En temps normal, je n'ai rien contre Killzone. Un peu comme Lenny Leonard des Simpsons, c'est une licence qui se donne du mal pour gagner l'estime de ses pairs, alors qu'intrinsèquement c'est juste Lenny finalement, le mec sympa mais sans aucune once d'originalité ou de charisme. Malgré des problèmes techniques, le premier épisode était beau et pas désagréable à jouer. L'épisode PSP est certainement le meilleur à ce jour, quand on y pense, sans doute parce que ce n'est pas un FPS. Tout ce qui est sorti après s'est contenté de copier sans talent ce qui se faisait à l'époque, avec une maestria graphique plus ou moins importante histoire de faire passer la pilule.

J'ai même relativement apprécié le dernier épisode sur Vita, malgré son framerate d'escargot hongrois, c'est vous dire si je suis tolérant comme gars. Dans le cas de l'épisode qui nous intéresse, tous les signaux étaient au rouge pourtant : jeu de lancement, vraisemblablement rushé pour sortir à temps, titre passé par le générateur de scénarios Besson (vivement Killzone : Cocaine Hooker, en attendant qu'ils assument un véritable quatrième épisode), et surtout ce soupçon de benchmark graphique qui te fait dire "wouah c'est bô" à sa sortie et te fait couler des larmes de sang quand tu y reviens ne serait-ce qu'un an plus tard. Et bien malgré tous ces gros panneaux rouges clignotants, je m'y suis jeté la tête la première, le sourire béat et naïf aux lèvres, alors que je dois avoir une cinquantaine d'autres jeux, des bons jeux pour la plupart, qui attendent bien sagement d'être joués. Je vous jure, c'est con un gamer.

Donc, Killzone : Shadow Fall. "Dans l'ombre du Mur, rien n'est clair", dixit la jaquette. Bah oui, puisque tu es à l'ombre, connard ; je n'ai pas encore lancé le jeu qu'il me parle déjà pour ne rien dire, ça commence bien. Le tutoriel annonce la couleur : ça va être intense comme sauter des barrières et faire caca derrière des caisses, et bourré d'émotions subtilement forcées aux chausse-pied dans ta boîte crânienne. Mais je suis mauvaise langue, continuons. Le premier niveau est sympa (le premier 'vrai' niveau j'entends, pas cet étron de tutoriel avec Papounet), c'est beau, mais au niveau feeling on se rend rapidement compte de la catastrophe. Les britons de Guerilla étaient sans doute plus occupés à s'astiquer le manche sur le design des armes lors du développement, parce que tout l'aspect 'sensations de tirs' a été happé au profit d'un flingue Nerf faisant plus ou moins de bruit selon son calibre. En plus de cela les personnages (héros compris) sont de véritables éponges à balles ambulantes ; aucune puissance d'arrêt, aucune gêne, le moindre tir est littéralement absorbé par le corps jusqu'à ce que celui-ci meure d'une indigestion de plomb. Un pistolet possède la même puissance d'arrêt qu'un fusil à pompe (ou inversement), du coup à part quelques fusils qui font un peu mieux 'piou-piou' que les autres, aucune arme n'est vraiment intéressante à utiliser, un comble pour un FPS. Après avoir eu l'outrecuidance de démarrer ma partie en hard et une bonne vingtaine de morts pour cette 'simple' première mission, je baisse le niveau de difficulté quand je me rends compte que celui n'influe que sur la vision de l'ennemi (entre la vache morte et l'aigle bionique capable de voir au travers des murs, pas beaucoup de compromis équilibrés malheureusement). Et en avant pour une nouvelle mission. Dans l'espace. Et on doit jouer à Bob le Mécano comme dans Dead Space, à réparer des trucs et des machins. Stop, on va arrêter là, si vous le voulez bien. D'ailleurs je me suis arrêté là, ou presque (chapitre 5, c'est tout comme). Au moment où j'écris ces lignes, j'en suis toujours au même stade, et ça ne me ressemble pas, mais c'est sans doute mieux pour le jeu, parce que si je me forçais à le terminer, je pourrais être amené à baisser la note d'encore 2, voire 3 points supplémentaires.

Je n'ai pas l'habitude d'être aussi vindicatif face à un produit de divertissement, mais allez savoir pourquoi, ce Shadow Fall m'enrage. Il m'enrage quand je dois me coltiner sa fainéantise permanente, à me balancer pèles-mêles bidons rouges, énigmes, séquences d'infiltration et rail shooting avec un aplomb suffisant et orgueilleux. Il m'enrage quand je me perds dans ce level design bordélique, et que je me cogne au moindre élément de décor. Il m'enrage parce que c'est un jeu-cruche, joli mais d'une vacuité sidérante. Vous allez me dire, il y a toujours pire, suffit de voir les Call of Duty moches, bêtes et méchants. Oui, mais dans Call of Duty, on a au moins ce petit plaisir simple de pouvoir se foutre de la gueule du mec qui s'est dit que faire péter la Tour Eiffel était sans doute une bonne idée. Là, zéro, nada, malgré l'ancrage SF futuriste on se contente d'observer le sergent McFreedom libérer le monde de la menace méchanceté, on se tape le front à s'en rougir la main à chaque péripétie et on observe avec énormément de peine, et une petite part de pitié, le scénariste croire pour de vrai à la puissance des âneries qu'il débite.

Alors pour rester en bons termes, je vais m'arrêter là, faire un peu de multijoueur débile et mal équilibré (24 joueurs sur des maps de 16, un netcode aux fraises et du spawn kill en 2014, qui l'aurait cru ?), et ranger le jeu sur l'étagère de la honte, à côté des Fantavision, Uncharted Golden Abyss, Genji et autres Perfect Dark Zero, cette étagère que l'on regarde tous les cinq ans en se demandant comment a-t-on pu trouver ça beau ou même bien à un moment donné de notre existence. C'est l'étagère juste à côté de la poubelle.
HarmonySly
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le 13 août 2014

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HarmonySly

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