Thimbleweed Park
7.1
Thimbleweed Park

Jeu de Terrible Toybox (2017PC)

Thimbleweed Park ? Il dépote celui-là, y a du Pixel et on se marre.

En v’là un jeu qui fleure bon la nostalgie, il y a comme des relents de mélancolie, réminiscences des nombreuses heures passées devant un écran à peine plus grand que nos tablettes (bon, les grosses tablettes quand même), à résoudre des énigmes plus loufoques les unes que les autres et en faisant évoluer des personnages recouverts du Pixel qui tâche … On pourrait avoir des remontées gastro-ludique et ne pas ou ne plus aimer la bonne vieille tambouille LucasArtienne (car il s’agit bien de ça), et pourtant … Il faut l’avouer, la mayonnaise prend, le soufflé gonfle, le croque-monsieur croustille … (choisissez votre métaphore culinaire).


Allez, je me mets à table.


Ron Gilbert revient à la source et ne démérite pas, après avoir bénéficié de la contribution de joueurs en mal de plaisir vidéo-ludique rétro, la campagne Kickstarter lui permet de mettre en route son projet indé et quel projet, remettre les couverts pour un bon vieux Point n’ Click, fallait oser et pouvoir car ce n’est pas vraiment ce à quoi l’industrie du jeu nous a habitués ces dernières années. Merci aux productions indés.


Bon enfin, pour ce coup-là, les « backers » sont au rendez-vous, avec plus de 600 000 $. Y a de quoi s’offrir du bon café et les petits chocolats qui vont avec … il faut le reconnaître, le café stimule la créativité et le chocolat, quoiqu’en on dise, ça met de bonne humeur. Bref, Ron se met au travail avec énergie et dans la joie avec son pote Gary Winnick pour nous sortir une galette bien chaude en 2017 (je fais beaucoup de métaphores culinaires quand même), et le résultat n’a rien à envier à ses précédents jeux.


On dépoussière le bon vieux moteur SCUMM (créé par Ron lui-même), on ressort la bonne vieille interface Point n’ Click et on respecte les « canons » du genre. N’oublions pas que Mr Ron fut à la conception et à l’écriture des « Maniac Mansion », « The Secret of Monkey Island » et « Monkey Island 2, Chuck’s Revenge » mais a également écrit « Zak McKraken and the Alien Mindbenders », «Indiana Jones and the Last Crusade : The Graphic Adventure » et «Day of the Tentacle », il a largement contribué au genre, il connaît son affaire le bonhomme et pour cet Opus, il n’a rien oublié de son savoir-faire. On se réjouit …


Bien sûr, les amateurs de Jeux à la 3D qui dépote aux cartes surdimensionnées ne seront, peut-être, pas dans leur univers mais pour peu qu’ils daignent faire le premier pas (c’est celui-là qui compte), ils apprécieront sûrement les qualités de cette aventure ludique étrange (pour le moins), rafraîchissante (oui c’est original pas besoin d’être un Rétro-Gamer chevronné pour apprécier les bonnes choses, ici les bonnes idées en l’occurrence et elles sont légion) mais surtout passionnante, distrayante et amusante (et là, c’est copieux, on est bien servi).


Et des qualités il y en a … Je ne tiens pas à en faire une liste exhaustive ou propager la bonne parole mais seulement donner quelques impressions en vrac sur un jeu qui sous un habillage « PixelArt trentenaire » (amélioré quand même) a plus à dire que son allure pour peu qu’on lui donne sa chance.


D’abord, les amateurs du genre seront en terrain familier, l’interface est classique, la prise en main immédiate, pas de lézard c’est du Point n’ Click en bonne et due forme. Verbe + Objet = Possibilité d’action. A ce titre, pour profiter pleinement du jeu, il ne faut pas hésiter à essayer certaines combinaisons « absurdes » voire « débiles », c’est souvent payant et souvent amusant. Ceux qui savent, je veux dire ceux qui ont épuisés leur « souris » sur les jeux LucasArts (et notamment quand Ron les a écrit), comprendront vite qu’il n’y a pas toujours de logique dans les actions à mener. Même si cela reste cohérent d’un point de vue narration, c’est parfois saugrenu voire surréaliste et on aime ça. Débile ? Non, il faut être ouvert d’esprit.


En parlant d'esprit, celui un peu barré et tortueux des responsables (Ron et Gary) n’a pas chômé et a même surchauffé mais ils ont bien dû se marrer. Le résultat provoque souvent le sourire et parfois même le rire. Les joueurs en quête d’originalité, d’énigmes incongrues et de dialogues farfelus, bidonnants voire orduriers ne seront pas déçus. Sur ce dernier point, Ransome le clown, le meilleur personnage du jeu à mon sens, ne mâche pas ses mots, il en lâche de « belles » et remporte le pompon du manège, les oreilles chastes n’aimeront pas. Mais heureusement quand ça devient un peu « GRAS », un « bip ! » salvateur masque la vanne, ce qui a pour effet d’imaginer pire encore … Quand ce Clown parle, essayer de ne pas rire est une gageure, en tout cas sourire est le minimum garantie.


Sinon en terme d’action, c’est « kif-kif », par exemple ramasser des pixels sur le sol pendant une bonne partie du jeu sans savoir à quoi ça sert, manger un Hot Dog et partir dégueuler juste après ou donner du Pop-Corn à son rat domestique parcequ’il ne tolère pas le lactose, ça fait « au moins » sourire.


