Fate/stay night
7.9
Fate/stay night

Jeu de TYPE-MOON et Kadokawa Shoten (2004PC)

Il n'est pas évident de parler d'un jeu comme Fate Stay Night, à vrai dire une revue conviendrait bien mieux qu'une vulgaire critique. Mais soit, de pixels sans vie, à défaut d'une voix vibrante de passion, je tenterai d'en dire quelques mots. Vous avez vu ma note, cette critique est positive, parlons donc sans ambages: ce jeu est à mon humble opinion monstrueux, voilà qui est dit. Nous pouvons commencer.

Présentons le jeu, Fate Stay Night est un visual novel(VN). Quid, uluberlu? C'est à dire que vous lisez une histoire comme dans un livre. Quelle est la différence? Un visual novel ne se limite pas aux mots mais inclut également des images, des effets visuels, du son, des musiques et dans le cas de ce jeu, des voix. Autant d'instruments pour accompagner un scénario qui restera linéaire, vos seules interventions seront quelques choix à prendre ponctuellement, déterminant vos relations, et la plupart du temps le fil de votre vie. Les nerveux de la souris peuvent donc aller se rhabiller, ce jeu reste par essence un livre à parcourir.

Recentrons-nous un peu et tournons-nous vers le scénario. L'histoire de FSN se déroule à notre époque, sous les yeux de Shirou Emiya, étudiant parmi d'autres. Shirou est un orphelin recueilli des flammes par un mage. Depuis son enfance il rêve lui aussi de devenir un héros afin de sauver à son tour ceux dans le besoin. Mais l'enfance est loin, son père adoptif est mort depuis cinq ans et Shirou se relève être un piètre mage. Tout va basculer lorsqu'il va se retrouver dans une guerre entre sept magiciens. Sept Master invoquant chacun un Servant, une âme héroïque issue du passé et des légendes d'antan, afin de combattre à leur côté pour retrouver le Graal, prodigue de tous les souhaits. Un conflit sanglant où le jeune Emiya Shirou se verra confronté à ses idéaux au côté de son mystérieux Servant, Saber.

Voilà un résumé plus que sommaire. Nous avons ainsi à faire à une sorte de Battle Royal mystique où chacun essaie de s'entretuer pour retrouver un artefact omnipotent à l'aide d'êtres mythiques revenus du néant. Pour le reste ce sera à vous d'en découvrir toutes ses subtilités le long des trois scénarios offerts.

Venons-en à l'avis proprement dit et restons sur le topique de l'histoire: elle est considérable et prend en moyenne plus de 75 heures pour être lue dans son entièreté. Une grande force de cette oeuvre et se de séparer en trois branches totalement différentes: mêmes personnages, même début d'histoire et pourtant arrivé à la croisée des chemins tout se chamboule par un nouvel élément et nous voilà pris dans les venelles les plus improbables, à chaque nouveau chapitre d'anciens personnages sortent de l'ombre, de nouveaux, plus sombres encore, s'éveillent et se rajoutent intelligemment au monde.

L'ambiance y est variée et à côté du quotidien reposant, de nombreux combats épiques viennent étinceler la scène. Quelques moments glauques où le héros, une fois de plus, vient s'empaler misérablement complète de doux moments romantiques.

Certains rediront sur le côté «slice of life» du jeu, je désapprouve totalement mais c'est une question d'opinion. De même pour son côté linéaire, les quelques décisions à prendre ne sont d'ailleurs que prétextes à découvrir des scènes alternatives à lire, les 40 morts du héros sont totalement à découvrir, du rire garanti lors des conseils post-mortem qui viennent brutalement mais gentiment nous divertir après des décès qui pour certaines, il faut l'avouer, sont des plus sinistres.

