquelles il travaille depuis quelques années et de façon très assumée sur ce nouvel album, Theophilus London nous entraîne dans un new-york rétro glorieux et dansant, réussissant à recréer l'ambiance d'une époque - ou du moins, l'idée qu'on s'en fait. "Bebey" est un projet qui est très difficile à ne pas trouver plaisant tellement les éléments que l'artiste américain a utilisés sont parfaitement sélectionnés pour créer des morceaux dont la mission principale est de nous faire danser. Par moments, on se croirait dans un "boiler room", et à d'autres dans un club underground new-yorkais au milieu des années 80. C'est franchement bien fait et très entraînant même si ça ne va généralement pas plus loin que ça, ce qui était déjà le problème de son projet précédent, l'ultra-classe "Vibes". Le seul double morceau qui essaye d'offrir quelque chose d'un peu différent, "Seals", apparaît presque comme une anomalie dans sa version "reprise" - qui vient avant la version "originale" et qui est clairement la meilleure, ou du moins la plus intéressante - au sein de cette fête qu'est "Bebey". Mais "Seals" prouve cependant que Theophilus London est, s'il le souhaitait, capable de proposer des titres un peu plus variés, quelque chose qui serait le bienvenu à l'avenir.

(à écouter : "Cuba", "Only You", "Pretty")

The Archer
7.1

The Archer (2020)

Sortie : 8 janvier 2020 (France). Psychedelic Pop, Indie Pop

Album de Alexandra Savior

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.2

"The Archer" est un album qui est très joliment produit et qui comprend de beaux arrangements, le tout créant une sorte d'univers musical rappelant fortement la musique pop et rock des années 60 - un peu ce que Weyes Blood a fait sur son dernier album mais en moins envoutant. C'est clairement un beau travail à ce niveau-là. Le point faible de cet album réside dans la performance d'Alexandra Savior, qui a une voix qui se mêle bien dans le décor musical créé en collaboration avec Sam Cohen. Parfois un peu trop, quite à s'y perdre et disparaître complètement dedans ("Crying All The Time", "Howl"). Je comprend les comparaisons à Lana Del Rey qui reviennent souvent quand on parle de la voix d'Alexandra Savior, mais je trouve qu'il y a quand même une différence très importante entre les deux chanteuses et cela constitue la raison pour laquelle "The Archer" ne décolle jamais vraiment à mes yeux : l'interprétation de Savior m'apparaît comme étant très plate et peu émotive, ce qui empêche les productions et les textes plutôt beaux de nous toucher. Un bon exemple de cela pour moi est "The Phantom" qui me rappelle l'album de The Last Shadow Puppets - Alex Turner ayant beaucoup collaboré avec Alexandre Savior, cela n'est peut-être pas anodin. Tout ce que j'ai pu penser en écoutant cette chanson, c'était à quel point elle pourrait être excellente si le leader des Arctic Monkeys l'interprétait, mais qu'ici ça ne donnait rien de transcendant. Et c'est dommage car il y a pleins de chansons qui ont du potentiel sur "The Archer", notamment la superbe piste d'ouverture piano-voix "Soft Currents", mais elles manquent cruellement de vie.

Ce que je retiens : "Soft Currents", "But You", "The Archer".

Rare
5.8

Rare (2020)

Sortie : 10 janvier 2020 (France).

Album de Selena Gomez

Keith Morrison a mis 3/10.

Annotation :

Score : 3.4

Les critiques qui applaudissent cet album et l'acclament comme étant l'un des meilleurs disques ces derniers mois, je comprend pas... C'est simple : "Rare" est un album de démos qui auraient pu être chantées par n'importe quelle starlette pop. Nous sommes face ici à de la pop qui se veut minimaliste mais qui réussit l'exploit d'avoir l'air surproduite et pas aboutie en même temps (pleins d'idées qui pourraient apporter un truc mais qui ne sont pas creusées comme les "hum-hum-hum" de "Look At Me Now"). Les paroles multiplient les métaphores ridicules et dénuées de sens ("Saw us gettin' older / Burnin' toast in the toaster"), les collaborations servent à rien (que fout Kid Cudi ici ?!), et, honnêtement, certaines chansons pourraient fonctionner si Selena Gomez était une bonne interprète. Mais ce n'est pas le cas, le charisme et l'émotion sont inexistants dans sa musique. Seule chanson à sauver : "Vulnerable", même si elle souffre aussi de ce problème qu'ont les producteurs de Selena Gomez d'essayer des trucs sans aller jusqu'au bout (le middle 8 avec des percussions qui sortent de nulle part et vont - vous l'avez deviné - nulle part).

(à écouter : "Vulnerable" et bonne soirée !)

Music to Be Murdered By
6.2

Music to Be Murdered By (2020)

Sortie : 17 janvier 2020 (France). Pop Rap, Trap

Album de Eminem

Keith Morrison a mis 4/10.

Annotation :

Score : 4.1

Je ne sais pas à quel moment écouter un nouvel album d'Eminem est devenue une épreuve, mais voilà, c'est le cas pour celui-ci. Pour celui qui a précédé aussi, et celui d'avant (quel enfer) et... celui d'avant également, car faut pas déconner, même si "The Marshall Mathers LP 2" a l'air d'un chef-d'oeuvre à côté des récents projets du rappeur de Detroit, ça reste très très moyen. "Music to Be Murdered By", c'est le retour de Slim Shady. Enfin, c'est ce qu'on aimerait nous faire croire car ce projet n' a rien de la fourbe, de l'énergie, de la passion et de l'originalité des albums qui ont fait de l'alter-ego de Marshall Mathers une figure iconique du rap US. Ce 11e opus d'Eminem est long. Très long. Il a beau battre des records de rapidité, son flow reste, à mes yeux, très fatigué. Quelque chose a changé, et clairement peu importe le nombre de retours de Slim Shady qu'Eminem voudra nous imposer, il est temps de passer à autre chose, de se réinventer. On appréciera, à outre mesure, "Darkness", "Godzilla" et "Unaccommodating" et on oubliera le reste. Encore un album d'Eminem à mettre à la corbeille... quelle tristesse.

