Built To Spill : les meilleurs morceaux

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Else est tout simplement une de mes chansons préférées de tous les temps. C'est difficile de faire porter un tel poids sur une chanson, car c'est le moyen idéal pour émousser la magie d'une musique qui, un jour, nous a touché en plein cœur, à tout jamais, mais qui ne pourra jamais recréer cela avec une telle netteté ni une telle intensité. Mais Else restera pour toujours, les émotions sont différentes, sans doute, rien ne ressemble à la première fois, mais elles sont encore là, et il suffit d'un petit truc, d'un moment particulier, pour que cette mélodie sublime et ces notes mirifiques de guitare me transpercent à nouveau avec toute leur acuité et toute leur force pour que je me retrouve en train de chialer, le cœur et l'esprit lourds d'une nostalgie étrange et émouvante.

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Things Fall Apart apportait la tragédie funèbre, Tomorrow transfuse l'énergie du désespoir, et déboule telle une incandescente fuite en avant, où la mélodie semble inexistante, constamment broyée par une urgence, une fureur déchirante, humaine, débordante de vie. Bref, Tomorrow est le plus grand final d'album que le groupe ait jamais composé, et sans doute son meilleur morceau tout court. J'ai parfois du mal à accrocher à la formule de la chanson à rallonge qui vire au maelstrom de guitares déchaînées mais il faut avouer que Built To Spill a réussi à peaufiner ses effets pour atteindre la perfection avec Tomorrow et ainsi livrer la version absolument ultime de son morceau épique, envoûtant, furieux, viscéral, le transcendant avec des vagues de guitares cisaillant plus que jamais l'atmosphère, à grands coups de larsen fabuleusement mélodiques. Tomorrow est un climax continu de près de huit minutes, une orgie sonore tétanisante que l'on aimerait sans fin.

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Ce morceau fait partie de certaines éditions de There Is No Enemy (et est également sorti en single). Je ne comprends pas pourquoi il n'a pas été intégré d'office à l'album, tant il en perpétue la magie, la mélancolie et la beauté onirique totalement hallucinatoire. A tel point, que Water Sleepers fait partie des rares morceaux capables de me tirer des larmes : comment rester insensible, notamment en entendant ce solo de guitare en apesanteur qui conclut le morceau, ces notes si belles, si douces et si aériennes... Et ce son venu d'un autre temps, d'un autre univers ! Finalement, c'est vrai que cette chanson est tellement à part, hors de tout, qu'elle n'aurait peut-être pas eu la lumière qu'elle méritait au milieu des autres merveilles de There Is No Enemy. Built To Spill a tout simplement touché la grâce.

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Built To Spill enchaîne les classiques instantanés comme si de rien n'était. Après deux morceaux rock parfaits en guise d'introduction et de mise en bouche à Keep It Like a Secret, le groupe prend encore une autre dimension avec Carry The Zero, définition absolue de la chanson rock planante, où le lyrisme de la mélodie le dispute au souffle euphorisant des guitares qui achèvent le morceau dans un tourbillon sonore. Ce qui fait merveille sur cette chanson, c'est le fait que le groupe ne sacrifie à aucun moment ni la beauté et la finesse de la mélodie, magnifique à en pleurer, ni l'électricité crépitante des guitares. Built To Spill est le seul groupe qui arrive à marier avec autant de maîtrise ce qui fait que j'aime tant la pop et le rock, la mélodie et la puissance brute.

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The Plan est la chanson rock ultime de Built To Spill. Ces 3:29 sont juste parfaites et représentent tout ce que ce groupe a de génial. Elles réunissent les ingrédients d'un indie rock complètement fou et novateur, dingue, visionnaire, si puissant et intense en si peu de temps que le résultat est à la fois viscéral et décoiffant. Je suis vraiment fasciné par le talent de composition de Built To Spill, comment condenser dans un format si court autant d'émotions, autant d'atmosphères et renvoyer tous les autres groupes rock à leurs études, aussi bien sur l'énergie dégagée que sur la sincérité et les sentiments si forts que cette musique transmet. On s'envole dès les premières secondes, avec ce pouvoir si caractéristique du groupe à empiler des riffs de guitare saturés tout en créant une musique carrément planante et euphorique, dévastatrice, qui n'en finit plus de rebondir dans tous les sens, enchaînant les breaks toutes les trente secondes pour mieux nous transporter dans un autre univers...