Au niveau des personnages il y en a pour tous les goûts. Certains auront sacrément marqué d'ailleurs, GAR ne vient pas de nul part. D'autres seront largement plus controversés, comme Sakura par exemple. Mais chacun d'eux sont développés à leur heure de gloire et Kirei par exemple après soixante heures de jeu où il restait un être méprisé devient un maître, que dis-je, un dieu, en quelques scènes. Concernant le personnage principal, Shirou, les avis seront également divergents. J'ai aimé ce personnage; sa psychologie loin d'amener une réflexion philosophique profonde a le mérite de faire réfléchir et permet des évolutions différentes pour chaque histoire. A se justifier avec autant de puissance pour ses idéaux, il en vient à briller, d'une lumière plus forte que n'importe qui d'autre.

Dans ses points forts je citerai également ses musiques. Ne passons pas à côté d'une bande son qui restera pour la plupart du temps discrète, tout en étant plaisante par ailleurs, avant de se révéler mémorable pour certains thèmes lors des crescendo multiples d'émotions, que ce soit dans la furie des batailles ou bien dans les tendres enlacements.

Nous avons également la chance, énorme chance, d'avoir un visual novel dont les dialogues sont presque entièrement doublés. Et par quels seiyus mes enfants! D'ailleurs il est inutile de citer des noms(Jouji Nakata je te cite quand même), leur talent transparaît aisément.

Quelques notes négatives à préciser sans doute, et qui dissuaderont la plupart des gens à y jouer: ce jeu n'est pas simple d'accès, il n'a même pas de traduction française et le seul intermédiaire entre le japon et vous sera une traduction anglaise. A noter également que la version pc est un jeu pour adulte(scènes sexuelles explicites, vous voilà prévenu), sa part de jeu est ridicule et il est inutile de se focaliser sur ces scènes, assez drôles pour la plupart, le but n'est pas là et c'est assez facile de les passer en moins d'une minute en mettant la vitesse maximale.

Fate Stay Night est basiquement un livre interactif mais en réalité, c'est bien plus que cela. Dans les faits, ce jeu est la crème de la crème d'un genre à part entière, un genre méconnu aux qualités intrinsèques. L'autre jour, je me suis surpris à comparer Fate Stay Night à un rpg. Aujourd'hui on peut voir les chiffres et les dés disparaître, remplacés par l'expérience cinématographique, l'accent sur l'émotion de divers personnages plus ou moins attachants. Richesse de gameplay aux oubliettes pour une expérience plus directe? Là n'est pas le débat, mais Fate Stay Night ne serait-il pas alors le pinacle de cette orientation? Au déni de tout gameplay qui tend à ne devenir qu'un intermédiaire gentillet entre deux dialogues, le visual novel n'a t'il pas atteint la quintessence avant l'heure? Je parle à l'extrême et il me semble évident que le rpg a, pour le moment, toujours son intérêt. Mais ceux dont les dernières phrases leur ont parlé, ceux qui apprécient le genre rpg pour son histoire et ses personnages, Fate Stay Night atteint tout simplement un autre niveau.

Découvrir le visual novel, c'est comme jouer pour la première fois une partie multijoueur avec votre futur jeu de référence, sans les boulets et le lag, un pur bonheur. N'avez-vous jamais eu ce frisson lorsque vous finissiez pour la première fois un de vos jeux cultes? Ce frisson, je savais que j'allais le ressentir dès la fin du prologue. Comment ne pas ressentir ce petit quelque chose lorsqu'à la fin de celui-ci, après trois heures de jeu(trois heures), on arrive seulement et pour la première fois dans le menu? Ce frisson, je l'ai ressenti à la fin de chacune des routes. A la fin de la première histoire, je ne prenais pas la peine de digérer, je me demandais si l'indigestion n'était pas à portée alors que le deuxième arc se terminait. Et pourtant, lors dernière conclusion du dernier chapitre, alors que le mot FIN est apparu sous une douce mélodie, je retrouvais une dernière fois ce sentiment éphémère et bienfaisant, celui d'avoir accompli quelque chose dans ma vie vidéoludique.

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Edit :

Le patch Realta Nua a été finalisé récemment. Voir la vidéo pour plus d'informations.

https://www.youtube.com/watch?v=Q0rMA6piiUE
Skidda
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le 30 oct. 2010

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