Ce que je retiens : honnêtement... pas grand chose. Je pense que j'aurais oublié l'existence même de cet album dans deux mois.

Big Conspiracy
6.5

Big Conspiracy (2020)

Sortie : 23 janvier 2020 (France).

Album de J Hus

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.3

C'est quelque chose d'assez dingue et d'assez beau de constater l'évolution de J Hus sur ce second album (le premier après un séjour en prison dont on a pas mal entendu parler dans le milieu du rap british, cf. "PSYCHODRAMA" de Dave). "Big Conspiracy" est un disque sur lequel le rappeur de Stratford défie avec une habilité surprenante ce qu'on attendait de lui musicalement après son premier opus. Là où les productions électroniques et dominées par une rythmique accrocheuse avaient composé la recette des chansons de "Common Sense", "Big Conspiracy" révèle une musicalité beaucoup plus forte et organique, où les airs de saxophone et riffs de guitare apportent une chaleur particulière à ce que propose J Hus. Si ses textes sont parfois un peu maladroit, le londonien démontre qu'il a quand même des choses à dire, qu'il a mûrit considérablement et se fait une place sûre dans le panel des rappeurs anglais les plus influents du moment. Pas aussi politique et profond que Dave, ni faiseur de bangers et d'hymnes inspirants comme Stormzy, J Hus prouve de sa singularité sur son deuxième album : il est un rappeur qui partage sa sagesse, sans jamais prétendre être la plume la plus aiguisée du rap anglais, sur des productions qui mélangent les genres - quitte à créer le sien, l'Afroswing - juxtaposant des textes sérieux avec des instrumentations lumineuses.

Ce que je retiens : "Must Be", "Big Conspiracy", "Fight For Your Right".

Dreaming of David
6.9

Dreaming of David (2020)

Sortie : 31 janvier 2020 (France).

Album de Ryan Beatty

Keith Morrison a mis 8/10.

Annotation :

Score : 7.8

Ce qui frappe le plus à la première écoute du second album de Ryan Beatty, c'est la production vocale étonnante, mélangeant excentricités au vocoder, superpositions d'harmonies et pureté vocale absolue. Une façon intelligente pour celui qui s'est d'abord fait connaître au début des années 2010 en tant que chanteur pour adolescentes de faire un pied de nez aux productions dans lesquelles il a été trop longtemps enfermé. Devenu un artiste de pop indie, Ryan Beatty signe avec "Dreaming of David" un projet encore plus ambitieux, plus riche et qui met en avant de façon évidente le potentiel créatif du chanteur. Ce second opus mélange des productions pop lo-fi où les synthétiseurs et les guitares acoustiques jouent un rôle important avec des créations musicales plus surprenantes. La voix du chanteur domine très souvent les productions, comme sur "Genesis" où la mélodie du morceau réside avant tout dans la performance vocale de Beatty, insistant sur le côté personnel de cet album.

Il est assez facile de reconnaître les influences de Ryan Beatty tout au long de "Dreaming of David". Celle de "Blonde" de Frank Ocean plane partout au-dessus et cet album, notamment sur la façon que Ryan Beatty a d'utiliser des guitares acoustiquess ("Genesis", "Backseat"). Mais on a aussi parfois l'impression d'écouter un disque de Kevin Abstract, un de ses collaborateurs fréquents, sur des morceaux comme "Hawkshaw" et plus particulièrement "Patchwork" avec les expérimentations de Ryan Beatty avec le vocoder et certains couplets qui apparaissent comme presque rappés. Si toutes ces influences sont plutôt réjouissantes, le problème est qu'elles sont parfois présentes de façon un peu trop évidente. Mais sur la seconde moitié de l'album, Ryan Beatty reprend le dessus sur ces différentes inspirations pour bien réaffirmer sa personnalité. Une des plus belles preuves de cela est "Evergreen", une production et composition pop parfaites qui gagnent en originalité grâce au travail réalisé à l'aide du vocoder sur les refrains. La performance du chanteur ici est splendide et permet presque d'appréhender l'outro sortie de nulle part qui clôt le morceau en beauté. "Dreaming of David" est un album qui confirme Ryan Beatty comme étant un artiste pop intéressant et innovant, même s'il doit beaucoup à d'autres artistes, et ses chansons intimes et romantiques se révèlent très touchantes et d'une douceur mélancolique réconfortant.

Ce que je retiens : "Evergreen", "Backseat", "In The End".

Funeral
5.3

Funeral (2020)

Sortie : 31 janvier 2020 (France).

Album de Lil Wayne

Keith Morrison a mis 5/10.

Annotation :

Score : 5.3

Le truc avec "Funeral", contrairement à "Music to Be Murdered By" sorti deux semaines plus tôt, c'est que c'est un album d'un ancien artiste majeur du hip-hop des années 2000-early 2010s qui met en avant le fait que celui-ci, même si son apogée commerciale est derrière lui, a toujours beaucoup d'énergie et cherche à trouver un nouveau souffle au lieu de tomber dans une nostalgie qui le ferait facilement passer pour un ringard. Le truc avec "Funeral", c'est qu'en réalité la performance de Lil Wayne n'est pas à blâmer une seconde : le rappeur est en grande forme, il s'essaye à différents types de flows pour montrer l'étendu de sa palette, il cherche à proposer de nouvelles choses et a l'air plus passionné que jamais (même sur "The Carter V", il ne semblait pas aussi motivé). Mais l'autre truc avec "Funeral", c'est que, bah... la musique n'est juste pas très bonne. Les productions tournent rapidement en rond, sont passe-partout (même si parfois elles constituent un terrain relativement nouveau pour Weezy) et les collaborations n'apportent pas grand chose, à l'exception d'un Jay Rock qui réveille "Bing James", l'une des meilleures pistes du disque. Le truc principal avec "Funeral", c'est que ça aurait pu être un album beaucoup plus excitant s'il n'était composé que de 10 ou 12 chansons. Le projet est beaucoup trop long et si sur "The Carter V" ça fonctionnait car ça correspondait à 5 ans de travail et d'attente, ici on aurait juste voulu quelque chose de plus concis et, par conséquence, de nettement plus efficace.