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Le final de There Is No Enemy est tout simplement le meilleur passage de toute la discographie de Built To Spill, et pourtant dieu sait si le répertoire du groupe contient des merveilles et des albums de gros calibre. Mais je ne me remets toujours pas de l'enchaînement Things Fall Apart / Tomorrow. Le premier est un titre sublime, lent, désespéré, à la mélancolie déchirante, d'une noirceur pesante et pourtant si beau. On a envie de se noyer dans ce désespoir, couler avec ces arpèges si calmes, cette mélodie abattue, et ces notes d'orgue funèbres qui semblent n'en plus finir, si n'est lors d'une accélération fulgurante, fugace décharge d'énergie (du désespoir) qui échoue à tirer le morceau de sa léthargie inéluctable et tétanisante.

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Que dire ? Encore une chanson rock parfaite de concision et d'efficacité, dont le riff élastique et la structure en forme de montagne russe ne cesse d'enthousiasmer. Center Of The Universe forme avec The Plan un duo indissociable. En deux chansons Built To Spill met tout le monde d'accord, toujours avec cette capacité à créer un mille feuilles sonore follement ambitieux et pourtant si bref, si définitif. Après les longs morceaux du précédent album, le groupe revient à une musique beaucoup plus concise mais sans rien perdre des structures azimutées qui le caractérise. Les idées que le groupe développait en cinq ou six minutes se retrouvent condensées en trois minutes. C'est tout simplement ébouriffant.

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Une fois que l'on s'est pris une claque avec The Plan, que l'on a été shooté par Center Of The Universe et décollé d'émerveillement avec Else, le reste de Keep It Like A Secret peut s'exprimer. On se prend alors une mandale par Sidewalk, Bad Light nous retourne le cerveau, et surtout, surtout on reste cloué devant You Were Right et sa grandeur désenchantée qui culmine à une hauteur stratosphérique au rayon des morceaux épiquement émouvants de Built To Spill. La beauté désabusée de la mélodie prend aux tripes, et le fond sonore, mâtiné de guitares électriques, de solos épileptiques, de slide lancinante et de notes lumineuses ne font que renforcer l'aura sublimement mélancolique de la chanson. Ou comment fusionner le désespoir et l'énergie la plus optimiste et absolue. C'est ici que se situe le pouvoir de la musique de Built To Spill, le groupe ne s'enferme jamais dans une mélancolie naïve ou simplette car la musique est tellement intense, puissante et bourrée d'énergie qu'elle transcende les émotions que l'on ressent en l'écoutant, on ressent une sorte de bonheur positif qui dépasse l'accablement et la tristesse lumineuse qui transpirent des chansons du groupe. Keep It Like A Secret est un album qui t'enfonce si tu le souhaites, mais qui t'aide par dessus tout à retrouver la force de te relever... Il ne te laisse pas au bord de la route, comme une sombre merde, en train de déprimer sur une mélodie si émouvante qu'elle te troue l'esprit.

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Aisle 13 est un titre qui ne paye pas de mine mais qui véhicule une atmosphère incroyable. On est loin des structures renversantes qui ont fondé le génie de Built To Spill, le morceau est même pépère, mais il incarne l'essence de There Is No Enemy, avec sa tranquillité sereine, sa mélodie paisible, et ses guitares apaisées mais non moins électriques, notamment avec des envolées tranchantes, des accords soigneusement disséminés et un riff qui agit comme un ressac sonore. On ne dirait pas comme cela, mais cette chanson est une merveille de production, le son est carrément génial. Built To Spill demeure un groupe de magiciens, des artistes de la composition, des arrangements, de l'enregistrement, des effets qui tuent, mais tout en conservant une sensibilité sur le fil qui fait tout la richesse du groupe. Aisle 13 n'est peut-être pas une chanson parfaite mais rien que pour ce qu'elle symbolise et les émotions que je ressens à chaque fois que j'entends cette musique en introduction du disque, je ne peux m'empêcher d'être généreux.

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Hindsight forme une paire indissociable avec Aisle 13. Ces deux morceaux plantent le décor de There Is No Enemy, avec leur ambiance éthérée, calme mais parcourue de soubresauts électriques d'une voluptueuse mélancolie. La beauté tranquille de ce morceau me sidère à chaque fois.

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Gone est sans doute le titre le plus abouti de You In Reverse. Pour une fois, aucune digression ne vient atténuer la structure de la chanson, qui est tiraillée entre une mélodie lumineuse et des solos intenses. Mais ce qui cloue sur place, c'est le final tétanisant, avec son orgue fantomatique qui tourne en boucle pour mieux nous happer et rendre le morceau définitivement mémorable... Non, mais cet orgue, c'est d'une simplicité absolue mais c'est du génie à l'état pur. Dommage que la fascination se dissipe une fois l'effet de surprise passé.

