J'ai hissé la grande voile, rempli la cale, pris la mer et affronté l'énorme vague de l'émotion...

C'est durant une semaine de canicule, propice aux envies d'activités aquatiques, au début de la saison estivale 2022, propice aux envies d'escapades lointaines, en pleine période de questionnements écologiques, propice aux envies d'explorer cette vague idéologique...que je me suis enfin décidé à lancer "FAR Changing Tides", qui m'avait tapé dans l'œil lors de son annonce pendant un festival consacré au jeux vidéo, sortie en début d'année 2022, accessible via le Gamepass, animé par un précédent parcours au sein de cette franchise, entamé il y a 1 an jours pour jours, qui m'avait fortement marqué, intéressé par revoir ce développeur sous de nouveaux horizons, intrigué par sa proposition ludique et libéré de tout impératif au vue du manque de nouveautés ludiques inhérent à cette année, un peu au ralenti...donc fortement désireux, engagé à prendre la mer, à hisser la grande voile, à affronter la vague de l'émotion....

Une émotion tout d'abord artistique, qui à peine le jeu lancé, une chute dans les profondeur aquatique, sans une once d'explication, nous immerge immédiatement, dans une première cité, un village de pêcheurs totalement ravagé, écartelé, dépeuplé, vidé, laissé à l'abandon, comme une victime, une trace, une marque, d'une catastrophe naturelle, ayant tout emporté, tout englouti, tout détruit...nous laissant le sentiment d'une punition divine, d'un retour de bâton logique, d'une revanche écologique envers un monde, une civilisation, une humanité qui aurait abusé de son environnement, outrepasser les lois de la natue...renforcé par cette réinterprètation des cités portuaires et industrielles propres au Royaume-Uni du 19ème siècle, confirmé par la suite, nous faisant traverser plusieurs biomes, zones, environnements, structures evocant pour le coup ces comptoirs commerciaux, ces premiers villages de pionniers, ces sites d'exploitations de ressources propres à l'empire britannique du 18ème et 17ème siècles, à travers les compagnies des indes et les expéditions en antarctique, mais aussi à la conquête du nouveau monde, entrepris par la couronne anglaise du 15ème siècle...ayant tous abouti à des drames, malheurs, catastrophes, qui ont marqués à jamais notre histoire commune et un instant T, dont je vous laisse la surprise, bascule carrément dans le néo et futurisme anglo-saxon du 20ème siècle...parfaitement mise en lumière ici, par les différentes architectures arpentés, la diversité de paysages, la faune et la flore exposées, le tout défilant en fond et notre principal environnement, notre bateau, véritable maison évolutive et moyen de transport polyvalent...élégamment mise en scène ici, par ses graphismes en Low-poly, chaleureux et coloré, changeant au gré de notre parcours, sa musique jazz bebop, Folkorique celte, musique classique au piano, country à la guitare et électronique chill, enivrante, réconfortante, triste, nostalgique et apaisante, jouant avec l'ouïe du joueur et s'adaptant toujours à la situation, par ses plans et jeux de caméra, variant les points de vue et jouant avec la perception et le champs de vision du joueur, ses textures et arrières plans comme peint à la main, semblable à l'art pictural, notamment du mouvement de l'impressionnisme et du fauvisme, titillant la vue du joueur, son rythme lent et effréné, prenant son temps par moment pour laisser place au dépaysement, et s'accélèrant par d'autres, pour laisser place à l'intensité de l'immédiat, jouant avec les nerfs du joueur, sa spatialisation sonore en lien avec soit la focale ou le plan de caméra, permettant une immersion totale du joueur...le tout intégré dans une atmosphère mélancolique, crépusculaire, brumeuse, taciturne, dans une sorte de relecture du Steampunk, du Far-west, du post-apocalyptique, de la science-fiction d'uchronie, rappelant le cinéma d'animation traditionnel européen, véritable peinture animée méditative et suprenante...nous laissant subjugué, touché, ému comme emporté par une vague mouvante...