Ce que je retiens : "Bing James", "Sights and Silencers", "Mahogany".

LAGEOS
7.1

LAGEOS (2018)

Sortie : 25 mai 2018 (France).

Album de Actress et London Contemporary Orchestra

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.3

Une collaboration originale et intéressante entre Actress et le London Contemporary Orchestra, une rencontre entre un producteur de musique électronique et un orchestre philharmonique. C'est le genre de projet qui soit fonctionne à merveille, soit pas du tout. "LAGEOS" tombe heureusement dans la première catégorie, le mélange entre musique électronique et orchestrale est bien effectuée, par moment de façon évidente ("Chaos Rain", "Chasing Numbers") et d'autres plus mesurée ("Hubble", "Audio Track 5"). C'est dans ce second cas de figure, lorsque la fusion entre deux genres musicaux se fait d'une façon organique et inédite, que "LAGEOS" fonctionne le mieux et produit une musique hypnotisante.

Ce que je retiens : "Hubble", "N.E.W.", "Audio Track 5".

Aerial
7.4

Aerial (2005)

Sortie : 3 octobre 2005 (France). Pop, Rock, Art Rock

Album de Kate Bush

Keith Morrison a mis 9/10.

Annotation :

Score : 9.0

Prenant une forme très similaire à celle du cultissime "Hounds of Love" sorti 20 ans plus tôt, "Aerial" est découpé entre une première partie composée de sept chansons individuelles et une "suite", un ensemble de morceaux qui s'enchaînent et n'en forment qu'un seul constituant une symphonie pop fantasque et captivante. Si sur "The Ninth Wave" la protagoniste incarnée par Kate Bush était perdue au milieu d'un océan sombre et cauchemardesque, sur "Aerial" nous sommes complètement à l'opposé : l'album est lumineux ("Here comes the sunshine" chante-t-elle sur "Bertie"), la mer est faite de miel, le ciel de diamants et l'océan est si calme qu'il devient le décor de la baignade nocturne de deux amoureux. Loin du cauchemar de la seconde partie de "Hounds of Love", le huitième album de Kate Bush est une échappée onirique grandiose - pourtant inspirée par le quotidien d'une mère - où les expérimentations musicales et lyriques sont riches (sur la première partie de l'album, Bush prend le rôle d'un personnage différent sur chaque morceau, allant d'Elvis sur "King of the Moutain" à sa propre mère sur "A Coral Room") et d'où s'évapore une atmosphère paisible. Un des albums les plus ambitieux et les plus enchanteurs de Kate Bush.

(à écouter : "How To Be Invisible", "Sunset", "A Coral Room")

UNLOCKED
6.9

UNLOCKED (2020)

Sortie : 7 février 2020 (France). Hardcore Hip-Hop, Boom Bap

Album de Denzel Curry et Kenny Beats

Keith Morrison a mis 8/10.

Annotation :

Score : 7.9

Quand un des rappeurs les plus créatifs du moment unit ses forces avec un producteur de hip-hop qui a prouvé maintes et maintes fois de sa créativité lui aussi, forcément le résultat est intéressant. "UNLOCKED" est projet très concis : 18 minutes top-chrono, on est emporté dans un univers coloré et nostalgique. On retrouve bien l'esprit d'une mixtape où tout s'enchaîne très vite sans jamais créer pour autant une uniformité. Chaque morceau sur cet album - c'est ainsi qu'est présenté la nature du projet - offre quelque chose de bon, d'intéressant, de surprenant et de franchement jubilatoire. Écouter Denzel Curry rapper sur une production de Kenny Beats, déjà sur papier, ça donne l'eau à la bouche. Mais quand le résultat prouve à quel point le rappeur de Carol City est énergique, peut délivrer des paroles qui pourraient très vie être ridicules avec autant d'aisance et fait preuve d'une versatilité assez incroyable, pouvant être aussi bien psychédélique ("Cosmic.m4a") que révéler des influences old-school ("DIET_"), forcément, on déguste. Et "UNLOCKED" c'est tout à fait ça : une petite gâterie qui, on l'espère, est l'avant-goût d'une collaboration qui va durer. C'est aussi bon de noter comme c'est assez incroyable que les deux artistes les plus prolifiques du moment réussissent à toujours proposer des projets où la qualité est aussi soutenue. C'est rare et ça mérite d'être applaudi.

Ce que je retiens : "So.Incredible.pkg", "Take_it_Back_v2", "DIET_"

Fuck the World (EP)
6.9

Fuck the World (EP) (2020)

Sortie : 7 février 2020 (France).

