Bon, la tâche s'annonce ardue : je vais devoir, le temps de cette critique, m'efforcer de convaincre que Deathloop est un excellent jeu au concept inexplicable. Plus précisément, l'explication analytique, aussi précise soit-elle, de son concept ne lui rendra jamais justice à sa juste valeur. Un peu à la manière des Qualias, il faut vivre l'expérience Deathloop pour en comprendre la substance et en apprécier les immenses qualités.
Mais peu importe, j'essaie quand même : un beau matin, sur l'ile de Blackreef, Colt se réveille amnésique et groggy sur la plage. Incapable de se rappeler les événements passés, il va rapidement s'apercevoir qu'il est coincé dans une boucle temporelle avec une secte d'épicuriens, Aeon, décidés à profiter de cette éternité pour faire la fête sans avoir à se préoccuper du lendemain. Ce joli monde est emmené par huit leaders illuminés, les Visionnaires, que Colt devra impérativement éliminer dans la même journée pour briser la boucle. Faut de quoi, tout recommence et tout le monde oublie tout. Tout le monde, sauf Colt et Julianna. Julianna ? C'est une des visionnaires, particulièrement coriace, qui peut débarquer à l'improviste n'importe quand pour empêcher Colt de mener à bien ce massacre. Fait intéressant : le joueur peut incarner Julianna, inversant ainsi son objectif en s'insérant dans la partie d'un autre joueur. Facultatif certes (le jeu est jouable offline, heureusement) mais sympathique tout de même.
Et c'est à peu près tout ce qu'il y a à savoir. Pour le reste, il faudra me faire confiance : Deathloop est formidable. Il ne sert à rien de dire que c'est un genre d'hybride entre un FPS et un Rogue-lite, parce qu'en réalité c'est beaucoup mieux qu'une combinaison hasardeuse de ces deux genres en vogue. Il est vain de vanter en amont son level design, son ingéniosité méticuleuse n'est perceptible qu'après plusieurs heures de jeu. Car oui, Deathloop est un gout acquis, il ne se livre pas au premier abord. Il faut persister, quitte à vadrouiller vaguement et à se perdre un peu (beaucoup) lors des premières pérégrinations sur Blackreef. Mais là où le jeu est brillant, c'est que ces errances sont prévues, nécessaires même : même en prenant n'importe quelle destination complètement au hasard, il y aura toujours quelque chose à faire, à trouver, à remarquer et à noter pour plus tard. D'ailleurs, un ingénieux système de log le fait automatiquement. Et petit à petit, les pièces du puzzle s'assemblent, le lore s'éclaircit, les desseins des différents personnages (géniaux, l'écriture est sensationnelle) apparaissent au grand jour. Et quand le tout se termine, au bout de 15 à 20 heures en fonction de votre précipitation à voir la fin, on n'a qu'une envie : continuer à explorer, à tester de nouvelles voies, à en apprendre encore un peu plus. La générosité de ce formidable terrain de jeu semble sans limite.
Donc oui, il faut jouer à Deathloop. En plus d'être un titre d'une qualité rare, issu d'un des studios français les plus talentueux, c'est presque une leçon de vie : la première impression n'est pas toujours la bonne. Souvenez-vous en la prochaine fois que vous croiserez ce gars un peu orignal que vous ne remarquiez pas au fond de la classe et qui depuis est devenu votre meilleur pote.