Nous lirons beaucoup de choses sur Mountain (MNT pour les intimes), la plupart descriptives du jeu, et essayant d'en tirer des conclusion quant au sens et à l'intérêt qu'il faut lui donner. Ces critiques s'y prennent très mal. Et oui, il est possible de mettre une excellente note à ce jeu sans pour autant le fait pour des vagues raisons pseudo-artistiques. Il y a un gameplay dans Mountain et il a produit des effets d'interaction avec le joueur.

Descriptivement, en effet, le jeu à 1$ comme on le surnomme déjà, se compose d'éléments simples. Tout commence par un petit moment étrange où on nous demande de dessiner, sur une page blanche, trois dessins successifs. Par exemple "future" ou "bliss" et on dessine ce que ça nous inspire. Ensuite, sans que l'on sache pourquoi on ait dû faire ça, votre montagne est générée. Elle est Dieu, nous dit le jeu, et nous aussi.

Pendant le jeu, on peut zoomer sur la montagne, qui flotte seule dans l'univers (façon l'arbre dans The Fountain de Darren Aronofsky), on peut la faire tourner plus vite sur son axe, et observer les intempéries tomber sur elles. De temps en temps, un objet insolite vietn s'écraser, venu de l'espace, sur la montagne. Une horloge, un cône, une chaise... Quand le jour se lève, on entend une voix de choeur angélique annoncer le retour de la lumière.

Mais, surtout, et c'est ce dont personne ne parle, on peut jouer de la musique. Sur Ipad, la partie inférieure de l'écran est divisée en une vingtaine de zones carrées qui produisent un son quand on les touche. Sur PC, il s'agit de touches du clavier. Ca ressemble à un piano. Si on zoome très fort, le son est clair et sans écho. Si on recule la distance de vue, le son se fait lointain et prend de l'écho progressivement.

Or la montagne réagit à la musique de façon très subtile. Notamment, certains rythmes accélèrent le défilement des jours, et la rotation de la montagne. Il est aussi possible que cela influe sur la probabilité qu'un objet viennent s'écraser dessus. Je me demande d'ailleurs ce qu'il se passera quand la montagne sera totalement recouverte d'objets.

Mais, et c'est là qu'il faut en venir, tout ceci n'a pas de sens tant qu'on le regarde dans le sens descendant, depuis nos yeux vers l'écran. Descriptivement, en effet, il n'y a pas grand chose à saisir. Phénoménologiquement, par contre, l'expérience est réussie. Il se passe quelque chose de religieux dans la contemplation interactive de la montagne. On lui joue des hymnes. On ne sait si elle entend ou pas. si nous jouons pour elle ou pour nous même. On se surprend à créer des mélodies, à les maintenir parfaites le plus longtemps possible, puis à partir dans une impro jazz chaotique. On se sent enfant sur le xylophone, puis Mozart sur le clavier. Puis on laisse le silence se faire, on hésite à relancer une note. Le temps devient épais, toujours présent, puisqu'à notre époque on le compte toujours plus. Or jouer à "un simulateur de montagne" vous questionne forcément à chaque instant sur le pourquoi de cette occupation. Pourquoi y passez-vous votre temps. Et sur les autres apps ? La montagne, elle, a tout le temps, bien sûr. Elle est Dieu, rappelez-vous. Comme lui, un symbole de l'éternel. Vous, non.

Que sont vos mélodies perdues dans l'înfini de l'univers-montagne ? Ce n'est pas la question. Que sont-elles pour vous ? Et là vous en retirez quelque chose. Elles sont comme un hommage, un hymne, un témoignage d'une croyance. D'une pulsion spirituelle que commente la montagne au hasard, affichant ses pensées en haut de l'écran. "I am full of rocks and dirt and love". "This is very interesting". Ici encore, les rythmes joués peuvent accélérer l'occurence de ces réflexions, changeant la sensation de présence donnée par la montagne. On tente alors de continuer à la faire parler...

Les joueurs qui attendent quelque chose de Mountain n'ont pas saisi l'invitation qui leur est faite. Mountain ne vous donnera rien d'elle-même, descriptivement. Elle ne voudra pas vous séduire. Elle n'est qu'une grande question renvoyée à vous-même. Elle vous apporte ce que vous lui apportez aussi. C'est une interactivité très particulière, mais très dense et très présente. La part de mystère installée par le jeu lui-même vous oriente dans une expérience introspective qui a des airs de sacré.

Très belle réussite originale dans un paysage vidéoludique manquant souvent de variété et de qualité.
IIILazarusIII
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 6 juil. 2014

Critique lue 1.2K fois

20 j'aime

6 commentaires

IIILazarusIII

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

20
6

D'autres avis sur Mountain

Mountain
johnarktor
1

C'est juste moi, ou tout le monde est débile à propos de ce jeu ?

Pas une seule critique négative de cet étron, pas un seul commentaire, même dans un obscur forum, sur le fait que cette chose n'est que de la masturbation pseudo intellectuelle pondue par un débile...

le 16 oct. 2014

3 j'aime

Mountain
diegowar
4

Critique de Mountain par diegowar

Bien joué ! A mon avis ce jeu est une blague, un défi, appelez-le comme vous le voulez, où le créateur rigolait avec un ami et s'est dit "je te parie que si je crée ce jeu il va y avoir des gens qui...

le 29 nov. 2017

Mountain
Louis_Artiges
9

Le jeu où nous sommes dieu.

Attention la ça bouge !!!... Ahhh nan ! Là ! Nan en faite ! Si, si je suis sûr, il y a une truc..Je suis une montagne, je suis un dieu.. Le soleil, le soleil, je le vois !! Je suis une montagne, une...

le 16 juin 2016

Du même critique

Forrest Gump
IIILazarusIII
9

Pas l'histoire d'un idiot, l'histoire d'un "surhomme".

Forrest Gump est pense-t-on souvent l'histoire d'un idiot, qui est le prétexte à revisiter l'histoire des U.S.A.. Son regard naïf est idéal pour nous permettre de revivre ces moments clés avec une...

le 10 déc. 2010

209 j'aime

16

Wall-E
IIILazarusIII
9

Un poème, un poème.

Mettre 9 à Wall-E ça me fait bizarre, mais quand je clique sur 8 je ressens comme un sentiment d'injustice. Les plus scrupuleux me pardonneront cet accès de générosité. Wall-E, je le vois comme un...

le 17 déc. 2010

102 j'aime

11

Hotline Miami
IIILazarusIII
9

Un délice pour philosophe.

Alors là faut pas déconner. Hotline Miami est énorme. É-no-rmeuh. C'est une expérience intraitable sur la représentation de la violence. Mais attention : bien qu'ils soient délicieux, je ne parle ni...

le 11 janv. 2013

89 j'aime

10