EP de Brent Faiyaz

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 6.9

Un album court et extrêmement concis qui s'écoute d'une traite, comme un mix continu. Cela correspond bien à l'esprit de Brent Faiyaz ici, le projet prenant la forme d'un "stream of consciousness" où le chanteur s'interroge sur la société qui l'entoure, sur ses relations et sa façon de vivre. L'artiste de R&B semble très libre sur cet album : difficile de ne pas avoir l'impression d'écouter un freestyle sur le brumeux et lent "Fuck The World (Summer in London)" ou sur des titres très courts tels que "Clouded" et "Soon Az I Get Home" qui vont droit au but. Les productions, mélangeant un R&B lent et minimaliste avec des sonorités plus old school et teintées de soul et de hip-hop, créent une atmosphère hallucinée qui est un peu le coeur de ce disque. Pas "halluciné" dans le sens de psychédélique, "halluciné" comme si Brent Faiyaz redescendait de son trip. "Fuck The World", c'est un album du désenchantement et cela se sent dans tous les aspects du projet. Ce qui est dommage, c'est que cet album est trop court pour véritablement faire son effet et laisser une marque. Mais en tant que petit projet spontané, ça fonctionne extrêmement bien et cela permet de révéler une autre facette de la créativité de Brent Faiyaz.

Ce que je retiens : "Lost Kids Get Money", "Fuck The World (Summer in London)", "Been Away".

ALT F4 (EP)
7.1

ALT F4 (EP) (2020)

Sortie : 7 février 2020 (France).

EP de Swing

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.5

Ce que je dirais de la musique de Swing, c'est qu'elle est très agréable et pas juste dans le sens "c'est sympa à écouter, j'ai rien d'autre à dire", mais plus parce que cet EP procure une sensation agréable et qui donne envie de se poser et juste penser à tout et à rien. La voix du rappeur et chanteur belge participe beaucoup à créer ce ressenti et les productions moroses l'accompagnent très bien, transmettant le spleen du poète déjà bien présent dans ses textes soignés. Meilleur exemple du fait que Swing fait de la musique qui est vraiment "agréable", Angèle apparaît sur "S'en aller" et sa participation est très douce et lumineuse, alors que ce n'est pas ce que je ressens généralement quand j'écoute sa musique. Le seul truc, c'est que si je trouve "ALT F4" agréable et que je reconnais pleins de qualités à cet EP, ce n'est pas non plus un projet que j'aurais particulièrement envie d'écouter tous les jours car - et j'utilise très rarement cette expression - je trouve que tous les morceaux se ressemblent un peu et qu'au final Swing n'a pas grand chose à dire. J'ai du mal à voir comment un album constitué que de chansons dans la lignée de celles présentes ici peut fonctionner sur la longueur. Affaire à suivre, je ne demande qu'à être surpris...

Ce que je retiens : "S’en aller", "Soon".

The Slow Rush
6.6

The Slow Rush (2020)

Sortie : 14 février 2020 (France). Synth-pop, Psychedelic Pop, Neo-Psychedelia

Album de Tame Impala

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.4

Je pense que mon problème principal avec "The Slow Rush", c'est juste que j'ai pas grand chose à en dire. J'ai mis du temps à apprécier "Currents" à cause d'une hype qui avait fini par écraser ce brilliant album de pop sur lequel Kevin Parker offrait de belles expérimentations pop psychédéliques qui permettaient d'appuyer sur ses paroles touchantes ("Yes I'm Changing", "New Person, Same Old Mistakes"). Sur "The Slow Rush", l'artiste australien continue de faire exactement ça, nous offrant une production irréprochable, une pop retro-eighties perfectionnée, des textes mélos ("Lost In Yesterday", "It Might Be Time") et des morceaux dansants ("Breathe Deeper", "Borderline"). Mais c'est aussi ça la grosse faiblesse du quatrième opus de Tame Impala : Kevin Parker se contente de faire la même chose que ce qu'il avait fait sur ses albums précédents et c'est assez flagrant à quel point il semble avoir du mal à se renouveler. Donc même s'il y a quelques morceaux plaisants, de bonnes idées ici et là ("Glimmer" qui aurait mérité d'être approfondi... ou pas car ça aurait peut-être enlevé son originalité au final) et que, comme je l'ai déjà remarqué, la production est irréprochable, on s'ennuie quand même sévère en écoutant ce "Slow Rush" qui ne provoque aucun "rush" quelconque, qu'il soit rapide ou lent.

(à écouter : "Breathe Deeper", "Glimmer", "Lost In Yesterday")

II: La bella vita
8.1

II: La bella vita (2020)

Sortie : 14 février 2020 (France).

Album de Niia

Keith Morrison a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Score : 8.8

Il y a un an, Niia révélait "Face", le premier extrait du successeur de "I", l'une des plus belles suprises de 2017. Ce single est tout simplement la meilleure chose qu'elle et Robin Hannibal aient produit dans leurs carrières respectives : la chanson mélange un beat trap percutant avec des résonnements de cordes et un sample de Melody Gardot hypnotiques, la voix chaude et délicate de Niia surfant avec une aisance impressionnate sur cette production. "Face" annonçait du bon, du très bon. Et il est réjouissant de constater quasiment un an plus tard que oui, le single était une parfaite représentation de ce qui allait venir avec "II: La bella vita".

Si "I" charmait par sa volupté et ses reflets de Sade, c'était probablement ses mélodies composées au piano qui constituaient l'élément le plus mémorable de ce premier disque. Sur "II: La bella vita", Niia l'a bien compris en nous offrant une seconde partie concentrée sur des morceaux piano-voix. Mais avant ce superbe final, le second album de la chanteuse italo-américaine la voit nous servir un R&B redoutablement efficace. Les quatre premiers morceaux sont probablement les plus excitants qu'elle ait pu signer à ce jour, assumant une certaine influence hip-hop sur le féroce "Black Dress" et faisant des clins d'oeil à des tubes phares des années dorées du R&B comme "Obsessed" de Mariah Carey sur "Obsession" et "Get It On Tonite" Montell Jordan sur "Whatever You Got". Mais encore une fois, ce sont ses compositions piano-voix telles que "If You Won't Marry Me Right Now", "La Bella Vita" et "Cup of Trouble" qui sont les plus frappantes sur cet album, révélant de façon complètement épurée la vulnérabilité, l'émotion et le génie musical de Niia. Si sur "I" elle chantait sa dévotion amoureuse avec une classe incroyable, sur "II: La bella vita" l'ex-protégée de Wyclef Jean y raconte sa déception sentimentale avec une confiance et une force qui la démontrent comme étant une musicienne ambitieuse et sans concession.