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Now and Then est un morceau présent sur l'EP de Carry The Zero et sur le single de Center of the Universe, autrement dit du matos de très haut niveau de l'époque Keep It Like A Secret, et c'est aussi un trésor qui aurait mérité de figurer sur un véritable album, car ce titre est fantastique. Il aurait très certainement dénaturé au milieu de l'orgie électrique de Keep It Like A Secret, mais il aurait apporté une touche de luminosité onirique. D'une certaine manière, Now and Then annonce There Is No Enemy avec dix ans d'avance, notamment avec sa mélodie douce, son orgue vaporeux, et surtout sa seconde partie en apesanteur, belle à en pleurer, déchirante. J'adore quand le groupe s'aventure dans ces contrées, il est capable de créer des architectures et des couches de guitare très complexes, et en même temps de composer des choses d'une simplicité désarmante, quelques notes disséminées avec soin et surtout avec un feeling si précis, si intense et tendu, suffisant à créer une atmosphère gorgée d'émotion. On n'est pas au même niveau de production que There Is No Enemy, le son est un peu plus brut, mais le résultat n'en est pas moins sublime, avec ce sens de la mélodie foudroyante propre à Built To Spill.

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Moment qui tue : quand la mélodie, déjà sublime à la base, s'envole vers la fin pour atteindre des sommets de beauté conquérante et d'énergie béate qui donne plus que jamais envie d'aimer Built To Spill. Made-Up Dreams est sans conteste le meilleur morceau de Perfect From Now On, la complexité de sa structure mélodique n'a d'égale que sa subtilité et la fluidité naturelle qui découle à l'écoute du morceau. La formule que Built To Spill a cherché à mettre au point sur leur album est ici à son paroxysme, sans passage superflu, sans fioritures, sans break trop visible, sans guitare trop envahissante, juste avec une mélodie unique qui évolue au fil de la chanson, comme si elle mutait, se développait, florissait et explosait en laissant au final exprimer toute son énergie et sa vitalité.

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Moment qui tue : la structure entière de la chanson, incroyable montée en puissance qui n'en finit plus d'atteindre les cimes du rock épileptique et foudroyant, bardé de guitares tourbillonnantes, imposant à elle toute seule le modèle ultime du morceau épique à la Built To Spill. Pas forcément le moule que je préfère (j'adore encore plus les formats courts, pop, mais non moins intenses dont le groupe est capable) mais Velvet Waltz est la référence dans le domaine et tout de même une grosse claque.

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Bad Light est une chanson qui évolue par à coup. En fait c'est typiquement le genre de morceau qui peut paraître inaperçu au milieu de la profusion et de l'orgie sonore de Keep It Like A Secret, surtout au premier abord. Contrairement aux autres titres, la structure semble ici plus facile et assimilable, la dichotomie entre les passages à la guitare un peu calmes et aériens et le chant qui répète les mêmes paroles est assez évidente. Mais sans prévenir, aux deux tiers du morceau, les choses s'accélèrent et partent dans tous les sens, on ne sait plus où donner de la tête avec un chant qui s'emballe et des guitares qui envoient des accords et des riffs à la face du pauvre auditeur qui en prend plein la tronche, et ne peut s'empêcher d'avoir la banane en écoutant la dynamique irrésistible ("it's so hard to read in bad light") qui transforme le morceau en truc entêtant, envoutant et tout simplement mémorable.

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Ce qui me retourne le cerveau dans ce morceau c'est le break dévastateur. Alors que la chanson semble avoir la tête dans le guidon, et être ainsi légèrement moins accrocheuse que les phénoménaux titres précédents de Keep It Like a Secret, elle se brise de manière soudaine et inattendue, avec tant d'intensité qu'elle confine au génie en l'espace d'une seconde. Juste à ce moment précis, au moment où le rythme se fracasse en deux, c'est toute la puissance de la musique de Built To Spill qui surgit. La production du disque et le son des guitares sont juste énormes, dantesques, épiques : la batterie est monstrueuse et alors que dire des guitares qui tronçonnent littéralement le spectre sonore. Ce passage, entre 1:40 et 2:20, soit quarante petites secondes est ce qui résume, pas à lui seul, mais quand même, à quel point Keep It Like A Secret est un album hors norme, qui plane largement au-dessus de la production indie rock de ces vingt dernières années. Rien ne ressemble à ça, c'est tout simplement un des meilleurs moments rock qui ait été gravé sur galette. Non mais qui arrive à sonner comme ça, à part Built To Spill ?

