Dear Esther fait partie de ces jeux qui rompent avec les règles traditionelles du media, et qui ironiquement utilise le moteur Source avec lequel il serait simple de faire un copié collé de concepts existants.Artistiquement réussi, avec moi il échoue à me transporter et me satisfaire.
J'incarne un narrateur, sur une île qui semble déserte mais où des traces humaines se font remarquer ça et là. J'avance, et j'écoute mon monologue épistolaire avec Esther, qui est extraordinairement détachés de ma situation actuelle. Très bien écrit, qui racontent des fragments de souvenirs amers, mais tellement détachés de ce que je vis. Je me fiche de cette île , de comment je suis arrivé là, mais je pense.
Je traverse une île magnifique. Ces herbes, ces cailloux, ce ciel qui évolue. L'environnement est une vraie réussite, et les cheminements sont naturels. On pourrait s'y croire. En plus de celà, le passage de la caverne est tout simplement magnifique, avec sa luminosité, ses espaces variés, ses volumes organiques.
J'aurai aimé observer cela, mais ne pas y etre. Qu'est ce que je peux y faire, de toutes façons ?
Je ne peux pas sauter, ni m'accroupir. Je ne peux pas interagir avec l'environnement, parce que je n'ai pas de mains. Je marche, à vitesse humaine, mais je n'ai pas de pieds. Mes pas ne font aucun son. Je suis nu, peut être. Je n'ai pas de visage.
Je suis une caméra volante.
Voilà ce qui m'a totalement gâché l'experience. Mon avatar n'a aucune consistance, c'est un fantôme. Je suis loin de penser que ce n'est pas un jeu vidéo, puisque les déplacements et l'appropriation de l'espace en font le socle essentiel, mais juste, pourquoi? Tout est si distant ! Je me sentais littéralement enfermé dans une prison onirique, puisque je n'ai pas la moindre interaction. Rien ne bouge. Aucun animal, aucun script (à part ceux qui declenchent ma voix) ne vient bouleverser ce lieu.
Le bout du voyage, prévisible, est aussi d'une facilité décevante.
Je suis pourtant persuadé qu'avec le meme environnement (réel ou virtuel), exactement les même textes et la meme voix, Dear Esther aurait pu être un très beau court métrage. Avec un beau cadrage précis, des travelling naturels, et cet homme, malade, estropié, au visage hagard, évoluant dans ce décor mélancolique.
Mais une caméra volante, juste non.