(à écouter : "Face", "If You Won't Marry Me Right Now", "Whatever You Got")

Boniface
6

Boniface (2020)

Sortie : 14 février 2020 (France).

Album de Boniface

Keith Morrison a mis 5/10.

Annotation :

Score : 5.0

De la synth-pop à l'influence nostalgique des eighties, une tendance qui peut des fois offrir de belles choses mais qui commence malgré tout à se fatiguer un peu après plusieurs années où quasiment tout le monde semble s'être essayé au genre. Boniface et son album éponyme tombent malheureusement dans la seconde catégorie. Il n'y a rien de mauvais sur cet album, mais absolument rien qui ne retient mon attention non plus au point où je ne serai même pas capable de dire ce que j'en retiens... Et c'est peut-être le pire genre d'albums à mes yeux : écoutable mais instantanément oubliable.

These Elements (EP)
7.5

These Elements (EP) (2019)

Sortie : 22 novembre 2019 (France).

EP de Låpsley

Keith Morrison a mis 9/10.

Annotation :

Score : 9.4

"Eve" s'était glissée dans ma playlist "Discover Weekly" sur Spotify. Découverte de Låpsley, que je connaissais seulement de nom, avec cette petite perle. Un EP absolument brillant. Ce genre de projet qui te donne ce sentiment rare mais délicieux de l'excitation, de la curiosité et de la joie intense de découvrir un nouveau talent à part. Et juste comme ça, avec 4 chansons révélées sans grande cérémonie, son second album est devenu une de mes plus grosses attentes du premier trimestre de 2020. (j'ai son premier album à découvrir en attendant)

Ce que je retiens : honnêtement tout. "Drowning" est peut-être la seule chanson qui me transcende pas, mais ça reste du très bon.

Miss Anthropocene
6.7

Miss Anthropocene (2020)

Sortie : 21 février 2020 (France).

Album de Grimes

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.3

On peut dire qu'on l'aura attendu celui-là, et "Miss Anthropocene", le cinquième album de Grimes, comporte tout ce que l'artiste avait promis : une atmosphère plus sombre et futuristique, des productions plus travaillées et plus polie que sur "Art Angels", des expérimentations encore plus grandes et plusieurs chansons qui ressemblent à des tubes. "Miss Anthropocene" est tout cela, révélant tour à tour une piste d'ouverture surréaliste qui installe bien l'ambiance de l'album ("So Heavy I Fell Through The Earth"), des morceaux dominés par les guitares ajoutant une touche rock au disque ("My Name Is Dark", "Delete Forever"), une bonne grosse production typique de Claire Boucher ("Violence"), une chanson qui mixe sonorités orientales et refrain pop euphorique ("4 ÆM"), des moments plus introspectifs ("You’ll miss me when I’m not around", "Before the fever") et un final qui se situe entre électro psychédélique et pop acidulée.

Bref, le nouvel album de Grimes est bel et bien un album de Grimes : c'est étrange mais fun, c'est toujours surprenant, c'est un mélange de pleins de choses qui n'ont pas forcément de rapport, c'est parfois complètement barré et parfois touchant. Beaucoup de critiques semblent penser que "Miss Anthropocene" est l'album pop - celui qui la révèlera à un public encore plus large - de l'artiste canadienne et ils n'ont pas forcément tord : tous les éléments qui rendent Grimes intéressante et unique sont là, dans une version encore plus accrocheuse, aboutie et accessible que sur les projets précédents. Mais si tout est bien produit et ça fonctionne, il y avait quelque chose sur les albums précédents de Grimes qui les rendait particulièrement excitants et qui, je trouve, semble manquer ici. Une sorte de spontanéité, de liberté qui est ici perdue dans ces productions trop polies et dans ce concept tournant autour de l'intelligence artificielle et du réchauffement climatique annoncé par l'artiste mais pas perceptible en écoutant l'album. Ca reste très bon, il y a des moments de pur génie (le violon et le banjo sur "Delete Forever") mais je ne peux pas m'empêcher de me sentir beaucoup moins emballé et marqué par cet opus que ceux qui sont venus avant, même si certains étaient complètement bordéliques ("Art Angels").

(à écouter : "Delete Forever", "So Heavy I Fell To Earth", "New Gods")

Suddenly
6.7

Suddenly (2020)

Sortie : 28 février 2020 (France).

Album de Caribou

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.1

Je ne savais pas trop à quoi m'attendre avoir d'écouter cet album et je dois dire que "Suddenly" m'a bien surpris ! Ce n'est pas un disque que j'écouterais forcément régulièrement ou vis-à-vis duquel je peux écrire un long commentaire réfléchi et constructif, mais cette musique électronique parfois ambiante, parfois dansante qui s'apparente souvent à une pop minimaliste est franchement très agréable à écouter et nous offre un petit moment de douceur et de réfléction qui fait du bien. Une découverte fort sympathique de la musique de Caribou !

Ce que je retiens : "You & I", "Home", "Like I Loved You".

Visions
7.2

Visions (2012)

Sortie : 31 janvier 2012 (France). New Wave, Abstract, Experimental

Album de Grimes

Keith Morrison a mis 8/10.

