De Dunwall à Karnaca : la suite des aventures de Corvo et Emily

(Note : Cet article a été écrit pour un cours de fac, à destination d'un professeur peu connaisseur et peu convaincu de l'intérêt des jeux vidéo ; cela pour expliquer le ton didactique (et journalistique, c'était le but du cours) de l'article.)


Après le succès du premier Dishonored, sorti en 2012, le deuxième opus - 2016 - était très attendu. Editée par Bethesda Softworks et développée par les français d'Arkane Studios, la série fait office de référence en matière de jeu d'infiltration.


Une suite, qu'elle soit littéraire, cinématographique ou vidéo-ludique, est toujours une gageure pour les créateurs. Réussira-t-elle à au moins égaler l'original, voire à le surpasser ? Dishonored avait ébloui par le détail de ses décors et la variété d'approche - enfin un jeu vidéo où il n'est pas nécessaire de tuer pour réussir ! - qu'il offrait. Dishonored 2 reprend les mêmes stratégies, mais les améliore-t-il ?


Karnaca, région du Royaume des Îles. Corvo Attano, le protecteur royal et père de la nouvelle impératrice, avait dans le premier opus vu mourir l'impératrice Jessamine et dû oeuvre pour libérer leur fille de lui rendre son trône. Désormais aux côtés de l'impératrice Emily, il la forme au maniement des armes et la conseille dans son rôle, jusqu'au coup d'état de Delilah, demi-soeur de la précédente impératrice. Si vous décidez de pénétrer dans cet univers, vous pourrez incarner Corvo ou Emily dans leur vengeance et leur reconquête du pouvoir. Le dieu amoral qui règne sur ce royaume porte le nom de "L'Outsider", et il offre comme dans le premier épisode sa "marque", permettant de jouir de pouvoirs surnaturels. Exilé(e) à Karnaca, une des sept îles du royaume, il vous faudra affronter les alliés de l'usurpatrice pour éclaircir le mystère de son invincibilité et la destituer.


Des décors industriels à explorer sans retenue


L'environnement du jeu est inspiré de l'Angleterre du XIXème siècle. Se côtoient les rues grises d'une ère industrielle et la magnificence des manoirs des puissants. Dishonored 2 s'inscrit à nouveau dans un style steampunk, mettant en valeur machineries complexes, adversaires robotiques et épidémies. La peste et les rats du premier opus, qui gagnaient du terrain à mesure que vos cadavres s'accumulaient, sont remplacés ici par les mouches de sang de Karnaca, sorte de gros moustiques aux ruches bâties d'ambre sanglante. Les zones dans lesquelles se promène votre avatar sont riches de ruelles et passages secrets, de balcons grand ouverts et de vasistas accessibles par les toits. Les chemins à emprunter pour vous déplacer sont plus subtils que dans le premier jeu : il vous faudra souvent ruser pour récupérer l’objet qui servira votre quête. Certaines missions ont fait l’objet d’efforts particuliers, tel le Manoir Mécanique, dont les pièces se réagencent à chaque utilisation de leviers, vous rendant accesibles des passages auparavant invisibles ; dans le manoir d'Aramis Stilton, grâce à un objet offert par l'Outsider, votre personnage se déplace entre deux temporalités.


Une remarquable fluidité pour une approche personnalisée


Tout comme le premier, Dishonored 2 est un FPS – first-person-shooter : le joueur observe l'environnement à travers les yeux de son personnage. Sauts, glissades, attaques et parades sont de mise pour les affrontements, tandis que le mode furtif et les pouvoirs de l'Outsider permettent de miser sur la discrétion. Une des nettes améliorations du premier opus est la prise en compte de l'inertie : votre personnage ne se fige plus instantanément après un saut ou un course, ce qui augmente le réalisme de ses mouvements. Selon le personnage – Emily ou Corvo – que vous incarnez, vos dons magiques sont différents. Équipé(e) en plus d'un lame et d'une arbalète à carreaux incendiaires, soporifiques ou classiques, votre personnage est libre d'explorer les multiples possibilités pour atteindre son but.


Courir à travers les rues ou sauter de toits en gouttières et de balcons en fenêtre , il s'agit là de la liberté laissée au joueur. Dans les rues de Karnaca, les chemins sont nombreux et il ne tient qu'à vous d'éviter vos ennemis. Le jeu met en avant quatre comportements possibles : tuer ou épargner, attaquer ou se dissimuler. La fin du jeu dépend des choix faits au long des missions, ainsi que la sympathie qu'inspire votre avatar. Les pouvoirs qu'offre l'Outsider peuvent être refusés et les missions ont été prévues pour être possibles sans utilisation du surnaturel. La personnalité de votre avatar évolue selon les actions que vous lui faites accomplir : les lignes de dialogue s'adaptent au personnage sanguinaire ou magnanime que vous construisez. Cette liberté du joueur était l'un des points très appréciés dans le premier opus, et la suite ne faillit pas à prendre la relève.


Un jeu dont on ne se lasse pas


Malgré les tentatives de plus en plus nombreuses de la part des créateurs pour élever le jeu vidéo au rang d'oeuvre d'art, il est encore principalement considéré comme un objet commercial : bien des joueurs attendent d'un jeu d'en avoir pour leur argent, à travers le temps de jeu et le nombre de parties possibles avant de se lasser. Dishonored 2 a cherché à contenter sur ce point, car si le jeu est relativement court – une vingtaine d'heure pour finir le scénario une première fois, la diversité d'approche possible offre une rejouabilité conséquente, et les succès – actions spéciales à accomplir – poussent à explorer au maximum les décors et à écouter les discussions, souvent riches d'informations, que vous pouvez surprendre au détour d'une ruelle. Qu'il s'agisse des défis que vous vous lancez ou de ceux que vous offre le jeu, il y a un long chemin à accomplir avant qu'un joueur puisse affirmer connaître par cœur les rues de Karnaca.


Cette suite a réussi à enrichir et à améliorer les éléments qui avaient fait le succès de la franchise. Après Dishonored 2, l'opus original semble rigide et presque répétitif.

LuiseDiLida
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le 30 déc. 2018

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LuiseDiLida

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