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Strange incarne à lui seul Ancient Melodies of the Future, avec son ambiance massive et étrangement électronique, alors même que ce sont sans doute des guitares qui sont à l'origine de ce son si organique (j'ai toujours du mal à deviner si on doit ce genre de son à un clavier ou à une guitare dont on aurait triturer la texture). Après Keep It Like A Secret et son rock ascensionnel, le changement est de taille, mais finalement la puissance du groupe est toujours là, Strange tire même sa force de sa structure assez simple, une sorte de retour aux basiques, le tout avec une densité sonore ahurissante et carrément impressionnante qui ne cesse de fasciner. Un morceau rock au son venu du futur.

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Time Trap est une chanson qui brouille les pistes, mais c'est en même temps si caractéristique de la démarche de Built To Spill. Alors que le début calme et ses arpèges laisse présager un morceau sublime et désenchanté, les guitares rageuses prennent le dessus de manière progressive, avant de couper net leur élan et laisser en effet la place à une mélodie mélancolique, un brin désabusée, qui va si bien à la voix si particulière de Doug Martsch, pour une chanson qui s'inscrit dans la veine de Carry The Zero, en légèrement moins aérienne et culte. Mais c'est sans compter sur les accélérations qui semblent faire s'envoler de nouveau la musique vers un final en roue libre. Le groupe condense tellement d'idées dans ses chansons que ces dernières semblent durer deux fois moins longtemps que leur longueur normale. Time Trap en est l'exemple parfait.

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Moment qui tue : la progression mélodique mirifique qui finit par s'adoucir et semble s'achever paisiblement alors que la chanson rebondit et se relance pour un final en roue libre avec une rythmique et des guitares qui pulsent. Encore un grand moment de construction rock.

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Goin' Against Your Mind résume à lui seul le contenu de You In Reverse, à savoir que Built To Spill semble renouer avec des inspirations plus classiques, plus frontales, délaissant les structures explosives et percutées des précédents disques (excepté Ancient Melodies Of The Future). Alors, oui, Goin' Against Your Mind est long et possède tous les ingrédients du morceau terrassant mais son riff marteau piqueur et sa progression restent plutôt bas du front et brut de décoffrage pour du Built To Spill. Malgré tout, ça reste génial, et tenir avec si peu durant plus de huit minutes sans que l'on voit passer le temps témoigne de l'énergie inégalable du groupe. Et puis ces envolées à la guitare... C'est ça, Built To Spill (et plus particulièrement sur You In Reverse) : quand on pense avoir affaire à un morceau plus basique, des fulgurances sonores et mélodiques viennent nous rappeler que l'on écoute Built To Spill, le groupe d'indie rock le plus original et le plus attachant de ces vingt dernières années.

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Moment qui tue : la transition intersidérale au milieu du morceau qui le projette dans une autre dimension, un univers cosmique électrique, euphorisant, planant, inquiétant, mystérieux, monstrueusement beau et onirique, où les entrelacs de guitare foudroyante montrent une nouvelle fois la maîtrise technique et mélodique des architectes sonores que sont Built To Spill. Et pourtant le meilleur est à venir.

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Broken Chairs a pour seul défaut de constituer la marotte de Built To Spill, à savoir le long morceau homérique, bourré de solos de guitare, qui vire au tourbillon électrique, au bordel sonique instable mais hautement jouissif. C'est certainement le morceau le moins surprenant de Keep It Like A Secret, car ce n'est "qu'une" longue mais imparable progression dans le bruit et la fureur. Le groupe a déjà servi cela sur les disques précédents, notamment sur Perfect From Now On. N'empêche ça envoie du bois, et ça troue le cul. C'est maîtrisé à la perfection, et la progression est fatale, ça monte, ça monte et ça n'arrête plus, entre les guitares plaintives, qui pleurent toutes les larmes de leurs corps, et les notes de piano qui émergent de temps à autre du foutoir, on a droit à un copieux morceau qui achève le disque avec grandeur, sans faiblir, en laissant un goût doux amer dans la bouche. Je n'aime pas employer les termes "épique", "lyrique" et autres trucs dans le genre pour qualifier la musique de Built To Spill, car ces mots sont souvent mal perçus et connotés de manière négative, notamment pour qualifier la musique de groupes pompeux, voire prétentieux (les deux allant souvent de paire). Or, la musique de Built To Spill est tellement brute, sincère et passionnée qu'elle est n'a rien à voir avec tout cela, mais pourtant je ne vois pas d'autres mots, la musique de ce groupe est épique, lyrique, émouvante, tellement elle est belle, intense, et vraie.

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Moment qui tue : un peu comme I Would Hurt a Fly, une introduction instrumentale lente, mélodique et mystérieuse, mais le break amène une évolution intéressante vers un morceau plus punchy, à la rythmique emballante avant de laisser la place à un final d'une fluidité désarmante. Tout cela en six minutes qui en paraissent trois.