Annotation :

Score : 8.1

Ça faisait bien plus de 5 ans que je n'avais pas écouté cet album et "Miss Anthropocene" m'a donné envie de replonger dedans et de me rappeler une époque où les choses paraissaient plus simples et dans la musique de Grimes l'étaient. En terme de pop DIY, "Visions" reste une référence. C'est le résultat de plusieurs années de travail et de nombreux essais - matérialisés sous la forme de deux albums et un EP collaboratif - qui a donné un projet concis et qui ne ressemble à aucun autre. La vision - le jeu de mot n'était pas volontaire - de Grimes sur son troisième opus n'a jamais semblée aussi claire et bien réalisée. Elle mélange de façon presque incroyable des éléments qui ressemblent plus à des sons qu'à des notes de musiques, des sonorités électroniques et à l'influence sci-fi avec des thèmes plus personnels et plus humains. C'est étrange en surface mais une fois qu'on s'intéresse un peu plus aux intentions de l'artiste canadienne et à ses paroles, on sent qu'elle a utilisé ses productions robotiques pour dissimuler des choses très intimes et qui reflètent sa personnalité introvertie ("Be a Body"). "Visions" a permis d'immortaliser le génie de Grimes à l'époque où elle créait sa musique et laissait parler son imagination avec pas grand chose. On y trouve aussi deux des morceaux les plus marquants et représentatifs de la pop indie des années 2010 : "Oblivion" et "Genesis".

Ce que je retiens : "Genesis", "Symphonia IX" et "Oblivion"

Salvador
6.7

Salvador (2020)

Sortie : 14 février 2020 (France).

Album de Sega Bodega

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.6

Excentrique à souhait, "Salvador" propose un tas d'idées plutôt intéressantes qui fonctionnent plus ou moins bien. Il n'y a pas de doute sur le fait que nous sommes face à un album de producteur et ici Sega Bodega a laissé sa créativité s'exprimer comme bon lui semblait. C'est dès lors un carphanaüm mais quand les expérimentations décalées de l'artiste fonctionnent contre toute attente, elles fonctionnent vraiment ! Comme sur "U Suck" qui aurait pu rapidement dévier vers de la pure parodie mais révèle au final quelque chose de surprenant et d'inconventionnellement beau.

Ce que je retiens : "U Suck", "Salv Goes to Hollywood".

La vita nuova (EP)
6.7

La vita nuova (EP) (2020)

Sortie : 27 février 2020 (France).

EP de Redcar

Keith Morrison a mis 8/10.

Annotation :

Score : 8.5

Un EP, c'est le format parfait pour Christine and the Queens. J'ai toujours trouvé sa musique bonne mais je n'ai jamais été enchanté par ses albums sur lesquels j'avais 3 ou 4 gros coups de coeur mais restais assez indifférent vis-à-vis du reste, voir parfois même irrité par son côté théâtral. Ce qui est drôle, c'est que "La vita nuova" est probablement Chris dans sa théâtralité la plus forte, mais ça ne me gêne pas car c'est parfaitement assumé et exécuté, ça ne fait pas forcé ou surjoué et surtout la musique est excellente ! Sur ces 5 morceaux (et son court-métrage), la chanteuse rassemble toutes ses fortes dans un ensemble extrêmement cohérent et flamboyant. Elle nous offre ce qu'elle fait de mieux : des chansons mid-tempos mélos aux paroles auxquelles on s'identifie facilement ("People, I've been sad", "Mountains") et des extravagances pop assez dingues ("Je disparais dans tes bras", "Nada", "La vita nuova"). Le seul tout petit point noir, ce sont ses vocalismes et ad-libs parfois un peu trop forcés, notamment sur la piste titre qui est légèrement surchargée pendant les refrains. Mais à part ça, c'est de la pop parfaite et n'importe quel projet qui a Caroline Polachek qui chante en italien mérite d'être applaudi.

(à écouter : "People, I've been sad", "Nada", "Mountains")

YHLQMDLG
6.6

YHLQMDLG (2020)

Sortie : 29 février 2020 (France).

Album de Bad Bunny

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.5

Même si "YHLQMDLG" est bel et bien un disque de reggaeton qui fait honneur au genre et continue d'innover avec, Bad Bunny signe avec son second opus l'un des meilleurs albums de pop de l'année. "YHLQMDLG" est le genre de projet démesuré à la tracklist longue de 20 pistes sur lesquelles le chanteur et rappeur portoricain se permet toutes les excentricités les plus folles et les plus originales, qu'il s'agisse d'ouvrir son album sur des notes de synthés qui transforment le classique de "The Girl From Ipanema" en une mélodie de jeu vidéo old-school ("Si Veo a Tu Mamá"), de produire un morceau dont le beat et la production change sans cesse ("Safaera"), ou même juste de proposer un morceau de tropical house qui porte toujours une signature unique qui le rend très excitant ("Soliá"). Tous les ingrédients d'un album de pop avec un grand "A" sont là mais cela ne suffit pas pour l'artiste qui a besoin d'aller encore plus loin dans son ambition de présenter au monde entier l'héritage glorieux du reggaeton et de la latin trap, tout en cherchant à transformer ce paysage et le faire évoluer.

C'est ainsi qu'on retrouve sur "YHLQMDLG" des collaborations avec des géants du genre tels que Daddy Yankee, Jowell & Randy, Arcángel ou Ñengo Flow, et un morceau impressionnant que j'ai évoqué précédemment, "Safaera", qui rend hommage aux mixtapes de reggaeton. Bad Bunny expérimente aussi avec le genre pour le faire évoluer et en proposer sa version bien à lui, osée et courageuse, ce qu'un grand artiste de pop se doit d'être. Sur "Yo Perreo Sola", Benito Martinez écrit depuis la perspective d'une femme victime d'harcèlement lors d'une sortie en boîte de nuit, annonçant bien haut et bien fort "Te llama si te necesita/Pero por ahora está solita" ("Elle t'appellera si elle a besoin de toi/Mais pour l'instant elle est seule"). Sur "Vete" et "Ignorantes", il chante ses soucis amoureux et peines de cœur avec une transparence rare dans le milieu du rap latino masculin. Le tout est accompagné de productions extrêmement accrocheuses et qui ne ressemblent à celles de personne d'autre.

