Whitney
6.8
Whitney

Documentaire de Kevin Macdonald (2018)

Ceux qui ont découvert l’existence de Whitney Houston avec le film Bodyguard mesurent mal le statut stratosphérique que l’artiste avait déjà atteint avant.
Si certains titres ont dépassé les frontières, il semble que l’impact de la chanteuse se soit légèrement éventé en traversant l’océan. Pourtant il suffit d’entendre quelques secondes sa voix du temps de sa splendeur, de croiser quelques photos ou vidéos d’archives pour constater que Whitney Houston était impressionnante vocalement et physiquement.
Il faudra se pencher sur les différents tops et classements pour constater qu’elle figure encore en bonne position parmis les artistes ayant trusté la première place et imaginer un peu l’aura de cette artiste.


Difficile d’imaginer à partir de ces éléments comment tout a pu tourner jusqu’à la descente aux enfers et à la mort sordide au fond d’une baignoire.


On a tendance à penser que les excès sont une conséquence du succès, que perdre pied est le risque avec lequel les méga stars flirtent régulièrement.


Le documentaire vient rectifier les choses et en profite pour enfoncer le clou: l’image de papier glacé était fausse dès le départ. Whitney a été brisée dès son enfance, elle n’a pas attendu le succès pour découvrir la drogue. La célébrité, les strass, les paillettes n’ont fait qu'amplifier un mal-être latent.
Sans le succès, la vie de Withney Houston aurait été chaotique - mais anonyme, moins riche, donc peut-être moins destructrice, et encore….
Comme souvent la notoriété offre une caisse de résonnance à ce qui existe déjà: elle met en lumière les aspect positifs mais révèle aussi ce qui est moins avouable: quand le monde entier se met à avoir accès à votre vie privée, comment espérer pouvoir se sortir des moindres faux pas, comment s’accorder des deuxièmes chances, des droits à l’oubli alors que le moindre quidam connait vos errements?
Les réseaux sociaux ont aujourd’hui réduit la distance entre les stars et leur public: à la fois parce que


L’autre vrai problème, c’est que personne n’avait intérêt à calmer la star: tous ceux dont le train de vie était calqué sur le succès de la chanteuse craignaient de voir la poule aux oeufs d’or leur échapper, personne n’a su, voulu ou pu voir à quel moment toute espèce de contrôle avait disparu. C’est comme si la fusée avait été mise en orbite mais qu’elle quittait le champ gravitationnel qui lui permettrait de maintenir son cap.


Il ressort du documentaire un sentiment de dégoût: on ne saura jamais quels témoignages sont les plus proches de la vérité, on ne veut pas forcément connaître tous les détails, mais la mise en perspective des images d’archives, le recoupement des informations laissent l’impression que rien n’est propre depuis le début autour de la chanteuse.


Sa famille n’a cessé de la côtoyer, mais c’est cette même famille qui a contrôlé sa vie, qui a profité de son aura, qui l’a accompagnée dans ses excès, qui encore aujourd’hui essaie pour certains de redorer l’image de l’icône ternie ou pour d’autre de continuer à surfer sur le “j’étais là et j’ai vu ça”.


Le documentaire est sans doute orienté pour créer le malaise chez le spectateur. Sans qu’on arrive à trouver de vrais moments de bonheur: on a l’impression qu’à chaque fois qu’on vois Whitney rire, c’est factice, ou alors sous l’effet de la drogue, comme si elle n’était jamais autre chose que cette accro..
Ce manque de contre-point fini par donner l’impression d’une vie gâchée de bout en bout: certes il est nécessaire de montrer que derrière les sourires de façade les artistes cachent leurs souffrances, mais faut-il nécessairement noircir le tableau?
On préférera penser que le documentaire et les interviewés omettent des pans de la personnalité de l’artiste, ne s'attardent pas sur les moments de calme (ceux où il n’y a rien de croustillant à raconter). Parce que c’est trop lourd de penser qu’une vie n’est que souffrance et faux-semblants.


Enfin, quand s’estompe un peu la nausée du visionnage, on tente de mettre tout ce qu’on a ingurgité en perspective: que diraient nos proches si on les interrogeait comme ça sur nous? Qui serait le plus digne d’être écouté? Lesquels détiennent quelles vérités?
Pas la peine d’avoir une vie aussi tonitruante qu’une diva pour se rendre compte que les façons de raconter et de percevoir seraient sans doute très différentes entre les uns et les autres, et surtout qu’il est certain qu’aucun ne saurait à lui seul expliquer ce qu’on a été.


Sachant cela on peut dormir tranquille en espérant que Whitney Houston ait gardé pour elle les meilleurs moments, ceux qu’on ne nous montre pas, ceux qui relèvent vraiment de la vie privée.
J’ai entendu récemment dire qu’on avait tous 3 vies: la vie publique, la vie privée et l’intime. Il est rassurant de savoir qu’on garde toujours un part qui nous est propre et qu’on ne dévoilera jamais totalement.
On espère ne pas avoir tout vu de whitney Houston ça soulagerait l’impression d’avoir joué les voyeurs pendant 2 heures et de s’être laissé avoir par du sensationnel.

iori
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le 1 août 2020

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