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J'aime ce morceau pour le miracle qu'il arrive à opérer, à savoir flirter avec la mièvrerie sans jamais y tomber. On est tellement loin des mélodies sophistiquées que Built To Spill s'est échiné à façonner pendant plus de 15 ans ! Ici, tout est simple, voire dépouillé, et la mélancolie est très appuyée mais tout est si doux, si beau, sans arrière pensée, et un petit solo en apesanteur au milieu du morceau suffit pour illuminer l'atmosphère et nous transporter dans une autre galaxie.

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Je trouve que la plupart des titres de There Is No Enemy sont des petits miracles constants (et c'est pour cela que la plupart des titres de cet album sont dans cette liste). Je m'explique : aucun de ces titres ne peut rivaliser intrinsèquement avec le génie architectural des morceaux les plus fous et dévastateurs du groupe dans ses "jeunes années" (jusqu'à Keep It Like A Secret). Pourtant, la magie, l'ambiance, les émotions que le groupe arrive à insuffler à sa musique transportent les morceaux de There Is No Enemy à des hauteurs stratosphériques. Good Ol' Boredom, sous ses airs de cavalcade linéaire, bénéficie également de cet univers sonore onirique, de cette ambiance évanescente qui nous berce avec une douce violence attendrissante.

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Moment qui tue : le final mirifique qui semble utiliser une sorte d'enregistrement de bandes inversées, ou alors le groupe a réussi à faire naturellement ce que les Beatles ont conceptualisé sur leurs magnétos 35 ans plus tôt. Quoi qu'il en soit c'est magnifique, et pour une fois bien utilisé, et justifié pour sublimer la mélodie si pure du morceau, tellement pure que l'introduction acoustique est d'un dépouillement touchant. Mais ça c'est avant que la machine s'emballe petit à petit et nous achève en roue libre pour un des meilleurs titres de clôture d'album de la discographie de Built To Spill (même si rien ne peut battre Tomorrow).

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Alarmed est une nouvelle démonstration du talent d'architecte sonore de Built To Spill, et finalement une des seules prouesses dans le genre sur l'album Ancient Melodies of the Future. La formule est connue mais ici particulièrement bien exécutée car la mélodie d'introduction est sublime de mélancolie, et la transition vers la seconde partie dévastatrice est parfaitement amenée, on sent parfaitement l'évolution naturelle de la mélodie qui se conclue par un déluge de guitare fracassées qui profitent, ici, du son si particulier de l'album, si puissant, organique, strident et démentiel, presque robotique.

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Moment qui tue : surtout le début du morceau en fait, façon western indie rock aride, strié de mélodies lancinantes, portées par le chant et une section de cordes qui pourrait paraître déplacée dans un tel univers mais qui est totalement justifiée tant elle participe à merveille à l'ambiance lumineusement désespérée de l'ensemble. J'ai quand même hésité à intégrer ce morceau dans la liste car je suis un peu moins fan du final en mode vengeur et déluge de décibels. Même si le procédé est commun sur l'album, il me paraît moins bien amené sur I Would Hurt a Fly. A ce compte-là, j'aurais pu mettre tous les titres de Perfect From Now On (mais ça c'est le problème de la plupart des albums de Built To Spill : il faut faire un choix ou bien tout mettre). Enfin bref, la première partie de I Would Hurt a Fly est si singulière, que le morceau mérite sa place ici.

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Ce n'est pas le morceau le plus foudroyant de There Is No Enemy et pourtant même au cœur du titre qui paraît le plus immédiat et le moins secret se dissimulent des trésors, des détails, des merveilles de production et de composition, comme ces accords de guitare rapides, ces notes au diapason de la mélodie du chant et toutes ces petites envolées au second plan qui confèrent à Planting Seeds une dynamique irrésistiblement attachante. Le morceau rock parfait pour un album aussi doux et mélancolique que There Is No Enemy.

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Comme d'habitude chez Built To Spill, les morceaux d'introduction donnent le ton au reste de l'album, ou essaient au moins de foutre une petite claque d'entrée, et All Our Songs ne déroge pas à la règle. Si la mélodie n'est pas forcément la meilleure ou la plus entêtante que le groupe ait produit jusque-là, la dynamique générale est toujours aussi bien fichue. J'adore l'impression de puissance progressive qui se dégage de l'ensemble au fur et à mesure que la chanson s'approche de sa conclusion. All Our Songs est sans doute le meilleur titre de Untethered Moon et n'a pas à rougir face aux plus belles réussites de Built To Spill.