D'emblée, quand un jeu m'envoie me faire foutre, ça retient mon attention. Il y a la façon vilaine genre les FPS dirigistes ou l'on fait semblant d'être très réaliste tout en te foutant des murs invisibles partout et il y a la façon intéressante, genre Divinity II qui te jette dans le jeu après un pseudo tutoriel qui ne t'a rien appris du tout et qui te laisse te démerder.

Le truc bien avec 1C, le développeur, c'est que c'est manifestement un groupe de types qui se disent que leurs clients peuvent vraiment aller se faire foutre. Tu me diras, vu qu'on est trois - incluant la mère du proprio de la boîte - à jouer à leurs jeux, ils ne prennent pas trop de risques. Ah oui, si vous ne connaissez pas 1C, résumons en disant qu'ils sont doués pour trouver de bonnes idées et les développer n'importe comment. Finition à la truelle, bug / features bizarres, mises à jour à chaque collision galactique.

Dans le cas de Konung 3, il faut commencer par le descendre sérieusement avant de pouvoir en dire du bien, parce que sinon le choc du joueur pas préparé évoque celui du parisien qui a déménagé suite aux prédictions de Paco Rabanne.

Konung semble donc sortit tout droit des années 90 techniquement. Truc génial, on peut aller dans les résolutions les plus démentielles, mais pour compenser, la caméra est fixé à deux mètres du plancher. C'est vraiment génial, un brin d'herbe en haute résolution, mais ça perd de son charme rendu au cinquante millième brin d'herbe identique. J'aimerais bien dire que c'est un parti pris, mais c'est surtout merdique : dès que le joueur est attaqué de deux ou trois directions différentes (lire, dès qu'il sort d'un village) c'est le bordel pour comprendre ce qui se passe et se positionner en conséquence. Un peu comme un mec qui irait à un combat de boxe en gardant le regard sur ses lacets. Je veux bien, mais il faut que le côté masochiste soit drôlement dominant.

Ensuite, on y trouve des erreurs de design dingues : c'est pas comme si c'était le premier rpg jamais sortit. Genre, quand tu recrutes des pnj, tu dois les déplacer un à un en leur parlant si ils te barrent la route. Alors mettons que tu entres dans une maison sans leur dire de rester fixe, deux de ces connards viennent se carrer dans la porte d'entrée .... Hop, plus qu'à charger la dernier sauvegarde. Ton héros intrépide vient d'être vaincu par une porte et un blaireau.

J'veux dire, ça augure mal pour ce qui est de sauver le monde, genre. Imagine la gueule du méchant : "Suffit de l'enfermer dans n'importe quelle baraque les gars !". C'est un peu la loose totale.

Des trucs comme ça, il y en a un paquet. Genre échanger deux potions entre l'inventaire et le slot rapide en plein combat. Hahaha, bonne chance ! L'interface évoque, je sais pas, une oeuvre qui serait faite par un Van Gogh bourré et drogué. Si tu dépends d'une potion, t'es juste très mort (et le truc, c'est que sauf rapport de force écrasant, tu dépends TOUT LE TEMPS d'une potion).

D'un point de vue général, plutôt que d'évoquer sans fin le côté merdeux de l'interface, disons simplement que c'est à croire que les mecs n'avaient jamais joué à un rpg autre que les leurs. Enfin, si ça se trouve, c'est le cas.




Les bons côtés (si, si).

Comme dit, Konung n'hésite pas à envoyer son joueur se faire foutre : les points de vie se récupèrent dans un village en payant un soigneur, par potions / nourriture ou (peut-être ?) par magie (pas sûr à ce stade). Le passage du temps n'y change rien. Les ingrédients pour faire les potions soi-même sont ultra-rares, les tarifs prohibitifs. Autrement dit, se soigner est une affaire de fou dans un premier temps. Il est surtout recommandé de ne pas se prendre de coups en travers de la gueule.

Et ce qui est génial, c'est que le jeu s'assume. Si tu prends la compétence herboriste et que tu la booste, tes potions sont plus puissantes. Puissant incitatif. Mais les autres compétences sont rendues - par les choix des concepteurs - tout aussi fondamentales. Leadership, par exemple, qui permet de recruter du monde. Rapidement dans le jeu tu comprends que seul ou à deux, t'es juste mort par définition. Sauf que recruter est une aventure en soi. Faut découvrir de nouveaux villages, trouver les rares putains de futures recrues. Convaincre ces chiens sales. Alors forcément, à chaque level c'est le choix dans la douleur : je monte le leadership qui me servira dans UN MILLIARDS D'HEURES DE MERDE ou une compétence de défense qui va un peu m'épargner la gueule et les finances tout de suite ?


La magie c'est encore plus drôle. Pour la développer, il faut aussi monter l'intelligence. Mais débloquer le moindre sort n'arrive que trois siècles après le départ. Alors on peut parler d'un putain d'investissement. Parce qu'au début, entre un point de force et d'intelligence, le choix semble aisé : les monstres ne font pas la conversation et ne changent pas d'approche pour affinités culturelles. Comme sus-mentionné, il y a assez de compétences fondamentales sans investir ses rares points dans un truc qui ne sert que trois siècles plus tard.


Pour finir, et c'est le point qui tue, l'aventure est intéressante. Réellement. Il s'agit d'unifier des villages (les prendre sous sa "protection"). Mais personne ne donne d'emblée d'indication. Le jour ou tu "possèdes" enfin ton premier foutu village, tu en pleureras, ami joueur, si tu as tenu jusque là sous les coups de l'interface minable. Enfin une source de pognon, de soins gratuits (pour autant que tu réussisses à faire le chemin inverse) et ou lâcher les pnj "inutiles" (les artisans et le simple bas peuple qui vient le rendre plus populeux et monter le truc financièrement) que tu auras sauvés d'une mort atroce à beaucoup trop de reprises pour ta santé mentale.


Y'aurait pas mal d'autres trucs à dire en bien et en mal : le craft osé (à base de recettes récupérées à droite à gauche, qui permet d'empoisonner les armes, de se soigner, d'apprendre le grec mais qui nécessite de récupérer des ingrédients qui apparaissent aussi souvent que la comète de Haley), les artisans upgradables dans les villages possédés (avec des items à débusquer chez les marchands errants à l'espérance de vie merdique), tous les pnj du jeu qui n'ont aucune conversation, ce qui fait un monde étrangement vide pour des cartes pourtant ASSEZ vivantes merci et ainsi de suite ..

En fait, Konun 3, je conclurais comme ça : c'est un jeu génial invendable grâce à un niveau technique torché comme rarement. Les mecs qui l'auront piraté l'auront - comme d'habitude dans ce cas là - abandonné au bout d'une heure parce qu'ils se trouveront vite et à pas cher autre chose, les acharnés qui l'auront acheté via Impulse à pas cher et qui auront survécu vont s'éclater à monter une petite armée qui martyrisera les monstres et les bandits errants pour réunifier ce (super) monde de merde.
zeugme

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