Zatoichi est, pour tout amateur de chambara qui se respecte, une institution. Si, assez logiquement, on peut avoir l'impression que les films de la série se suivent et se ressemblent, voire se copient, le plaisir reprenait le dessus tant les codes étaient respectés. La série se déguste aujourd'hui comme une petite madeleine un peu coupable mais si agréable.


L'itération de Kitano reste comme la plus populaire et la plus connue, portée par l'aura de son acteur/réalisateur. Véritable légende du cinéma japonais du début des années 90, que ce soit en tant que réalisateur, d'acteur (surtout à l'étranger) ou à la télévision locale, son cinéma est imprégné de yakuza et de violence entrecoupée de douceur et de gentillesse (sauf pour Violent Cop qui est juste plein de yakuzas violents).


L'idée donc de voir un des mythes du film d'épée, genre populaire et codifié au possible, repris par un des réalisateurs les plus renommé et affuté du pays n'aurait pu être plus excitante que si il avait s'agit de Miike.


Et au final... C'est pas nul mais c'est clairement pas au niveau auquel on aurait pu l'attendre.


Le premier problème que m'a posé le film c'est sa structure. Une construction en flashback n'est ni mauvais en soi ni surprenant, mais la manière dont elle est érigée me pose soucis.
La règle d'or pour ce type d'écriture, c'est bien évidemment que toutes les histoires racontées soient intéressantes. Et en soi ici, on a d'une part celui consacré au masseur pour mettre en exergue ses capacités à la bagarre, puis un pour chaque cast secondaire disséminé tout au long du film.
Si l'histoire du maître d'arme déchu dans son honneur obligé de vendre son sabre pour subvenir aux besoins de sa femme mourante n'est pas bouleversante d'originalité, celle des 2 enfants est à la limite du ridicule. Les scènes de danses surtout, tant elles n'évoquent presque rien, ou en tout cas rien d'intéressant, et durent des plombes sont un supplices.
Le film y perd évidemment en fluidité, également en cohésion : le reste du cast secondaire est automatiquement relégué a la 3eme ou 4eme zone.


Le deuxième problème est quelque chose que je n'aurais jamais imaginé, venant d'un film zatoichi ou venant de Kitano : il n'y a pas de combats. Il y a des escarmouches de quelques secondes qui se finissent en effusions de sang, mais passé ça, on n'a plus rien à se mettre sous la dent.
Qu'on s'entende bien, je n'impose pas à un chambara d'être un actionner haletant, c'est même rarement le cas. Mais ce qui me fait aimer le genre c'est la convergence de l'entièreté du mouvement de celui-ci vers un seul et unique objectif : un combat final dantesque.
Ici aucun combat n'est dantesque. Aucune morts ne semblent vraiment importante ni particulièrement compliquée à atteindre. Zatoichi est un être surpuissant que rien ne vient troubler, tous sont condamnés dès qu'il lève le sabre.


Le troisième problème tient juste en une phrase : yo wtf pourquoi zatoichi est un super mutant de l'espace ?


Le quatrième problème n'en est qu'un demi : en l'absence de budget ou d'un délai de production plutôt court, le film base son esthétique sur les effets spéciaux. Que ce soient les gerbes de sangs, les ninjas qui sortent du sol ou les yeux de mutant de zatoichi, tout est géré en postprod.
Et qu'on soit bien d'accord, c'est un film de 2003, ok, c'est une petite production qui n'a ni le temps ni les moyens de recréer barberousse ou ran, je l'entends bien.
Mais d'une part, les yeux de mutant de zatoichi c'était vraiment mais vraiment pas nécessaire.
Et d'autre part, la gerbe de sang n'est pas un élément central de la mythologie de Zatoichi, ni des chambara, ni même forcément des films de Kitano. Sans aucune allusion au sang ou en le limitant au strict minimum, le film aurait sans doute marché. Le film aurait sans doute mieux marché. Que ce soit une décision prise a l'écriture, au tournage ou au montage, c'est à mon sens une mauvaise décision. Tout comme celle de transformer Zatoichi en Blade du pauvre.


Le film n'est pas à jeter complétement aux oubliettes, ça reste un bon divertissement qui se paye le luxe d'avoir de très très belles scènes. Mais quand on le remet dans le contexte du bon million d'excellent chambara disponnibles, on se dit que s'il n'y avait pas le nom de Kitano partout écrit dessus, il aurait sans doute été oublié depuis longtemps.

ofzzefvaovjr
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le 10 sept. 2020

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ofzzefvaovjr

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