En nommant son second album "Yo hago lo que me da la gana" ("Je fais ce que je veux"), Bad Bunny nous avait prévenu que sa vision unique du reggaeton et de la pop allait enfin prendre toute son ampleur. Et bien qu'il continue à faire ce qu'il veut car le résultat est fantastique !

Ce que je retiens : "Safaera", "Vete", "Yo Perreo Sola".

Strange Seasons

Strange Seasons (2020)

Sortie : 24 janvier 2020 (France).

Album de Khushi

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.0

Protégé de James Blake, la comparaison entre la musique de Khushi et celle de son mentor prend pas mal de sens à l'écoute de ce premier album qui mélange de façon très subtile et délicate des reflets de musique électronique avec une sensibilité plus pop et folk qui permet d'apporter à "Strange Seasons" un côté humain et intime, ce qui fait son charme. Même s'il est facile de se perdre dans les différentes couches de production que Khushi surperpose avec un perfectionisme qui ressemble bien à celui d'un artiste qui a d'abord travaillé pour d'autres avant de se lancer en solitaire, ce premier album révèle une véritable douceur et donne l'impression que le chanteur s'adresse directement à nous, comme si le temps de quelques chansons nous partagions un moment avec lui, loin de tout. Et par moment pourtant, des sons nous rappellent que le monde extérieur existe bien, comme sur "Like a City", un morceau acoustique où à travers les yeux de l'artiste on observe une ville endormie, apaisée, apaisante et fantasmée avant d'être ramené à la réalité en douceur avec un bruit de métro qui démarre."Strange Seasons" est une petite escapade musicale, plus accessible que ce que Khushi a pu proposer jusqu'ici, tendre et rêveuse.

Ce que je retiens : "Like a City", "Coldhearted, Lately", "Sane Man".

Suga (EP)
6.4

Suga (EP) (2020)

Sortie : 5 mars 2020 (France).

EP de Megan Thee Stallion

Keith Morrison a mis 7/10.

Annotation :

Score : 7.4

Après un "Fever" prometteur mais légèrement inégal, Megan Thee Stallion passe la seconde, la troisième et même la quatrième avec un nouvel EP, "Suga", qui la voit démontrer ses talents de rappeuse et son ambition débordante sur des beats directs et puissants. Impossible de douter du flow de l'artiste américaine et de sa capacité à délivrer des punchlines percutantes tellement la passion et le dévouement de Megan Thee Stallion pour son art est palpable partout à travers "Suga". Quand elle rappe "It's a difference in the bitch who rap and the bitch who rap for real / I'm dedicated, this my passion in me, can't nobody take it" sur la piste d'ouverture de son EP, "Ain't Equal", on la croit car là où beaucoup de rappeuses américaines - et une australienne - qui ont percé ces dix dernières années se sont perdues dans des délires pop mainstream dès qu'elles ont eu un single dans le top 10 des charts US, Megan Thee Stallion reste fidèle et authentique au genre qu'elle aime tout en démontrant son envie de tester des choses nouvelles. Sur "Suga", l'artiste s'essaye à un hip-hop à l'influence old school sur "B.I.T.C.H." - un remake du "Ratha Be Ya N****" de Tupac - et s'aventure légèrement vers du R&B sur "Hit My Phone" ou "Crying in the Car", qui est en soi le seul raté du projet mais on lui excusera au vu de la qualité constante du reste des morceaux présents ici.

De façon plus évidente, "Suga" est surtout un EP qui confirme Megan Thee Stallion comme une faiseuse de tubes, ce qui explique l'aspect plus instantané du projet comparé à "Fever" et "Tina Snow". Si "Savage" et "Captain Hook" enflamment actuellement les charts américains, il ne fait aucun doute que "Hit My Phone" ou une version longue de "Rich" pourront leur emboîter le pas facilement. Après une année 2019 très prometteuse, "Suga" finit d'enfoncer le clou pour Megan Thee Stallion et l'affirme comme une rappeuse féroce mais qui réussit à rester authentique tout en signant des tubes redoutables et en expérimentant légèrement avec sa musique afin de ne pas se lasser - et ne pas lasser. Ça fait franchement plaisir de voir un tel talent émerger sur la scène hip-hop et continuer de confirmer tout le bon qu'on pense d'elle ! Si elle continue dans cette voie, son premier album pourrait se révéler impressionnant.

(à écouter : "B.I.T.C.H.", "Rich", "Savage")

Chilombo
6.8

Chilombo (2020)

Sortie : 6 mars 2020 (France).

Album de Jhené Aiko

Keith Morrison a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Score : 8.0

Je pourrais chanter les louanges de "Trip", le troisième album de Jhené Aiko sorti en 2017, toute la journée. C'était un album extrêmement ambitieux qui voyait la chanteuse de "The Worst" se transformer en une artiste vraiment à part dans le paysage R&B actuel. Un grand nombre des meilleures chansons de Jhené Aiko se trouvent sur ce projet conceptuel qui était un beau bazar de 22 pistes mais qui restait impressionnant malgré les plusieurs temps morts. Et pourtant, même si j'aime cet album profondément, je crois que je dois déclarer "Chilombo" comme étant le meilleur album de l'artiste californienne. C'est de très loin son plus abouti et son plus cohésif. J'ai tendance à prendre peur quand je vois une tracklist longue de 20 pistes, mais sur ce disque cela passe étrangement très TRÈS bien. Bien sûr, un album de 15 titres serait probablement plus efficace et tout n'est pas essentiel ici et se répète un peu mais plus j'y réfléchi, moins je vois quels morceaux pourraient être supprimés de cet album. Et ça en soi, c'est un énorme accomplissement.