Une émotion ludique ensuite, qui dès me premier tableau, cette cité portuaire éventrée, nous plonge immédiatement, sans une once d'explication, dans un jeu de plate-forme, dans lequel l'environnement post-apocalyptique est une énigme...où les différents mécanismes inhérent à l'industrialisation sont les puzzles...où les différents objets égrenés ça et là fruit de ce dépeuplement sont nos outils...où la technologie héritage d'une ancienne civilisation est nôtre arme...où la nature est notre principal guide...où nôtre maison flottante est nôtre priorité...où nôtre principal incarnant est son protecteur...un tout intelligemment mise en scène dans un jeu de gestion, d'optimisation, d'exploration, d'observation, de rythme, de navigation et de réflexion....rendu digeste par son level-design cohérent et logique, par son ergonomie légère et minimaliste, sa maniabilité accessible et simple, son affordance visuelle et sonore, sa physique souple et permissive, ses interactions claires et audibles, son gameplay instinctif et sensé, son scrolling souple à la fois horizontal et vertical, sa caméra libre...rendu engageant par la variété de situations, de climats, de biomes, de ressources, de possibilités, de capacités...rendu surprenant par son sens du rythme, l'évolution de notre navire, les petites zones cachées, les petites trouvailles laissées ça et là, les rencontres fortuites ou désirée, frontales ou indirectes, les événements et embûches brisant ou non nôtre avancé...exigeant de nous intentions quotidiennes, créations de routines, déplacements stratégiques, recherches de ressources, adaptation permanente afin d'entretenir, de bichonner, de préserver nôtre humble demeure mécanique dont nous dépendons et qui dépend de nous, ayant ses exigences, ses limites, ses complaintes, ses règles, ses cycles, son langage, son appétit, ses envies, son développement, son comportement, sa volonté, ses humeurs, une âme, une vie...dans un game-design volontairement construit autour de ça, une direction artistique pensée autour de ça...où toute notion de temps, d'inventaire, d'arbre de talent, de crafting, de barre de vie, de levelling, de niveau de difficulté, de pédagogie sont absents, évitant toute superficialité, toute surenchère, rappelant certaines démarches vidéo-ludiques propres à la production indépendante autour de la relation envers un personnage non jouable, n'ayant pas la même nature et statut que nous, bien plus sensible et bienveillante...nous laissant subjugué, touché, ému comme emporté par une vague mouvante...

Une émotion narrative pour finir, qui sans textes ni paroles, sans mots ni chiffres, sans contextualisation ni information, nous propulse directement dans cet univers, ce monde, à travers un petit être rouquin...sûrement un irlandais, vêtu d'un poncho coloré...sûrement un amérindien, équipé d'un collier se transformant en combinaison sous-marine...sûrement un dénicheur de trésors marins, désireux de récupérer un objet qui lui est chère...sûrement le patrimoine d'un défunt parent, animé par l'envie de le conserver...sûrement pour lui rendre hommage, qui part chance ou non tombe sur cette fameuse demeure...sûrement l'héritage de sa civilisation disparue...équipée d'une voile...sûrement une réinterprètation des caraques britanniques...pouvant être propulsée par moteur à vapeur...sûrement un machine propre au Steampunk...évoluant en sous-marin...sûrement inspiré du Nautilus...afin de naviguer sur les flots de la mer...sûrement evocateur de Christophe Colomb...de plonger dans les abysses...sûrement inspiré de Capitaine Nemo...où juste à plein rames motorisées...sûrement une idée d'un futur apocalyptique façon WaterWorld...de traverser moulte environnement, les grandes cités portuaires britannique, les campagnes irlandaises, les côtes écossaises, les plaines du Midwest, les banquises de l'Alaska, les grands lac du nord...de visiter ou non moulte structures...des totems Cherokees, des statues de l'île de pâques, des temples de l'empire Aztèque, des demeures Acadiennes, des steamboats de la Nouvelle-Orléans, des sites de forages modernes, des ziggurats d'un autre temps...et devant s'entendre, collaborer, écouter, supporter avec antiquité...comme un petit-fils avec un aïeul, un élève avec un vieux maître, un jeune apprenti avec son sensei...comme deux inconnus, solitaires, perdus, errants dans un monde austère, inhospitalier, jonché d'embûches, nécessitant de faire des choix, d'avoir son objectif, d'imaginer son but, de préparer son trajet et d'anticiper son déroulement...laissant le joueur seul, responsable, conscient et convaincu de ceux-ci...un récit à la fois guidé et libertaire, une narration suggérée et environnementale, une allégorie ludique autour des crises économiques et écologiques, de la préservation du patrimoine et de la culture, de l'aliénation technologique ou spirituelle, du sens et de la dépendance à un être...le tout dans un écrin plein d'onirisme et de magie, se rapprochant de la littérature fantastique, des romans d'aventure...entre Jules Vernes et Antoine de Saint-Exupéry...nous laissant subjugué, touché, ému comme emporté par une vague mouvante...

C'est donc à la fin du périple en mer, allumant un deuxième phare, répondant à un premier appel, unissant les deux, que je quitte touché par cette relation avec cette vétuste machine, evocateur de ma triste relation avec mes feux véhicules à deux roues, entre exaltations et emmerdes, envoûté par cette plongée dans un onirique univers, evocateur de mes passions pour les récits d'aventure remplie de mythe et légende, amusé par cette navigation sur la mer, dans les profondeurs marines et un peu dans les airs, evocateur de mon affection pour l'errance lente et contemplative, responsabilisé par cette lecture d'écologie, evocateur de mes tendances et convictions politiques, ému par cette narration, evocateur de mon appétence pour le suggéré et le métaphorique bien plus impactant à titre personnel, fasciné par cette franchise et sa démarche, evocateur de mon amour pour des studios s'engageant vers une autre vision du média, surpris par ce jeu, evocateur de ces volets arrivant à prolonger une expérience pour les initiés tout en s'offrant à de nouveaux arrivants, convaincu par un troisième volet, evocateur de mon amour éternel pour FAR et Okomotive, mais surtout heureux et ravi par mon parcours, comme simplement emporté par une énorme vague émotionnelle et sensorielle...un grand jeu d'aventure...donc prenez la mer...le voyage en vaut le coup.....

AlMomoSan87

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