Coup de gueule sur le cliché d'aujourd'hui sur l'intelligence artificiel au cinéma.

Comme beaucoup de films sur l'intelligence artificielle, Zoe nie sa propre problématique en transformant ses robots en purs humains. Si ce n'est leur origine, nulle différence ! Quel intérêt alors ? Un cliché vain...

C'est vraiment dommage car la réalisation, la mise en scène, la photographie et le jeu des acteurs sont très bons. La romance dramatique est, à l'évidence, un thème que sait filmer et mettre en scène Drake Doremus.
Cependant un'écueil actuel pénalise fortement son scénario. Au cours des dernières années passée, nous sommes finalement passer d'un cliché à un autre.
Du cliché passé des robots psychopathes incapables de ressentir émotions et sentiments et usant d'une réflexion purement rationnelle, nous sommes arrivés au cliché du robot capable des comprendre ses fameuses émotions et même de les ressentir et devenant donc essentiellement les jumeaux des humains, leur parfaite copie d'acier et d'électronique.

Mais quelle vision caricaturale manquant d'une réflexion philosophique la plus basique !
La capacité à ressentir émotions et sentiments ne suffit pas à faire un être humain, même des animaux en sont capables. Les émotions et sentiments sont d'ailleurs conditionnées par la physiologie même d'une espèce et les capacités intellectuelles et physiques qu'elle détermine. La qualité, la complexité, le type même d'émotion et sentiment dépend de cette complexe structure biologique de l'espèce.
D'où le fait qu'il est peu pertinent de comparer les émotions et sentiments de l'homme et des autres animaux, aussi sensibles soient-ils ! Les différences ne sont peut-être pas "de nature" mais elles restent fondamentales. La sociabilité, la culture, l'essence humaine a évolué au fil des évolutions physiques et intellectuelles de l'espèce.
Le sentiment amoureux, thème central du film, est d'ailleurs le cas le plus évident, l'amour d'un homme à sa femme n'est pas le même que celui d'un chien pour son maître, malheureusement... Moins évident mais tout aussi vrai, et prouvant l'influence du mode de vie, des capacités intellectuels et de la culture, le sentiment amoureux ressenti au XXIème siècle en France est différent du sentiment amoureux ressenti par les Spartiates de la grèce antique.

Ce qui est intéressant, c'est donc justement de questionner le type "d'être" découlant de la capacité d'être synthétique à ressentir des émotions mêlées à leurs capacités propres de mémorisations, d'analyse et de recul.
En quoi la condition synthétique influerait-t-elle sur notre façon d'être et de penser ? Alors que les sciences n'en sont pas encore là, c'est à l'art d'essayer d'imaginer, de deviner ces conséquences. Et ce film comme la plupart finalement refuse de le faire et se contente du cliché à la mode : robot avec émotions = humain.
Je trouve presque dangereux ce manque de réflexion ! Finalement, outre l'intelligence artificielle, ce cliché soutient l'idée que la robotisation n'a absolument aucun impact, aucune conséquence sur la nature humaine. C'est affirmer de manière simpliste que le "transhumanisme" ne présente donc aucun risque, ne peut finalement qu'améliorer l'homme car lui retirer sa physiologie biologique, partiellement ou totalement, n'altérerait en rien la nature humain... Tant qu'on est capable de ressentir des émotions et sentiments, tout est pour le meilleur dans le meilleur des meilleurs des mondes.

C'est pourtant selon moi l'un des attraits principaux de ces films auprès des spectateurs, ce qui les attires, les passionne, cette curiosité face à l'inconnu, cette volonté essayer d'imaginer comment les capacités numériques incorporées à l'être pourraient influer dans le futur sur notre nature morale, sociale et éthique. Paradoxalement, le cliché ancien du robot psychopathe, rationaliste et sans émotion, abordait ces problématiques. C'était une vision, certes, limitée de pourrait être capable une intelligence artificielle et les technologies. Limitée aussi parce que le rationalisme dénué d'émotion impliquait quasi-systématiquement des machines meurtrières et ennemi de l'humanité. On retrouvait finalement le même cliché que sur les psychopathes, forcément serial killer bien que les chirurgiens psychopathes soient bien plus nombreux que les psychopathes meurtriers... Aujourd'hui, les psychopathes sont des Intelligences Artificielles. Bref, réflexion limitée, basique, et à remettre en cause mais réflexion, malgré tout, avec les conséquences et tout le bazar.

Là vraiment, je commence à être agacé par le cliché actuel des IA qui sont davantage des humains avec un corps de robot que des robots capables d'émotions et donc ne présente plus aucun intérêt propre. Quitte à parler de la nature humaine, pourquoi ne pas parler des humains ? Je sais ça semble incroyable....