Là où "Trip" voyait Jhené Aiko faire le deuil du décès de son frère, à travers des relations sans lendemain, des expériences avec différentes drogues et de gros bad trips avant de retrouver une certaine sérénité, "Chilombo" voit la chanteuse faire le deuil d'une relation. L'album en est donc plus léger et beaucoup plus lumineux, ce qui est franchement agréable. Même si elle y explore la déception amoureuse ("One Way St.", une collaboration fantastique avec Ab-Soul) et une certaine colère ("Triggered", "None Of Your Concern"), "Chilombo" contient certains des morceaux les plus décomplexés et funs de la discographie de Jhené Aiko : "Tryna Smoke", "B.S.", "P*$$Y Fairy (OTW)" ou "H.O.E. (Happiness Over Everything)", qui sample une chanson de sa mixtape pré-"The Worst". "Chilombo" révèle aussi une Jhené Aiko apaisée et pleine d'espoir, nous offrant de beaux moments pleins de lumière ("Speak", "10k Hours", "Magic Hour") qui nous donnent juste envie de se poser et d'apprécier la vie le temps d'un album.

(à écouter : "10k Hours", "One Way St.", "Tryna Smoke")

A Written Testimony
6.8

A Written Testimony (2020)

Sortie : 13 mars 2020 (France).

Album de Jay Electronica

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.2

"A Written Testimony" est un album intéressant et admirable à pas mal de niveaux. D'un point de vue collaboratif dans un premier temps, car il s'agit d'un projet partagé avec JAY-Z et l'alchimie entre Hov et Jay Electronica fonctionne très bien. Lyriquement également, les deux rappeurs prouvant qu'ils sont deux des meilleurs poètes du hip-hop toujours vivants même si ayant des styles d'écriture très différents. Et musicalement, les productions étant satisfaisantes et révélant des idées et détails intéressants - la performance de The-Dream sur deux morceaux de cet album est notamment mémorable. Pour moi, l'atout principal de "A Written Testimony" c'est JAY-Z. On peut lancer tout un débat sur qui a le meilleur flow, qui est le meilleur lyriciste, etc. Mais si on en lance un sur "qui est le plus en forme ici", Hov gagne directement. Ça faisait longtemps que je n'avais pas senti un telle passion dans sa voix, dans son flow et dans ses textes et ça, ça fait très plaisir.

Bon, maintenant que j'ai fait tous ces compliments à l'album vous voulez sûrement que j'explique ma note assez basse de 6 ? Déjà, je vais blâmer le mixage qui est vraiment mauvais sur "A Written Testimony", et cela dessert radicalement les productions qui sont intéressantes mais dans lesquelles on ne peut pas se plonger car elles n'ont tout simplement aucune profondeur tellement le mixage est raté. C'est un gros point noir pour moi car cela rend l'écoute de l'album difficile. Et une autre raison pour ce 6 c'est que malgré les bons côtés de cette collaboration, elle n'offre rien de mémorable. Je n'avais pas apprécie "4:44" mais il y a quand même des morceaux qui m'ont marqué sur cet album. Ici, malheureusement, aucun ne m'a laissé un souvenir particulièrement marquant et c'est à mes yeux la preuve que cette collaboration, même si elle est réjouissante, n'a pas porté ses fruits. (mais le mixage reste le pire aspect de cet album... quel enfer.)

Ce que je retiens : les deux morceaux avec The-Dream, "Shiny Suit Theory" et "Ezekiel's Wheel", qui est la seule chose dont je me rappelle de cet album.

color theory
6.9

color theory (2020)

Sortie : 28 février 2020 (France). Indie Rock

Album de Soccer Mommy

Keith Morrison a mis 6/10.

Annotation :

Score : 6.7

Chaque année, il y a toujours un ou deux albums que j'écoute un certain nombre de fois, auxquels je reconnais de nombreuses qualités mais que je souhaiterais aimer beaucoup plus que je ne les apprécie réellement. "color theory" est un de ces albums. Les textes de Soccer Mommy sont, à mes yeux, la véritable force de ce projet. Ils sont honnêtes, ils sont directs et il y a toujours une petite touche d'humour ou d'originalité rafraîchissante qui permet de rendre certaines de ces chansons aux sujets assez lourds (la dépression, surtout) plus légères, moins difficiles à écouter. Je reconnais aussi que "color theory" est bien produit, que la jeune artiste de Nashville a réussi à créer un son à elle même s'il est très inspiré par le rock américain de la seconde moitée des années 90 et du début des années 2000, ce qui montre une certaine expertise musicale.

En vrai, c'est plaisant et c'est nostalgique avec de bons textes auxquels on peut s'identifier facilement, donc en principe c'est quelque chose qui pourrait facilement me correspondre. Mais je n'arrive tout simplement pas à rentrer dedans. Après les trois premiers morceaux, je trouve que l'album devient vite répétitif et lassant. Sur la seconde moitié de "color theory", et une fois qu'on s'est habitué à ce rock qui nous rappelle les films d'ados un peu rebelles de cette époque bénie qu'étaient les années 2000, aucun morceau ne vient vraiment proposer quelque chose de nouveau et du coup je trouve que Soccer Mommy nous perd un peu et ses bons textes ne sont plus suffisant pour pouvoir porter l'album. Je continuerai à l'écouter, très probablement, car il y a quelque chose ici qui me dit que c'est un album qui pourrait se révéler à moi plus tard... on verra bien !

Ce que je retiens : "circle the drain", "night swimming", "bloodstream".

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