Pour revenir aux personnages, l’aventure se partage avec 5 individus qui deviennent vite attachants au fil de l’histoire. Les agents du FBI, Ray et Reyes (clones évidents de Scully et Mulder) chargés de l’enquête sur le meurtre, Delores, la « Geekette de service », douce, mignonne et programmeuse à ses heures, Franklin le papa timoré, peureux et spectral (vous comprendrez en jouant) et l’inénarrable Ransome, le Clown maudit et ordurier sont tous jouables et ont des personnalités bien différentes, ce qui engendre parfois des problèmes de communication et des situations cocasses et on se marre … Encore …


En tout cas, tout ce beau monde a un rôle à tenir et va se croiser au fil de l’enquête mais également rencontrer d’autres personnages (PNJ(s)) pour la plupart fissurés de la cafetière (je pense aux « frères pigeons » à qui il manque clairement un grain ou à Doug le jardinier qui fait des trous partout avec sa pelle sans raison, pas net le gars). Un constat évident, en incarnant ce quintet de personnages, tous un peu fous quand même et aux caractères bien définis, on ne s’ennuie pas et c’est bien là l’intérêt.


Ils vont évoluer dans univers bien pensé avec des décors détaillés et colorés. Du Pixel oui mais du Pixel amélioré avec de jolis dégradés et quelques effets de lumières, l’ensemble ne pique pas les yeux, un visuel agréable à parcourir ... Le tout est accompagné d’une musique, parfois redondante si l’écoute est prolongée mais pas désagréable voire franchement écoutable pour certains thèmes. Pour ceux qui seraient tentés par la B.O : « Thimbleweed Opener », « Trailer variations », « Hotel Elevator » et « Quickie Pal » se réécoutent avec plaisir, pas au point de devenir sourd mais c’est plutôt bon.


Bien sûr, les références foisonnent (Ron et Gary assument leur Geekitude), le jeu est un hommage à la Pop Culture des années 80 et 90. Ambiance mystérieuse, atmosphère étrange, personnages énigmatiques et évènements inexplicables empruntent à Twin Peaks, X-Files et la Quatrième Dimension. Certains gags et traits d’humour n’auraient pas été reniés par les Monty Python. On croise même un Fan de Star Trek et j’en passe …Et Maniac Mansion, Monkey Island ou bien Day of the Tentacle n’ont pas été oubliés, on s’en doutait …


Enfin, l’histoire, oui parlons en un peu (pas trop, le « spoil » c’est pas bien). Elle débute en 1987 et on est projeté dans une bourgade au nom évocateur de Thimbleweed Park. On est tout de suite dans le bain, un cadavre (qui commence à pixelliser), un meurtre à élucider, il va falloir se poser les bonnes questions, l’enquête commence … Une petite balade en ville s’impose, interroger les autochtones ne serait pas une mauvaise idée, mais on constate bien vite qu’il n’y a pas ou peu d’habitants, on dirait une ville fantôme.


Les boutiques sont closes, la seule cabine téléphonique est en panne, les lampadaires grésillent, c’est la nuit, il fait froid mais m…. ! Qu’est-ce qu’il se passe ici ? … Le mystère s’installe. On commence à comprendre, ça ne va pas être une enquête facile.


Au fil du jeu, interroger la population soulève plus de questions que ça en résout, le mystère s’épaissit, il va falloir tout passer au peigne fin, visiter la ville et ses environs, des lieux étranges et parfois hantés et y a de quoi faire.


Avant de se mettre au travail, on a un choix à faire, deux modes de jeux sont disponibles : Un mode Casual, pour les joueurs normaux, détendus, enfin ceux qui n’aiment pas s’arracher les cheveux et puis un mode Difficile (Hardcore ?) pour ceux qui ne veulent plus de cheveux. Pour une aventure en « pantoufles », le premier mode est plus indiqué mais les vrais aficionados du genre, qui ne veulent rater ni dialogues ni gags ni prise de tête, et bien, ce deuxième mode est fait pour eux. On remercie Ron et Gary pour ceux qui ont les nerfs fragiles.


J’exagère, même si certaines énigmes sont retorses et peuvent anesthésier certains neurones, dans l’ensemble c’est jouable sinon il y a toujours la Hotline (dans le jeu lui-même), une bonne idée de nos deux compères pour pousser au cul quand ça coince. Il suffit de composer un numéro et une avalanche d’indices est disponible, ça aide bien surtout quand on a fait 44 allers-retours dans la bourgade pour trouver un objet ou qu’on a essayé de combiner 68 fois tous les objets de l’inventaire (Je connais encore le numéro par cœur). Et cerise sur le gâteau, chaque personnage a son bloc-note pour ne pas oublier ce qu’il a à faire, là on nous mâche le boulot.


Bref, Ronny et Gary ont pensé à tout et même aux joueurs fainéants alors pourquoi bouder son plaisir, des jeux aussi bien écrit, avec un univers original, des personnages burlesques, des gags « en veux-tu, en voilà » et une intrigue aussi soignée et bien qu’est-ce qu’on fait ? On y joue bien sûr.


Et même si on est pas un vieux « Geek » aux genoux qui grincent ou bien un « Nerd » grabataire et passéiste (c’est presque un pléonasme), il serait dommage de passer à côté, il y a tellement peu de jeux comme ça, il faut se laisser tenter.


Hey Ron ! Ho Gary ! Si vous préparez un autre truc comme ça, bien torché et où on se fend la poire, je suis client. Si possible, rappelez Ransome, il m’éclate ce Clown avec son ballon et son air C "BIP !".
Continuez les gars ! Et merci.

FioRentino1
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le 13 mars 2018

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Fio Rentino

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