Depuis un petit bout de temps, je nourris le désir de m'ouvrir au cinéma de pays insolites. Ceux dont on ne parle généralement pas, éclipsés par les grands pays traditionnels. Ainsi soit-il, peu de gens peuvent se vanter d'avoir approché les capacités cinématographiques de l'Uruguay dont j'ai enfin pu y goûter à l'instant même. Dans un premier temps, le synopsis ne me tentait guère. Trop banal me disais-je mais l'attrait pour une nation nouvelle et le désir d'approcher l'espace d'1h40 des traditions et un mode de vie autres font que j'ai craqué. Et finalement, je suis ressorti agréablement surpris, quoique désappointé car m'attendant à une oeuvre davantage comique que dramatique.
La cocasserie ne provenant alors que du lieu insolite de l'usine de chaussettes artisanales et aussi de l'affiche qui fait son petit effet. Pour le reste, c'est davantage la description de la misère existentielle d'un patron et de son employée. Tous deux introvertis, autant dire que vous risquez royalement de vous faire chier si vous vous trouviez autant avec l'un qu'avec l'autre ou les deux en même temps. Notre Jacobo ne tenant sa réussite que professionnelle au détriment du social : pas de femme, pas d'amis. Il ne vit que pour son travail qui lui permet de remplir un quotidien terne. La situation de Marta est encore plus triste car elle ne peut même pas se vanter d'avoir un statut professionnel important. Quand bien même, l'un ou l'autre n'arrive pas à prétendre au bonheur, à l'épanouissement. Jacobo est intérieurement persuadé qu'il a raté le train en marche et, afin de visiblement redorer son blason, fera croire à son frère Herman qu'il a su réussir sur tous les plans.
Il n'y a pas de communication explicite là-dessus. Nous sommes amenés à formuler des hypothèses stimulantes sur tous ces non-dits décrivant un Jacobo pour lequel nous avons autant de compassion que d'antipathie. Pourtant, l'arrivée de son frère apparaît davantage comme une providence que comme une fatalité. Ca sera pour lui une occasion inespérée d'échapper à sa routine, à pouvoir forger de nouveaux liens avec son frère, à pouvoir, pourquoi pas, avoir des rapports autres que professionnels que Marta lui lancera sans qu'il ne puisse les saisir. Le voyage dans lequel il s'embarque pourrait le libérer de ses craintes, de voir la vie autrement, de combattre cette introversion qui fait partie prenante de sa personnalité. Mais parviendra-t-il à dépasser ses peurs ? A s'extraire d'un temps du cliquetis incessant des machines et de cette persienne qu'il tente de réparer chaque jour passant ?
Whisky est une fable maligne et délicate sur la solitude, la marginalité qui se fait tout en douceur, le tout s'achevant avec une fin ouverte nous laissant tout comme Jacobo dans une incertitude totale. Les deux comparses ont su parvenir à donner un rythme au vide. Chose qui n'est pas évidente. Si le film accusera indéniablement de quelques coups de mous, on tient une très bonne surprise qui mériterait à gagner un peu plus en popularité.